Cover Wong Kar-wai - Commentaires

Wong Kar-wai - Commentaires

Élaborant d’infimes variations d’un film à l’autre, recourant à des procédés plastiques et formels extrêmement sophistiqués pour formaliser les états du désir, du chagrin, de la langueur et de l’attente amoureuse, Wong Kar-wai est le Josef von Sternberg de notre époque, un artiste virtuose parmi les ...

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9 films

créee il y a presque 12 ans · modifiée il y a plus d’un an

As Tears Go By
6.9

As Tears Go By (1988)

Wong gok ka moon

1 h 42 min. Sortie : 29 juin 2022 (France). Policier, Drame, Romance

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Si le premier long-métrage de l’auteur revendique l’héritage de "Mean Streets", il semble hélas n’en avoir retenu que l’apparence. Il ressemble aux plus conventionnels des films de gangsters, construit sur une mécanique répétitive utilisant deux personnages : un petit truand et son copain d’arnaque, le second se mettant toujours dans des situations impossibles que le premier doit rattraper comme il peut. De temps à autre la place est laissée à une aventure amoureuse, vite interrompue pour retrouver le schéma initial. Tous les effets formels et techniques sont utilisés pour théâtraliser la violence, l’ériger en valeur opératique, mais ils traduisent une peur forcenée de rater le dernier train et accentuent le caractère artificiel d’une œuvre dont la chair et les sentiments n’existent qu’à l’état théorique.

Nos années sauvages
7.1

Nos années sauvages (1990)

Ah Fei jing juen

1 h 40 min. Sortie : 6 mars 1996 (France). Drame, Romance

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

La géographie intimiste que Wong dessine ici cristallise cinq existences autour de Yuddy, vitellone charmeur, mufle et flambeur qui gère ses conquêtes, danse sur des rumbas de Xavier Cugat et somnole en fumant des Lucky Strike. C’est peu dire que le film est photogénique, dans ses plans de ventilateurs rafraîchissant des peaux moites, dans ses éclairages céladons sur des rues humides, dans son ballet sentimental et entêtant, nocturne et désœuvré, qui épuise les affres de la jeunesse et se laisse envahir par des rêveries somnolentes, comme on est pris parfois d’accès de fièvre. Les filles (Maggie Cheung et sa frange timide, Carina Lau et ses grands yeux expressifs) sont très belles, les garçons (Leslie Cheung, Andy Lau) ont une classe pas possible, et la promenade est aussi sensuelle que mélancolique.

Les Cendres du temps
6.5

Les Cendres du temps (1994)

Dung che sai duk

1 h 40 min. Sortie : 10 septembre 1994 (Hong Kong). Drame, Action

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Les deux premiers plans, où les deux principaux personnages masculins sont décentrés et relégués aux limites du cadre anamorphique, indiquent la teneur du récit : aux marges du film de sabre, dans un espace cinématographique qui relève plus du rêve que du récit réaliste, avec plongées oniriques dans les méandres du passé, réminiscences de la mémoire, personnalités qui se dédoublent, rôles qui s’échangent, narration gigogne et cyclique qui se démultiplie en suivant une construction labyrinthique. Dotée d’un visuel flamboyant fondé sur deux couleurs cardinales (l’ocre des dunes de sables et le bleu turquoise du ciel sur lequel elles se découpent), cette œuvre à la conception singulière exprime avec un flair audacieux l’incertitude de héros en proie au doute et à des passions gagnées par l’obscurité.

Chungking Express
7.7

Chungking Express (1994)

Chung Hing sam lam

1 h 42 min. Sortie : 22 mars 1995 (France). Comédie dramatique, Romance

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Le cinéaste bidouille quatre histoire en une, les enchevêtre dans un labyrinthe de bars, d’échoppes et de sentiments, mitraille dans tous les sens des images colorées, fait miroiter la jungle chatoyante et assourdissante de la ville en alternant vitesse et fixité et en reliant les rêves et les objets. À la revoyure, cette œuvre de jeunesse de Wong (du moins celle qui l’a fait découvrir chez nous) m’a paru accuser un peu son âge. Certes tout son univers est là, évidemment il affirme un style bien à lui fait de langueur embrumée et de stylisation extrême, de vagues à l’âme et de perceptions affectives déformées, mais je le trouve un peu brouillon malgré de très belles échappées poétiques (tel le transistor crachant en boucle et à tue-tête le "California dreamin’" dont Faye Wong s’enivre).

