Pas mémorable

Crash Bandicoot "4", c'était forcément attendu. Suite de la trilogie culte, ce nouvel opus fait l'impasse sur les itérations plus ou moins oubliables des précédentes consoles pour reprendre la numérotation là où on l'avait laissée il y a plus de 20 ans avec Crash Bandicoot 3: Warped. La fibre nostalgique associée aux classiques du jeu de plateforme ayant été fortement stimulée ces dernières années avec les remakes de la trilogie originale, Crash Team Racing ou encore la trilogie Spyro, la perspective de tout nouveaux niveaux et d'une saga remise au goût du jour était excitante.

Malheureusement, le bilan n'est pas aussi positif qu'on pouvait l'espérer. Certes, Crash Bandicoot 4 est beau, visuellement varié, et dispose d'une durée de vie bien supérieure à celle de ses prédécesseurs, en accord avec les standards actuels. Mais la formule a changé, peut-être trop changé, pour vraiment satisfaire les joueurs des précédents volet. Etrange pari quand on suppose que ceux-ci constituent probablement le cœur de cible de ce nouveau jeu. Niveaux d'une longueur parfois indigeste, fonctionnement presque exclusivement par essai-erreur (le "die and retry" est maître dans Crash Bandicoot 4), absence quasi totale de niveaux véhiculés (il ne faut pas s'attendre à des niveaux sympa à dos d'animal), la structure de Crash Bandicoot est généreuse en atmosphères visuelles et en durée mais semble vraiment peiner à varier les plaisirs. Parmi les principales nouveautés, les ajouts de personnages secondaires jouables sont un apport plutôt anecdotique, ceux-ci n'offrant pas de différence substantielle avec les niveaux classiques.

Le gameplay pèche par sa focalisation sur la complétion. Redoutablement exigeant (12 gemmes par niveau, parfois plusieurs centaines de caisses à détruire), le jeu peut finir par ennuyer dans certains niveaux et amener à tout simplement passer le traditionnel "bonus" qui se retrouve dénué d'intérêt dès lors qu'on ne vise plus les 100% de caisses (ce qui arrive de plus en plus au fur et à mesure de l'avancement vers les derniers niveaux). De la même façon, les masques quantiques font l'effet d'un ajout peu intéressant dans la mesure où ils ne peuvent pas vraiment être utilisés librement, leurs pouvoirs étant de toutes façons indispensables pour finir un niveau. Ces masques sont un prétexte à ajouter une dose de difficulté dispensable compte tenu du bon niveau du jeu dans ce registre.

Le level design pose même un certain problème de rejouabilité. Là où il était amusant de se replonger dans un niveau de course-poursuite déjà complété dans Crash Bandicoot 2 ou 3 (par une pierre roulante, un ours ou un tricératops), il faut ici prévoir de longues sections de plate-forme "classiques" avant d'arriver à la poursuite, qui ne constitue à chaque fois qu'une partie d'un niveau beaucoup plus vaste.

En fin de compte, Crash Bandicoot 4 casse un peu la dynamique d'évolution entre les trois premiers volets. Crash 2 ajoutait des salles "hub" de niveaux, des sections à dos d'ourson, sur un surf, à jet pack, des poursuites. Crash 3 ajoutait des pouvoirs à chaque monde, des sections à dos de tigre, des univers toujours plus mémorables. Crash 4 n'ajoute pas grand chose de significatif, revient en fait plutôt aux bases de Crash premier du nom, et c'est un choix pour le moins regrettable.

Reste un jeu visuellement satisfaisant, tout de même riche en bons moments, mais assez loin des éléments qui faisaient l'attrait de ses prédécesseurs et ne parvenant que difficilement à atteindre leur caractère mémorable et jubilatoire.