Pour la première fois (épisode GBA anecdotique mis à part), Silent Hill débarque sur console portable. Et c'est bien la seule chose qui distingue Origins de ses illustres prédécesseurs. On voit clairement que les développeurs sont dans une impasse créative, que ce soit au niveau des mécanismes de gameplay, des ennemis rencontrés ou des lieux parcourus (mais en même temps, un Silent Hill sans hôpital à visiter, est-ce encore un Silent Hill ?). Cela dit, le format portable inédit du jeu permet d'excuser en partie le fait que la série tourne en rond depuis deux épisodes.

La qualité visuelle du titre saute immédiatement aux yeux : les graphismes sont très fins, le framerate jouit d'une belle solidité, et les animations sont assez naturelles, tout cela faisant du jeu un des plus réussis techniquement sur la console de Sony. Les effets d'ombre et d'éclairages sont tellement bien fichus qu'on se croit difficilement sur portable.

L'aspect sonore n'est pas en reste, avec Akira Yamaoka fidèle au poste. Les musiques sont franchement stressantes (surtout dans le monde altéré), et le silence (rare) n'apporte guère de répit au joueur tant il s'attend à voir quelque chose lui tomber dessus. On retrouve les bruitages caractéristiques de la série, tels que les craquements du sol grillagé, les ouvertures de portes, les items ramassés, etc. Le doublage est également réussi, assurant une bonne crédibilité de Travis et des personnages rencontrés, malgré des visages moins bien modélisés que d'habitude.


Puisqu'on parle de personnages : Origins nous met donc dans la peau de Travis Grady, nouveau venu dans la série, camionneur de son métier, qui aura le malheur d'emprunter un "raccourci" passant par Silent Hill... L'infortuné sera amené à croiser des têtes connues du premier épisode, ce qui permet d'en savoir un peu plus sur Dahlia la folle, sa fille Alessa, ainsi que l'infirmière Lisa et sa relation avec l'antipathique Dr. Kaufmann. Ceux qui après Silent Hill 3 pensaient en avoir fini avec ce pan de l'histoire devront attendre encore un peu. Mais l'histoire d'Origins reste toujours centrée sur Travis et ses démons intérieurs (rappelant par cet aspect-là Silent Hill 2, et la quête de James vers la paix intérieure -inutile d'en dire plus).

Venons-en maintenant au principal : le jeu en lui-même. Ce Silent Hill fait un plutôt bon boulot quand il s'agit d'angoisser le joueur, grâce à sa bande son sinistre, ses angles de caméra serrés et ses décors glauques à souhait. Le système de passage "on demand" entre le monde normal et le monde altéré par le biais de miroirs disséminés dans les niveaux - la grande nouveauté de cet opus - ne diminue pas le sentiment d'oppression, à mon avis, étant donné que la progression est linéaire et que changer de "dimension" est un passage obligé pour progresser. En fait, c'est juste la fréquence des passages d'un monde à l'autre qui est augmentée, et la durée dans chaque monde raccourcie. Ce que la progression a de relativement frustrant, ce sont les allers-retours qu'il faut se farcir entre l'endroit où l'on trouve une clé et la porte qu'elle ouvre, nécessitant de revenir sur ses pas en passant plusieurs fois entre le monde normal et le monde altéré, car quasiment tous les lieux accessibles le sont soit dans un monde soit dans l'autre, mais rarement dans les deux. Résultat, on passe un peu trop de temps à courir derrière des clés pour ouvrir des portes qui se trouvent à l'opposé, entre deux énigmes dont l'excessive facilité laisse perplexe. Heureusement, la jouabilité est simple, bien transposée sur PSP, et les habitués de la série retrouveront facilement leurs marques (l'absence de stick droit n'étant absolument pas pénalisante dans un jeu comme celui-ci).
Les ennemis rencontrés ne sont guère réactifs si l'on prend soin d'éteindre sa lampe de poche, et la profusion d'armes blanches combinée à la possibilité de sa battre poings nus assurent des affrontement gagnés d'avance, à condition de surveiller sa santé et de se soigner à temps. Le système d'armes qui se cassent est rebutant à première vue, mais on finit par s'en accommoder (d'autant plus aisément que la plus grosse tare de SH4, à savoir l'inventaire limité, n'a pas été reproduite ici). Balancer un téléviseur portatif ou une grosse bouteille à la tête d'un ennemi apporte d'ailleurs une certaine satisfaction, décuplée lorsque qu'on achève le monstre agonisant à même le sol, ce qui s'accompagne d'un gros plan bienvenu. Le problème avec les ennemis, c'est qu'ils sont pour la plupart lents (sauf quand ils sont dans le faisceau de la lampe torche), peu dangereux, et finalement peu effrayants, soit à cause du côté déjà vu (infirmières, chiens, "straight jackets", ...), soit à cause de leur répétition (au 30ème monstre identique qui produit les mêmes grognements et se déplace de la même manière, on finit par les ignorer).
D'autres souffrent d'un côté too much, comme les "twobacks" davantage susceptibles de provoquer l'hilarité que l'effroi. Il est aussi dommage que le nombre d'ennemis "dispatchés" dans les niveaux, et leur emplacement, soient toujours scriptés plutôt qu'aléatoires. Par exemple, si l'on trouve un objet important dans une pièce qui était fermée à clé, on peut être sûr qu'en ressortant les couloirs seront de nouveau infestés d'ennemis. Un jeu comme Bioshock (premier exemple qui me vient en tête) montre qu'il est bien possible d'avoir des ennemis qui apparaissent de façon imprévisible et surprenante.


En conclusion, Silent Hill Origins est une belle réussite pour la console portable de Sony, qui permet de se replonger dans l'univers si particulier de SH. Certes, cet épisode a bien du mal à apporter quoi que ce soit à la série et à masquer ses mécanismes rouillés. Mais l'histoire intéressante, ainsi que la réussite visuelle et sonore, sensorielle et émotionnelle, valent la peine qu'on s'y attarde - expression peut-être mal choisie vu que le jeu se termine en 5, 6 heures. Malgré des faiblesses qui passent difficilement inaperçues après 5 épisodes, j'ai bien aimé ce dernier voyage dans mon village abandonné préféré, grâce à ses qualités qui l'emportent sur ses défauts. Ce titre montre tout le potentiel de la PSP quand elle est bien exploitée.
Jojos
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le 26 nov. 2010

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Jojos

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