Il aura fallu attendre 14 ans pour pouvoir insérer la galette de Duke Nukem Forever dans mon lecteur. 14 ans ! Des attentes, des reports, des annulations et des retours à la vie plus tard, nous voilà face à la suite de l'un des monuments du FPS, le bien nommé Duke Nukem 3D.
Insolent, violent, gore, aguicheur, drôle, beau, le jeu de 3D Realms avait tout pour plaire à l'époque. Qu'en est-il de cet épisode HD signé Gearbox ?


It should be, after twelve fuc**ing years !

On ne l'attendait plus, mais vraiment plus. Il faut dire aussi que 1997 c'est pas hier... Le fameux message sur le site de 3D Realms « When it's done » avait fini d'achever nos espoirs. Après avoir reçu le titre de Vaporware de l'année plusieurs fois d'affilée, nous n'attendions plus rien de Duke. Plusieurs titres médiocres plus tard dans lesquels le héros blond revenait à ses premiers amours (shoot en 2D), la licence était considérée comme morte. Il ne s'agissait plus que d'une légende urbaine.
C'est alors que Gearbox a racheté les droits d'exploitation et nous a fait de nouvelles promesses. Passé les premiers instants où nous croyions au poisson d'avril, les vidéos ont commencé à pleuvoir, les screenshots aussi. La machine était en marche. Duke revenait pour de bon.
Il est d'ailleurs étonnant, de la part de Gearbox, d'avoir eu le courage de reprendre cette licence. En effet, de nombreuses années s'étaient écoulées depuis l'annonce d'origine et les attentes des joueurs avaient crû exponentiellement. Le développeur s'est donc retrouvé avec une licence jouissant d'une bonne cote de popularité auprès des anciens gamers et d'une marge de manoeuvre très faible. Ce sera excellent ou ça ne sera pas. Gearbox l'a bien compris et ne lésine pas sur les moyens. Campagne promotionnelle à hauteur de l'égo du héros, phrases choc, autodérision et surtout respect annoncé du prédécesseur. Dès les premières secondes, on sent cette volonté. Preuve en est que tous les développeurs ayant contribué historiquement au développement du titre sont cités dans les crédits.
Le menu avec la bonne musique qui crache nous met immédiatement dans l'ambiance.
Duke Nukem est de retour et ça va chier !



Hail to the king baby !

Maintenant que l'on maîtrise cet historique chaotique, on est prêt à lancer une partie.
Première bonne surprise, l'ambiance est au rendez-vous. Les développeurs l'ont compris, Duke Nukem n'est pas un héros comme les autres. Ce garçon est décompléxé, fier et insolent. On le retrouve donc en train de se vider la vessie dans un urinoir typé vestiaire de stade. Gearbox nous engage même à le faire en QTE. On ne peut s'empêcher de sourire.
Une fois la chose faite, on rentre dans le vif du sujet, le tutorial obligatoire à tout jeu récent. On saute un peu, on teste la caméra et là, première mauvaise surprise, si le jeu a été développé pour le PC, le système de visée est nettement plus adapté à la console et sa manette. Argh ! Petit tour dans les options pour changer ça. On galère un peu parce que c'est mal foutu et c'est reparti. On ne va pas commencer à se plaindre maintenant, le jeu tourne depuis à peine 30 secondes.
Deuxième constat, c'est moche. Mais vraiment moche ! Même sur PC avec la configuration maximale, il reste moins beau qu'un Half Life 2 sorti bien des années plus tôt. C'est fâcheux, mais pas grave. Duke est de retour, on peut bien pardonner ce manque de réalisme dans les textures ou dans les animations. Et puis après tout, qui a dit que Duke Nukem se devait d'être réaliste...
On continue à avancer dans ce tutorial et on se prend à sourire voire à rire franchement. Entre les soldats de l'EDF qui sont ébahis par des gribouillis made in Duke ou les répliques du héros himself, on est rassuré. Le jeu va être drôle, le ton Nukem est respecté. Il faut avouer pour un vieux gamer qui a connu et aimé le jeu précédent, c'est un véritable soulagement.
Une fois ce constat effectué, on peut se lancer dans le vif du sujet. L'essentiel y est.



