Garrett dans la tourmente

Qu'on se le dise, Thief: Deadly Shadows est loin d'être un mauvais jeu. Il possède une direction artistique au poil, un design sonore assez bluffant et un bon gameplay par rapport aux autres jeux. En revanche, Thief: Deadly Shadows est un mauvais Thief ; il est bourré de défauts absolument impardonnables et c'est pour ça que je lui donne un bon 6, parce que c'est quand même se foutre de la gueule des adorateurs des deux premiers opus.

Commençons déjà par les points forts du jeu. Comme je l'ai dit précédemment, le jeu possède une direction artistique extrêmement bien fichue et cohérente, meilleure que celle de Thief 2: The Metal Age je trouve, mais toujours en dessous de celle de Thief: The Dark Project. Eric Brosius est de retour sur la partie sonore et comme d'habitude c'est excellent. Ion Storm a décidé que Deadly Shadows allait utiliser des musiques plus orchestrales comparées aux pistes d'ambiance de Thief: The Dark Project et de Thief 2: The Metal Age. Le résultat est très bon et les pistes collent parfaitement avec les environnements visités. Les musiques du château Rutherford ou encore de la cathédrale St. Edgar sont des petites merveilles. Les environnements visités sont d'ailleurs plus variés que dans Thief 2: The Metal Age, avec entre autres un vieux château, un sanctuaire Païen (très beau), le bâtiment secret des Gardiens, un orphelinat/asile abandonné ou encore un grand musée. L'histoire n'est pas en reste et même si elle possède quelques incohérences et des moments qui n'ont aucun sens, elle reste meilleure que celle de The Metal Age car plus mystérieuse et plus proche de The Dark Project dans l'approche et dans la thématique, car Deadly Shadows arrive à rendre la Cité de nouveau mystérieuse là où The Metal Age avait en grande partie effacé ce côté. Les cinématiques sont comme d'habitude de très très bonne facture (je parle ici des cinématiques animées, pas des cinématiques in-game qui sont horribles) et ont un petit côté surréaliste qui me plaît beaucoup. Le doublage est de très bonne facture. Certaines missions comme le manoir de la veuve Moira, l'orphelinat/asile ou le musée sont aussi de petites merveilles.

En revanche le jeu est bourré de gros défauts et ça, c'est pas cool. Déjà, les briefings super classes des deux premiers épisodes sont remplacés par un écran où Garrett explique ce qu'il va faire et ce qu'il doit faire sans montrer une seule image du lieu qu'on va dévaliser. Adieu les citations percutantes des Marteleurs, des Païens ou des Gardiens en début de partie avant les briefings, qui ont été remplacées par des citations qui n'ont aucun impact pendant l'écran de chargement. Parlons des chargements d'ailleurs ; les lieux qu'on visite sont très souvent divisés en deux maps de petite taille, ce qui rend donc la progression extrêmement saccadée et franchement super pénible au bout d'un moment, car en plus d'être tous les 50 mètres, ces chargements sont longs (5-7 secondes sur un PC récent) et nombreux. Selon l'un des développeurs, ces chargements sont dus aux limitations de la Xbox sur lequel Deadly Shadows est aussi sorti, et sachant qu'ils ne se sont pas fait chier à faire un développement séparé, ils ont fait un portage de médiocre qualité sur PC avec tous les problèmes inhérents à la console. Bravo Ion Storm. Là où The Dark Project et The Metal Age avaient des maps gigantesques (Song of the Caverns, Life of the Party), Deadly Shadows a des maps minuscules. La seule exception est sans doute le musée qui possède deux maps de plutôt grande taille.

Avec la mise en place de hubs qui partaient d'une très bonne idée au début, on se retrouve ainsi avec un jeu bizarrement plus dirigiste que les deux autres opus. Va là, fais ça, reviens me voir, va ici, vole-ça, etc. Ce serait sympa si les hubs étaient grands et n'avaient pas de temps de chargements entre eux, mais non. Des chargements en veux-tu en voilà. Avec un système de marchants et surtout de loot infini (puisque les objets de valeur des passants respawnent tous les jours), la difficulté est inexistante et ce même en expert puisqu'on peut s'acheter tout ce qu'on veut. L'IA est étrangement devenue plus stupide et si on se colle aux murs, elle ne nous trouvera jamais, mais vraiment jamais. Le mode Expert est une promenade de santé. Ah, et il y a une vue à la troisième personne qui ruine toute tension. L'ajout de gardes avec torches est en revanche un point très positif, pareil pour les bougies qu'on peut éteindre en cliquant dessus. Je me perds un peu dans ma critique car il y a tellement de défauts qu'il est difficile de tous les noter. Ah, oui, les models des personnages sont infâmes alors que les décors sont très jolis. Leurs cheveux brillent souvent dans le noir et leurs ragdolls sont à se pisser dessus tant elles bugguent souvent. La plupart des missions sont absolument inintéressantes, en particulier le sanctuaire Païen qui est très très beau mais qui est tellement plat et dirigiste que ça m'en donne la nausée. La tour de l'horloge, le vaisseau hanté ou encore la cité engloutie des Kurshok sont dans le même bateau, alors que le reste est plutôt de bonne facture.

Je peste souvent contre les cartes trop détaillées de The Metal Age et je préfère largement celles de The Dark Project car on a peu d'indications et on doit surtout se repérer comme des grands, sauf que pour Deadly Shadows les cartes sont tellement pauvres en indications (il n'y a même pas l'orientation, haha) qu'elles sont absolument inutiles et on ne s'en sert jamais, quand on pense même à les acheter. Les flèches à cordes ont été remplacées par des gants pour grimper sur les murs en pierre ce qui rend l'escalade cent fois moins passionnante car il n'y a strictement aucun danger. Que c'était fun de se balancer au dessus du vide avec ses flèches à cordes. Le loot possède aussi une petite lueur pour mieux le repérer, car le loot est en fait des objets sans valeur avec une lueur, oui. Si on jouait sans la lueur, il serait impossible de distinguer un objet normal d'une pièce de valeur.

Bref, on va arrêter le massacre ici. Deadly Shadows n'est vraiment pas une bonne suite à Thief. En revanche, le jeu possède de belles qualités malheureusement ruinées par des défauts impardonnables. Un gros gâchis, en espérant que Eidos Montréal ne commette pas les mêmes erreurs avec Thi4f.

EDIT : Je remonte un peu la note, quand même.