La narration là où on ne l'attend pas

Un héros mutique dont on ne sait rien, une ambiance eighties portée par une bande son ultra stylée, des scènes contemplatives entrecoupées de scènes de violence bien crues, une narration toute en ellipse… Non, ce n’est pas Drive, l’un des meilleurs films de l’année 2010 (si vous avez hurlé à l’escroquerie à l’époque, passez votre chemin, ce jeu n’est pas pour vous). C’est Hotline Miami, l’un des meilleurs jeux de 2012.

En terme de gameplay pur, Hotline Miami est impeccable : en vue façon GTA, premier du nom, on incarne un tueur à gage qui va infiltrer un bâtiment et en réaliser le nettoyage intégrale, étage par étage. Et l’idée, c’est de ne pas faire dans la dentelle. Vlan, je défonce la porte et le gars qui était derrière, tac, j’attrape la batte de base ball qu’il trimballait, crac, je défonce les crânes des deux autres types qui sont dans la pièce, avant de revenir achever le mec coincé derrière la porte en lui écrasant la tête contre le mur à coup de pied, hop, je ramasse un shotgun, je passe à la salle suivante…

Les meurtres s’enchainent à grand vitesse, on accumule les combos et les points, jusqu’à ce qu’on finisse par se faire tuer par nos victimes peu consentantes. Car le ballet meurtrier doit être accompli sans fausse note, sous peine de voir sa propre cervelle répandue sur le sol. Si l’interface est bien rétro, le gameplay aussi. On est dans du die and retry pur et dur, qui ne pardonne rien. Manquez votre cible, celle-ci répliquera dans la demi-seconde et vous tuera sans vous laisser de nouvelle chance. Le reload est instantané, on enchaine donc les tentatives en essayant d’être le plus rapide, maximiser les points et en essayant de gérer les imprévus. Si les déplacements des ennemis sont à peu près prévisible tant que votre arrivée n’a pas fait trop de bruit, au premier coup de feu tiré, tout l’étage rapplique et la situation devient vite ingérable. D’où l’intérêt d’user et abuser des diverses armes de mêlée (batte, barre de fer, pied de biche, sabre, perceuse, marteau, poignard…) qui peuvent être balancées à l’autre bout de la pièce à la tronche des assaillants pour gagner deux secondes de répit.

Mais le gameplay n’est que la moitié de ce qui fait de ce jeu un chef d’œuvre. Hotline miami est un bijou de narration et d’ambiance, sublimant les codes de réalisation de films comme Drive, mais aussi des réalisations de Lynch, et ce qui fait tout le charme du jeu rétro. Entre chaque niveau, des scènes de répit, où on voit le héros chez lui, récupérer son briefing de mission, un message sibyllin laissé sur son répondeur. On en profite pour inspecter son appart, on constate que cet environnement évolue d’un niveau à l’autre, conséquences de certains actes dans les missions. Et on reconstitue le fil des évènements dans sa tête, à partir des différents indices qui nous sont distillés. Rien de bien original, une histoire de mec qui tue pour la mafia, qui sur un coup du sort se retrouve à sauver une jolie fille, et la situation part en couille. Mais quand c’est bien raconté, bien mis en scène, c’est ce qu’il y a de meilleur. Comme Drive on vous dit. Et puis il y a des scènes plus space, où on a l’impression de toujours recroiser le même type au supermarché ou au vidéoclub. Et ces moments où on se retrouve convoqué devant nos employeurs, affublés de masques d’animaux immondes et flippants, à ne pas savoir si on rêve, si on hallucine, si c’est la réalité. Comme Lynch on vous dit.

Ah, ces masques ! Ces masques parmi lesquels on choisi celui dont on va recouvrir son visage avant chaque mission, petit cérémonial du parfait psychopathe parfaitement imbriqué dans le gameplay, chaque masque donnant un attribut particulier pour booster son personnage durant la mission. Et cette violence, notamment dans l’exécution des ennemis tombés au sol, différente pour chacune des armes de mêlée disponible et toutes bien gore, bien que représentées en quelques pixels. Le charme du rétro vous disais je plus tôt : un peu comme la bédé a stimule l’imagination dans ce qu’il faut reconstituer ce qui entre les cases, le rétro, avec des sprites grossiers, nous aiguille pour reconstituer dans son imaginaire des scènes d’action dantesques.
C’est bien simple : vous allez commencer à jouer à Holtine Miami, vous allez adorer, puis vous allez arrêter, mais ne vous pourrez penser à autre chose qu’à ce jeu tant que vous n’y retournerez pas. D’ailleurs, pour combler le manque, vous allez récupérer la bande son absolument fabuleuse et la mettre sur votre lecteur mp3 et vous la passer en boucle.
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le 14 nov. 2012

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