C'est étrange quand même, comme la hype peut survenir pour rien. J'avais bien aimé le premier Alan Wake, quoique fait un peu jeune, et j'avais moyennement apprécié Control. Aucune raison donc, d'être surexcité pour la suite d'Alan Wake. Mais allez savoir, un trailer par ci, une image par-là et c'était plié, j'étais fou d'impatience de toucher à la bête. Après 1h30 de récap de l'histoire et de ses DLCs, et un replay de Control (qui m'a confirmé que c'était un jeu franchement moyen, mais pas top), j'étais surexcité comme un gamin. La hype valait-elle vraiment le coup ?

Résonnement, comme un cri surgissant des bas-fonds de Cauldron Lake, un grand oui. Alan Wake 2 n'est pas sans défauts, mais il a le mérite de prendre des risques, d'oser proposer quelque chose qui sort de la routine quotidienne.

Le jeu nous met dans la peau à la fois d'Alan Wake et de Saga Anderson. Le premier est coincé dans l'antre noir, un monde parallèle au nôtre dans lequel les écrits peuvent changer la réalité du monde réel. Et ça tombe bien (ou mal) car Alan Wake, écrivain à succès, s'est foutu dans la merde tout seul et continue de foutre le boxon dans le monde par ses écrits. . La seconde elle, est une agente du FBI envoyé à Brights Falls (où se passe le jeu) pour enquêter sur des crimes liés à la disparition d'Alan Wake. Je n'en dit pas plus, pour ne pas vous spoiler le tout, mais c'est du bon. Oh oui, c'est du très très bon. De retournements de situations en péripéties délirantes, le jeu parvient à subvertir notre impression de ce qui est réel, à la manière un peu d'un Réalité de Dupieux. Le jeu se confond dans la trame de fond scénaristique que Remedy a tissé dans ses jeux : ainsi, l'univers de Control, d'Alan Wake et une version libre de droits de Max Payne se côtoie (dont on retrouve son équivalent dans Alan Wake sous la forme du coéquipier de Saga Anderson, Alex Casey et qui a les traits de Sam Lake, créateur du jeu et premier modèle de Max Payne 1). Seul point noir au scénario est sa fin, précipitée (bien que le jeu soit assez long, comptez ~15h si vous êtes rapides) et qui pose dans son cliffhanger plus de questions que de réponses. On termine l'expérience avec un goût d'inachevé, un peu dégoûté d'avoir à attendre un troisième jeu pour demêler ce foutoir titanesque.

Mais sinon ce que le jeu est beau putain ! Il en met plein les mirettes, sans pour autant foutre des kicks dans les performances, étant (dieu merci !) assez bien optimisé. Les paysages champêtres et la ville de Brights Falls sont réalistes et convaincants, tandis que l'antre noir où erre Alan retranscrit un New York noir, fantastique et terrifiant. Les personnages sont quant à eux très bien modélisés et les effets de lumière maîtrisés. La même chose peut en être dite pour l'ambiance sonore : les différents indices sonores sont bien foutus, le sound design des armes aussi, et le doublage français y est incroyable (quoiqu'un peu buggé : Saga Anderson passait des fois de façon complètement inattendue du français à l'anglais, et même à l'espagnol par moments. Fortiche, mais perturbant). La bande-sonore est assez discrète mais fait le café, surtout à un moment du jeu où un concert de rock déchaîné sert de toile de fond à une séquence d'action endiablée. Je n'en dis pas plus non plus sur ce passage, mais celui-ci à lui tout seul a fait gagner un point à la note.

