"Les chansons de ma vie" : Sky Ferreira

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«J'ai été la victime d'abus sexuels quand j'étais jeune. J'en ai subi plusieurs fois dans ma vie. J'ai ensuite essayé d'éviter d'en parler, de ne pas y penser. Puis j'en ai discuté avec une fille qui subissait les mêmes traumatismes, et ça l'a aidé. Cette chanson ne parle pas du fait d'être une victime. C'est l'inverse. Voilà ce qu'elle signifie pour moi : reprends ce qui t'appartiens. C'est une forme de révolte contre toutes les formes de soumission, contre toutes les personnes abusant de leur pouvoir sur les autres. En l'écoutant, je me sens plus forte.»

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«C'est la chanson que j'aurais aimé écrire. Je l'écoute et je me dis « Dieu ! Tout est parfait ! ». Je ne changerais rien à ce morceau, absolument rien. Alors que mes chansons, quand j'y reviens... je me dis que j'aurais pu changer certaines choses, je ne les trouve jamais parfaites. L'année dernière, quand j'étais en pleine phase d'écriture, j'étais dans une période de dépression. Je suis alors allée au Japon pour le festival Fuji Rock et je suis allée voir The Cure. Ils ont joué « Pictures Of You », et le résultat fut encore meilleur que la version studio. C'était hyper étrange, un immense brouillard de fumée les entourait, avec vue sur cette immense montagne. Tout était brouillé, je ne voyais que les cheveux de Robert Smith... c'était comme regarder le Smith d'il y a trente ans. Ce n'était pas comme si j'assistais au concert normalement : j'étais sur la scène et il était si proche de moi, si réel. Et là, ce fut la première fois que je me suis sentie heureuse depuis très longtemps. Je ne dirais pas que cette seule expérience m'a sortie de ma dépression, mais elle m'a vraiment aidé. Parce que je me suis dit "oh, je suis donc capable d'être heureuse".»

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«C'est pour moi une chanson qui ne représente pas seulement l'idée de grandir, de mûrir, mais aussi de grandir publiquement, face à des personnes qui n'acceptent pas cette évolution, qui n'acceptent pas que tu deviennes adulte. J'ai vécu ça, autant face à mes amis que face aux adultes. J'ai toujours eu l'impression d'être plus mûre que les gens de mon âge. Je suis une adulte depuis que j'ai 13 ans. J'ai dû devenir autonome à cet âge-là. Cette chanson représente mon indépendance. D'autant plus que Fleetwood Mac n'est pas un groupe de jeunes, alors que je les écoutais adolescente. Les gens étaient surpris, et pouvaient prendre ça pour du snobisme, alors que j'étais simplement plus mature que la masse.»

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«C'est une autre chanson que je partage avec mon petit copain, car c'est notre amour pour Elliott Smith qui nous a rapproché. Pour moi, Smith représente Los Angeles, la ville d'où je viens. Cette chanson, plus particulièrement : Alameda Street est une rue de L.A. que je connais bien. Quand il est mort, j'avais une dizaine d'années. Je ne le connaissais pas à l'époque, mais je suis allée près du mur où tout le monde est allé lui rendre hommage pour voir ce qui se passait (le mur où a été prise la photo de la pochette de Figure 8 est devenue à la mort du chanteur un lieu de pèlerinage pour ses fans, ndlr). La réaction de la ville a été si intense à la suite de son décès que je suis allée télécharger « Between The Bars » et « Needle In The Hay ». Et j'en suis tombée amoureuse. Quand j'écoute Smith, je repense à ma première année de lycée, à ma dernière année de collège. Il m'inspire des sentiments nostalgiques. « Alameda »me fait penser aussi à tout ce que j'ai enduré avec mes amis, qui étaient tous accros aux drogues. C'était une période mitigée, belle et terrible en même temps, dans laquelle je me replonge grâce à Smith. Il est l'un de mes paroliers préférés, ce sont un peu ses chansons qui m'ont motivée à en écrire moi-même.»

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«Cette chanson me suit partout. « Heroes » a toujours été l'une de mes chansons préférées, et je l'ai découverte dans l'un de mes films préférés, "Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée". La chanson a vraiment été une révélation pour moi lorsque j'ai regardé le film. Mais ce qui me lie à « Heroes », c'est surtout le fait que je l'ai entendue par inadvertance à plusieurs moment étranges de ma vie. Tu ressens quelque chose de très intense quand une chanson que tu adores te tombe dessus alors que ta vie vient de basculer. La première fois que je suis sortie avec mon petit copain, je l'ai entendue. Puis un jour où quelque chose de très dur nous est arrivé, j'ai vécu une expérience bizarre : j'étais debout dehors, près de chez moi à Brooklyn, en pleine nuit, à tourner en rond, à prendre l'air pour me remettre, et là, soudainement, de nulle part, j'entends « Heroes » à distance. Je suis alors devenue complètement folle, j'ai descendu la rue jusqu'à arriver près d'une fenêtre d'où la chanson était jouée à plein volume. J'étais heureuse et triste en même temps de l'entendre. Je me disais, « vous vous foutez de moi ! ». Cette chanson permet ce genre d'associations car elle est très intime, et en même temps peu personnelle, universelle. Pour moi, elle représente aussi l'excitation. Pas l'excitation qui intervient quand on s'amuse, non, celle qui vient avec les drames, comme lorsque tu as le cœur brisé. Elle me donne aussi de l'espoir, elle est comme un clin d’œil venant d'un être qui m'accompagne de je-ne-sais-où.»