Les Anges déchus
7.6

Les Anges déchus (1995)

Do lok tin si

1 h 36 min. Sortie : 5 mars 1997 (France). Gangster, Drame, Romance

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Wong poursuit ses recherches avec cette nouvelle déambulation nocturne sous les néons clinquants de Hong Kong. On y croise les mêmes silhouettes portant costumes et lunettes noires, le même tueur exécutant ses contrats, la même fille solitaire : personnages irréels et fantasques qui échappent les uns aux autres autant qu’ils nous échappent. Architecte de l’urbanisme moderne, chantre d’une jeunesse minée par la frustration sexuelle et la recherche affective, le cinéaste élabore une mosaïque ultra-maniériste, speedée, morcelée, faite de flux, de circulation, de combustion, d’épuisement, de fatigue et de recharge, perméable aux formes issues de la culture populaire, et qui se laisse regarder et entendre comme un clip frôlant la perfection technique. Mais son inspiration commence à tourner au système.

Happy Together
7.4

Happy Together (1997)

Chun gwong cha sit

1 h 36 min. Sortie : 10 décembre 1997 (France). Drame, Romance

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Poisseuse est la nuit et solide la solitude. Sans renier son lyrisme mélancolique, Wong accorde cette fois sa mise en scène de façon moins gratuite aux affects de ses personnages, un couple de garçons expérimentant la fin de l’amour le long d’une séparation éternellement reconduite. Sous l’emprise de la dépossession, de l’exil et de la nostalgie, le film invente des digressions et des bégaiements qui, loin d’être des forfanteries stylistiques, fonctionnent comme les pulsions véhémentes de cœurs en peine. Tel une chanson triste et entêtante, il organise une suite d’hésitations entre rupture et reprise, danse le tango d’un désir qui avance et recule en même temps, comme une poignante injonction au chavirement, et capte les gestes de la tendresse et de la violence, le poison du ressentiment et le poids du regret.

In the Mood for Love
7.8

In the Mood for Love (2000)

Fa yeung nin wa

1 h 38 min. Sortie : 8 novembre 2000 (France). Drame, Romance

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

En se soumettant à la plus canonique des équations (un homme et une femme), Wong touche la quintessence de son art. La musicalité des mouvements, les lumières douces et hypnotiques, les parfums que l’on croit sentir se glisser entre les plans, les amorces de cadre vaporeuses constituent l'expression langoureuse d'une irrésistible attraction. Ces sensations pures, ces images splendides comme de luisantes étoffes restituent au sentiment amoureux son rythme juste, et traduisent une valse des sentiments réprimés mais explorés jusque dans leurs variations infinitésimales et leurs virtualités rêvées. À la fin, lorsque les ruines du temple d’Angkor recueillent le secret du héros, le mélodrame accède à une dimension immémoriale : peu de conclusions sont aussi poignantes que celle de ce somptueux et mélancolique poème du désir et du renoncement.
Top 10 Année 2000 :
http://lc.cx/UPP

2046
7.3

2046 (2004)

2 h 09 min. Sortie : 20 octobre 2004 (France). Drame, Fantastique, Romance

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Le cinéaste rassemble toutes les composantes de son cinéma, ses artifices, ses motifs, et les agence en un mélo chatoyant, une mosaïque de souvenirs, de fantasmes, de désirs, élaborant autour de l’amour et de ses mirages un labyrinthe sensoriel d’une superbe beauté plastique, baignée de langueur et de sensualité. Il signe le miroir inversé d’"In the Mood for Love", passant avec art toutes les fêtes et feintes du théâtre de la séduction, déclinant sa splendeur plaintive en une myriade de chagrins refoulés, de sentiments retenus, d’émotions enfouies, de fragrances enivrantes, un carrousel scintillant à l’érotique complexe et aux accents proustiens qui semble figurer la mémoire d’un séducteur hanté par ses regrets. Dans son exaspération formelle, la mise en crise de son dispositif, c’est sans doute un film terminal.
Top 10 Année 2004 :
http://lc.cx/UPe

The Grandmaster
6.4

The Grandmaster (2013)

Yi dai zong shi

2 h 10 min. Sortie : 17 avril 2013 (France). Arts martiaux, Action, Biopic

Film de Wong Kar-Wai

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

La collision du style suave et langoureux du réalisateur avec l’univers du kung-fu, dont il prétend ambitieusement mettre en lumière l’histoire et la philosophie, menace à tout instant de s’avérer fatale : le déséquilibre est patent, le récit troué d’ellipses un peu malheureuses. Mais c’est oublier que le grand styliste qui est derrière la caméra ne sacrifie rien de sa poétique chevaleresque sur l’autel de l’effet rétinien. À son terme, la fresque, ciselée avec amour et fertile en morceaux de choix (le splendide combat sur le quai de gare enneigé, à s’en manger les yeux), met la barre vers des eaux plus élégiaques, pour mieux s’achever dans un baquet rempli de peines réprimées et d’occasions manquées à la Wong Kar-wai. On se dit alors que le cinéaste est loin d’avoir perdu la main.

Thaddeus

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