En fait, le jeu aurait pu être un 9/10. Mais si Alan Wake 2 prend des risques au niveau de son scénario et de sa manière d'incorporer des séquences lives-action au sein du jeu, on peut en dire beaucoup moins au niveau de son gameplay. Il est même, beaucoup trop prudent. Le jeu ressemble à s'y méprendre à un Resident Evil dans sa façon de gérer les ennemis et les munitions : on se balade dans un monde semi-ouvert, on trouve des munitions et autres items ici-et-là, des fois en fouillant un peu, d'autres fois en résolvant des énigmes. Puis on tombe sur un ennemi (ou plusieurs) que l'on doit d'abord flasher sa tronche aussi fort que les phares d'un camion dans la gueule d'un cerf pour lui enlever son bouclier et ensuite le mitrailler. Si le gimmick est marrant au début, il n'innove que très peu comparé à son prédécesseur et devient vite redondant, voire frustrant quand on tombe en rade de batteries et qu'on ne peut plus faire tomber les boucliers. De la même façon, le jeu n'ajoute rien de nouveau avec ses boîtes-repas à collecter et ses "énigmes" à difficulté variable, de la facilité déconcertante aux appels au psychisme pour pouvoir lire les pensées incompréhensibles des développeurs. Ça ressemble à du Ubisoft, et ce n'est pas un compliment.

Cependant, le jeu innove dans sa façon de pouvoir basculer entre le jeu et "l'antre mental" des personnages : la chambre de l'écrivain pour Alan Wake, le salon de détective pour Saga Anderson. Dans la chambre de l'écrivain, Wake peut réécrire l'histoire et donc changer le monde qu'il l'entoure, ce qui a pour conséquence d'ouvrir des portes, d'obtenir des items, de changer la disposition des lieux... Dans le salon de détective, Saga, elle, peut assigner les indices qu'elle aura récoltés sur un tableau d'enquête pour essayer d'utiliser ensuite son "don" d'enquêtrice afin de trouver des éléments autrement cachés. Ces éléments de gameplay, simple de prime abord (et qui, franchement, ne cassent pas trois pattes à un canard), fonctionnent étonnamment bien et renforcent le sentiment d'immersion du jeu.

Bref, Alan Wake 2 répond présent à la hype, et ce, haut la main. Malgré quelques défauts de gameplay et une fin laissant un arrière-goût d'inachevé, le jeu brille par son scénario audacieux, sa réalisation visuelle et sonore de haut vol, et son habile mélange de réalité et de fiction. Ce n'est peut-être pas le jeu parfait, mais pour ceux qui cherchent à s'évader dans un monde à la fois étrange et envoûtant, Alan Wake apporte un vent de fraîcheur bienvenu et réveille le monde devenu trop générique des AAA, assoupis dans leur médiocrité.

Marcel_Patulacci
8

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs jeux vidéo de 2023

Créée

le 19 nov. 2023

Critique lue 38 fois

4 j'aime

1 commentaire

Critique lue 38 fois

4
1

D'autres avis sur Alan Wake II

Alan Wake II
Liehd
10

Le réveil du monstre

Après 13 ans d'attente et avec plus de 30 heures de jeu au compteur, Alan Wake 2, c'est terminé et c'est un sans faute, un 10, un GOTY, une promesse tenue, un system seller.Dans l'âme, il reste le...

le 18 nov. 2023

10 j'aime

12

Alan Wake II
Gahisto
3

Expliquez moi l'intérêt...

Franchement, je comprends pas....Je déteste ce genre de "jeu d'auteur", ça veut péter plus haut que son cul en oubliant juste d'être fun, parce que, avant de parler d'art, le but d'un jeu vidéo c'est...

le 22 déc. 2023

7 j'aime

5

Alan Wake II
val990
6

La peur de briller

Remedy est un studio intéressant, mais qui n'a pas vraiment réussi à complètement me convaincre depuis les Max Payne. D'un côté, il est plein de personnalité. Les devs aiment expérimenter avec les...

le 13 nov. 2023

7 j'aime

6

Du même critique

Cult of the Lamb
Marcel_Patulacci
6

Le Saigneur des Agneaux

Toi, je t'ai tout de suite repéré. Sous ta gueule d'ange de jeu indé se cachait sans doute un gameplay difficile et exigeant. Tes graphismes tout mignons dissimulaient une cruauté sans pareille. Et...

le 15 août 2022

8 j'aime

6

Deep Rock Galactic
Marcel_Patulacci
9

Bière qui roule n'amasse pas mousse

Deep Rock Galactic repose sur un concept simple. 4 nains, vivant sur une station orbitale au-dessus de Hoxxes IV, sont envoyés sur la planète à plusieurs reprises, afin d'effectuer diverses...

le 26 janv. 2023

6 j'aime

1