Press Space to continue...

Le tutorial se fini sur un boss. Nouveau soulagement, les boss sont grands et ont l'air violent. Si le premier se tue assez facilement, il a au moins le mérite d'exister. Et là, première déception de taille : Le boss se tue avec un QTE...
Et c'est à ce moment précis que l'on commence à percevoir une foule de défauts sur lesquels on avait fermé les yeux parce que c'est Duke.
Tout d'abord les temps de chargement. S'ils sont longuets (avouons-le), ils deviennent carrément asphyxiants à chaque mort. En effet, plutôt que de disposer de Checkpoints qui permettent de reprendre la partie rapidement, chaque décès est sanctionné d'un écran de loading aussi long que celui servant à charger le chapitre. Dit comme ça, ce n'est pas très grave. Mais certaines situations (rares, heureusement) mettent vite les nerfs à l'épreuve. Cela dit, on est obligé de s'améliorer de straffer intelligemment, de gérer les sauts, les sprints et les headshots. Mais la recherche du skill n'est pas une excuse à une mauvaise gestion des chargements.
Puisque l'on parle de skill, là aussi le bât blesse. Si l'on a pu en début de partie corriger plus ou moins le problème de la visée, il en est autrement pour le reste du gameplay. Première constatation, Duke a vieilli. Si dans son aventure précédente il pouvait courir à volonté, le passage à la nouvelle génération l'a affaibli. S'il court sur plus de 10 mètres, il sera fatigué et devra reprendre son souffle avant de pouvoir entamer un nouveau sprint. De même, on peut dire adieu à ses anciens bonds de gazelle et dire bonjour à un saut plus typé Marcus Phoenix que Super Mario. Entendez par là que vous n'échapperez pas à une roquette bien placée en faisant un saut de côté...
D'autres détails commencent aussi à sérieusement irriter le gamer old school, comme le fait de devoir appuyer sur un bouton pour monter une échelle par exemple. On ne va pas en faire une liste exhaustive, mais à chaque chapitre s'en suit sa déception.

Mais après tout, qu'importe si le gameplay comporte des failles, nous sommes prêts à pardonner tant que le level design inspiré rend la progression du jeu intelligente et variée...
Une fois le tutorial passé, on se retrouve dans le vrai, dans le dur, dans le jeu en lui-même. Et là... Bon n'y allons pas par quatre chemins, le level design n'est pas inspiré pour deux sous. Certaines bonnes idées sont louables, comme le mini Duke Nukem avec sa voix gonflée à l'helium, lâché dans des phases de plateformes rappelant Toy Commander. Seulement, ce passage dure 5 minutes dans le jeu. Le reste n'est qu'un empilement de couloirs tous plus basiques les uns que les autres. De temps en temps les développeurs nous font espérer de grandes aires de jeu en extérieur, mais on se rend vite compte que ce ne sont rien de plus que des couloirs déguisés. Etrange de la part de la boîte responsable de l'excellent Borderland quelques temps auparavant. Alors on avance au gré de ces chapitres sans saveurs en attendant de se faire attaquer par un boss.
Et des boss, parlons-en. S'ils sont impressionnants par leur taille, ils n'ont de boss que le nom. Très simples à exterminer, on se surprend à imaginer des moyens efficaces et marrants de se débarrasser d'eux là où Gearbox a eu la flemme de pousser leur design jusqu'au bout. Prenons par exemple la Queen Bitch. Parti de bonnes intentions comme le clin d'oeil à Total Recall ou la marche à suivre pour pénétrer sa défense, le rendu final sent le bâclé. Une fois que l'on a compris la marche à suivre, il suffit de se mettre à l'abris, de reproduire ad vitam l'opération et on est débarrassé d'un boss qui aurait pu nous donner du fil à retordre. Difficile d'être plus précis sans spoiler, mais il n'y a aucune évolution dans le combat. Elle s'énerve un peu plus vers la fin (heureusement), mais rien de fou n'est à déclarer.
On pourrait se dire qu'il ne s'agit que de l'un des premiers boss et que ça s'améliore par la suite. Et bien non. Les boss changent mais les lacunes restent. On sent la bonne idée mais on se heurte à chaque fois au manque de travail (par temps ou peut-être par volonté) des développeurs.
Et la cerise sur le gâteau, fini les medkits, les sueurs froides face aux hordes d'ennemis, la peur du manque de munition. Déjà, les armes se trouvent partout, il n'y a pas un moment où l'on en manque. Un peu dommage, mais après tout, ce n'est pas un survival horror, c'est un Duke Nukem. Mais surtout, on ne peut porter que deux armes à la fois !... Si aujourd'hui il est de coutume dans les Call of Duty et autres Medal of Honor de ne pas être sur-équipé, dans un FPS tel que Duke Nukem il s'agit d'une aberration qui va non seulement à l'encontre du jeu mais aussi à l'encontre du fun !
Je ne parlerai pas non plus de la vie qui remonte toute seule si on reste bien à l'abri derrière un mur, je risquerai d'en être malade.



