Un retour dans le passé...sans douleur

Voilà une œuvre qui a résisté à mon appétit de jeu vidéo durant de trop longues années.
Commencé une première fois sur console, la première Xbox dans mon cas, mes espoirs ont vite été douchés de par tous les soucis techniques que les versions consoles se traînent en comparaison de la version PC.
Simple avertissement, mais si vous souhaitez faire ou refaire Max Payne la question du support ne se pose pas, la version PC étant amplement supérieure aux versions consoles et non pas seulement techniquement, mais dans la construction du monde en lui-même avec des niveaux plus ouverts et autres détails qui ont leur importance.


Concernant Max Payne, ce qu'on notera d'entrée de jeu si j'ose dire, c'est à quel point le cœur de celui-ci à merveilleusement bien vieilli. Dans son ensemble la façon de narrer les événements, le gameplay ainsi que le retour de sensations entre l'écran et le joueur reste encore parfaitement pertinent plus de 20 ans après la sortie du jeu.
Ce qui aurait pu paraître comme une formule usée par le temps reste au contraire un modèle de simplicité et d'exemplarité de ce qu'un jeu vidéo doit être.


Figure parfaite de son temps le premier Max Payne a trouvé le point d'équilibre entre un gameplay solide et novateur tout en intégrant un scénario qui s'il peut paraître cliché sous certains aspects, n'en reste pas moins un superbe hommage aux films noirs et au cinéma hongkongais au point où Max Payne est devenu lui-même une référence pour le jeu vidéo avec le temps. L'impact de Max Payne n'en est que plus impressionnant quand on prend le temps de réfléchir au chemin parcouru par la petite équipe de Remedy à ce moment-là de l'histoire.
N'ayant pas les moyens de s'offrir les services de vrais acteurs ni même que de prendre le temps de créer de longues cinématiques animés, Remedy va piocher dans leur propre force de travail et les familles des développeurs pour les acteurs, ainsi que décider de partir pour un tour de New York pour prendre des photos et s'en servir comme élément de construction du comic book en jeu qui servira de base à la narration.


Max Payne, c'est le système D dans sa version la plus pure, vous n'avez pas l'argent ? Pas un problème, car ils ont des idées. Une bande de développeurs dépassant à peine la dizaine à bosser dans un garage et donnant vie à leurs envies les plus folles, caricaturale mais proche de la réalité à entendre Sam Lake actuel directeur créatif de Remedy et scénariste sur Max Payne 1.


Chaque aspect du jeu respire un travail passionné et méticuleux, le joueur que je suis ne peut cacher que même si Max Payne possède bien entendu des points qui mériteraient d'être retravaillés, on ne peut nier que malgré les deux décennies qui nous séparent de sa sortie, j'ai pris un plaisir fou à revenir dessus à chaque session ces derniers jours.
Le gameplay de Max Payne procure certains moments de satisfaction qu'on ne retrouve que trop peu ailleurs, même autant d'années après. Forcément le système de bullet time ou ralenti participe fortement à ce sentiment, inutile de revenir dessus en détail, mais cette feature reste si fluide dans son utilisation et grisante de plaisir que chaque saut au ralenti tout en observant la balistique réglée au millimètre près, ne peut que faire hérisser les poils d'un joueur normalement constitué. Même le plus fervent détracteur d'armes à feu ne pourra nier la jouissance de diriger Payne au détour d'une scène de guerre dans un bureau, et encore là vous vous doutez que les références à John Woo, ou encore Matrix pleuvent autant que les balles.Si tout n'est pas parfait notamment le placement de certains ennemis dans des recoins cachés et l'IA avec par moments un temps de réaction plus faible que ce qu'il faut à votre écran pour changer la couleur d'un pixel, il n'en reste pas moins que le cœur du jeu et son gameplay n'ont pas pris une ride.


