J'étais un peu réticent à me lancer dans Until Dawn au vu des dernières productions de Supermassive Games, qui ont un effet repoussoir sur moi. Mais ce qui m’a convaincu (outre une discussion avec l’un des mes éclaireurs) c’est la présence de Sony, qui est généralement le signe d’un soutien financier et technique digne de ce nom ainsi que d’une bonne gestion de projet.


Au départ j’ai eu beaucoup de difficultés à me plonger dans cette histoire d’adolescent nord-américain privilégiés et tête à claques, comme tout droit sorties d’un American Pie. Les personnages m'étaient tellement insupportables que je ne développait aucune empathie pour eux, au point de me dire que c’est avec plaisir que je les laisserais à leur sort funeste, et que donc de fait le jeu ne fonctionnerait pas sur moi, le but de ce film interactif étant tout de même de tenter de garder un maximum de protagonistes en vie jusqu'à l'aube.


Mais n'étant pas du genre à abandonner un jeu en cours, je ne regrette pas d'avoir poursuivi. Car ce qui ne s'apparente qu'à un slasher ultra-référencé et un peu nanardesque, est finalement plus subtil qu’il en a l’air. A mesure que l’intrigue évolue dans des directions pas forcément attendues (même si les twists sont anticipables pour un joueur attentif grâce à de nombreux indices), les personnages dévoilent une nouvelle facette, plus vraie, plus attachante. Le meilleur exemple reste Mike, imbuvable en début de jeu, il finit par porter l’intrigue sur ses épaules avec Sam, le personnage incarné par Hayden Panettiere.


Une autre facette du jeu intéressante c’est la façon dont la maladie mentale est représentée (difficile d'en parler sans spoiler), et les séquences avec l’analyste qui influencent (très légèrement) certains détails du jeu. L'idée de se baser sur les propres peurs du joueur pour personnaliser l'expérience aurait pu être brillante si vraiment exploitée, un peu comme dans Silent Hill Shattered Memories. Finalement je me suis surtout délecté des cabotinages de Peter Stormare et de sa performance capture à la limite de l’uncanny valley.


En puisant dans des influences très larges du cinéma d’horreur, Until Dawn fait parfois un peu office de fourre-tout, avec bien sûr des références aux grands noms du slasher quasi-permanentes comme le classique Halloween, Scream ou Souviens-toi… l'été dernier, mais aussi du James Wan ou du Saw. L'écriture est en demi-teinte, la façon dont l’intrigue se déroule est assez efficace, mais, slasher oblige, on n'échappe pas aux dialogues un peu pourris, aux ruptures de tons malvenues et aux clichés habituels du genre (hôpital désaffecté, chalet isolé, etc.). Difficile d’y voir une œuvre vraiment profonde qui suscite la réflexion, on est juste dans une série B d’horreur assumée. Enfin, qui se veut être de l’horreur, parce que pour ma part je n’ai jamais eu peur un seul instant, ni ne me suis senti mal à l'aise une seule fois. La surenchère de jumpscares complètement foirés n'aide pas à rendre crédible l’ambiance que le jeu tente d’installer, parfois avec un certain succès.


En bon film interactif, Until Dawn change le cours des événements en fonction des agissements du joueur. Qu’il s’agisse d’une série de QTE ou de choisir entre deux actions, ces paramètres sont gardés en mémoire par le système de “butterfly effect” (effet papillon). L'idée c’est qu’un choix anodin peut avoir de grandes répercussions dans le futur. En jouant on s’imagine toujours une infinité de possibilités, et on se demande dans quelle mesure nos choix ont vraiment un impact. En vérité, assez peu. Comme toujours avec les jeux du genre, l'expérience se ternit une fois l’illusion de la première partie dissipée. Même si Until Dawn parvient à justifier le manque de conséquences dans les premiers chapitres de l’aventure grâce à son scénario. On peut le voir comme une façon de leurrer le joueur, mais je n’en dirais pas plus. De toute façon l'opacité du système oblige un peu parfois à jouer “au feeling”, vu qu’il n’y a pas toujours de logique apparente. Seuls les totems, que l’on peut dénicher dans les séquences d’exploration libre, permettent d’avoir un très court aperçu de l’avenir et parfois d’adapter ses choix en conséquence.


Ces séquences sont d’ailleurs un moyen efficace de casser un peu le déroulé automatique des cinématiques et de laisser le joueur avancer à son rythme. Même si elles ne représentent qu’un intérêt ludique minimal (marcher et chercher des points d'intérêts/objets), la présentation avec des caméras fixes façon Resident Evil est plutôt efficace et permet au joueur de profiter du soin apporté à la réalisation des environnements. Il faut dire que Until Dawn est très joli pour un jeu du début de l'ère PS4, les effets de lumières et la modélisation des personnages restent exemplaires. Le framerate souffreteux ne m’a pas dérangé, sans doute grâce au mode Boost et l’apport de puissance de la PS4 Pro.


Au bout du compte, faute d’avoir été une expérience horrifique convaincante, Until Dawn aura au moins eu le mérite de me divertir bien comme il faut. Et c’est peut-être tout ce qu’il faut attendre d’un film d’horreur interactif de série B.

Créée

le 7 juin 2023

Critique lue 36 fois

4 j'aime

Karadras

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