Balls of Fail

Il ne faut pas non plus tout reprocher à ce jeu. Pour les non-initiés, il reste un FPS bourrin. Médiocre mais bourrin qui pourra avoir des fans. Certains petits à côté sont appréciables comme les mini-jeux, mais soyons honnêtes, ce n'est pas pour ça qu'on a acheté ce Duke Nukem.
D'ailleurs on fini par se demander pourquoi on l'a achetée cette galette. De toute façon, on ne l'attendait plus ce jeu. Et on faisait bien. Le vrai Duke Nukem Forever est mort en même temps que 3D Realms.
Ce qu'on a entre les mains ne se trouve être qu'une vague ombre de ce qu'aurait du être le jeu. Ce DNF se trouve à mi-chemin entre un FPS old school avec des mécanismes datés mais correspondant à la licence et un FPS next gen avec une foultitude de choix dans le level design et dans le gameplay qui rappellent un Call of Duty.
Alors oui, on peut se dire que Gearbox a voulu toucher tout le monde en mixant ces deux styles complètement différents dans un seul et même jeu. Il faut avouer que la tâche n'était pas aisée. Entre contenter d'une part les joueurs qui attendent DNF depuis 14 ans et ceux qui n'imaginent pas un FPS autrement qu'un CoD, Gearbox avait de quoi s'arracher les cheveux.
Le soucis c'est que ce choix de mixer deux gameplay n'amène à rien. Trop classique pour les nouveaux, trop next gen pour les anciens, ce Duke a le cul entre deux chaises et se casse la gueule au bout d'une demi-heure de jeu.
Certainement conscients des lacunes de leur jeu, les développeurs ont alors compensé comme ils pouvaient en multipliant les clins d'oeil et autres farces qui n'aboutissent qu'à lasser le joueur. Même la phase dans le stripclub, restée dans les annales avec Duke Nukem 3D par son insolence est dans ce DNF un moment fade à passer où l'insolence à laissé sa place à la vulgarité. Où est passé le Duke Nukem qui surprenait, qui choquait et qui faisait rire ?
À l'image d'Indiana Jones, X-Files ou encore Die Hard, il y a des reliques des années 90 qu'il ne vaut mieux pas ressusciter.



Verdict :

Epic Fail ? Peut-être pas. Par certains aspects le jeu est sympathique. Ça change aussi de tous ces FPS pseudo réalistes. On ne tue pas du terroriste barbu mais du cochon alien. C'est marrant. De là à dépenser 30 euros voir 50 euros pour la version console, il y a un monde. Par contre à 10 euros sur Steam ou bien en occasion, on peut se laisser tenter par l'expérience si on est prêt à passer outre tous ces défauts pour se concentrer sur le personnage. Et puis le doublage est sympa aussi. Si la VF se paye le luxe d'avoir le doubleur officiel d'Arnold Schwarzenegger, le reste de la prestation est tellement minable qu'on lui préfèrera sa VO, pour le coup inspirée.

Ce qui est certain c'est que pour moi, l'aventure s'arrête ici. Duke est mort. Paix à son âme.
knardator
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le 14 juin 2011

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knardator

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