Cette première itération de la série constitue un nouveau modèle à suivre et un nombre conséquent de jeux de tirs à la troisième personne sur les années qui ont suivi s'inspireront de Max Payne.
Gratter la surface pour y trouver chaque parcelle de défauts n'a à mon avis pas grand intérêt.
Par exemple, les phases de "cauchemars" sont certes un calvaire à contrôler, mais ne représentent qu'à peine 5 %, et encore, du temps de jeu. Non plutôt, car comme beaucoup d’oeuvre de la fin des années 90 et début 2000, il est plus intéressant de se pencher sur ce que Max Payne a apporté à l'industrie, et je pense qu'il n'est pas exagéré de dire qu'il fait parti d'un panier de jeux pionniers dont on aura toujours à redire, mais dont l'utilisation des nouveaux outils 3D a parfaitement été exécuté, s’installant comme une nouvelle référence.
Max Payne n'innove pas qu'uniquement au travers de son gameplay, mais aussi par son storytelling.
Sans donner aux joueurs des retournements de situations sensationnels, Max Payne propose tout de même des moments-clés du scénario qui demande à analyse et réflexion une fois l'aventure terminée.
S’il se contente de raconter et de la bonne manière une histoire humaine, un homme qui a perdu sa famille et n'a plus rien à perdre, et que cela peut paraître simple sur le papier, la manière dont Remedy exécutera cette histoire relève presque du tour de force en termes d'idées.
Narré sous la forme d'un graphic novel Max Payne pioche dans tout ce qui a fait les heures de gloire du film noir.
À vrai dire, je pense encore ne pas avoir trouvé chaque détail et références établies, car si les acteurs peuvent paraître hors jeux par moment, du fait de l'utilisation, comme vu plus haut, de personnes issue du studio ou des familles des développeurs (cf l'antagoniste du jeu est la mère de Sam Lake, lui-même jouant Max Payne en plus d'être le scénariste…), il n'en reste pas moins que l'écriture pour chaque personnage est complexe et intéressante et mérite une attention toute particulière, car de nombreuses voies de développement sont possibles pour expliquer les événements de Max Payne, le jeu prenant même le luxe de casser le 4ème mur à de rares moments.
Sombre à souhait Max Payne vous emmènera dans une direction dont on ne soupçonne pas nécessairement le développement au fur et à mesure de l'enfoncement de Max au travers New York, et surtout pensez à bien regarder chaque recoins du jeu car nombre d'indices sur la quête de Max vous seront donnés.


Enrobez tout ce que l'on vient d'aborder sous une esthétique à tomber pour 2001, et il deviendra difficile de ne pas trouver une once de plaisir dans ce Max Payne. Une mention particulière aux nombres frappant de détails que vous trouverez durant l’aventure, ouvrez l'œil et prenez le temps de tripoter tout ce que vous dénichez, car le jeu offre bien plus que ce qui peut laisser penser au premier regard.
Je sais que vous voulez un exemple alors laissez moi vous donner une boucle de conséquences inutiles mais intéressante. Au détour d'un simple bureau, je tombe sur un ordinateur, un vidéo projecteur et un tapis déroulant sur le mur ou vient se projeter l'image. Tirer sur l'ordinateur et le vidéo projecteur continuera à fonctionner projetant un "no input", tirer sur le mur et l'image sera déformée, tirer sur le vidéo projecteur et l'image disparaîtra, exemple vous conviendrait inutile pour beaucoup mais pour moi cela démontre toute la minutie que l’on trouve au travers de l'ensemble du jeu, du mouvement mécanique de chaque arme, en passant par la balistique et sa vitesse mais aussi par l’environnement au travers de la ville de New York.
Max Payne est une œuvre respirant le talent sous tous ces aspects.
Tout comme sa plastique superbe, son ambiance sonore est la cerise qui vient se placer sur le gâteau. Complété par une BO devenue iconique, Remedy a su marier avec la manière ses inspirations pour propulser l'action à un autre niveau, mais aussi les phases de narration à un point où ces différents moments deviennent mémorables.


Quel rodéo intense j'aurai vécu avec Max Payne, et même après 20 ans d'évolution du jeu vidéo, cette œuvre reste tout à fait pertinente et passionnante aujourd'hui, c'est souvent un marqueur des grands jeux. Simplicité et efficacité le tout poussé par une histoire profonde,
c'est ce que je retiens de ma balade au travers de ce New York enneigé et sombre. Un plaisir instantané une fois la souris en main, la petite équipe de Remedy, en 2001, a su livrer une œuvre authentique et unique trouvant l'équilibre parfait entre pur plaisir vidéo-ludique et narration cinématographique, ce qu'ils échoueront complètement dans Quantum Break 15 ans plus tard.
Max Payne lors de sa sortie deviendra un point de pivot et d'inspiration pour les shooters modernes à la troisième personne, d'une certaine manière de la même façon que John Woo le fera pour le cinéma, en cela Remedy à parfaitement accompli ce pour quoi ils ont voulu créer Max Payne, un classique.

Sajuuk
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Collection de jeux XBOX Originale, Journal JV Edition 2022 et Les meilleurs jeux vidéo des années 2000

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le 9 janv. 2022

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Sajuuk

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