Belle et Bête
4.9
Belle et Bête

livre de Marcela Iacub (2013)

Ouvrage très intrigant. D’abord, je suis agréablement surpris par le style, à la fois simple et précis, vif et percutant, élégant et vulgaire. Et puis surtout, l’auteure fait montre d’un humour rafraîchissant dans sa syntaxe comme dans son propos. C’est rare. Il y a un aspect iconoclaste, provocateur qui me plait bien. Même si sur le fond, cela ne l’est pas véritablement. Ses phrases sont parfois très courtes. Son discours peut être lapidaire. Et de fait, elle donne l’impression d’un long monologue, d’un discours, de quelque chose de parlé, de dit, sans que cela soit emphatique, ni déclamatoire. Son ambition de s’adresser à Dominique Strauss-Kahn est parfaitement concrétisée.


Au delà de la forme, est-ce que ce livre est vraiment intéressant, amène une réflexion profonde, de l’originalité? Je n’en suis pas convaincu.


Il est évident que Marcela Iacub aime écrire. A tel point qu’elle peut manier les idées, les retourner, dans tous les sens et dire le tout et son contraire, rien que pouvoir écrire ces manipulations. Elle jubile. Cette joie d’écrire se transmet au lecteur que je suis : j’ai aimé son plaisir à écrire. Pas sûr cependant que cela débouche sur autre chose que de l’agitation d’idée, de la provocation, de l’amour du mot et de la phrase.


La lecture est donc très agréable, le style léger, mais très précis sans être toutefois d’une beauté transcendante. En effet, à la longue, l’histoire qu’elle nous raconte perd en intérêt. L’impression qu’elle tourne en rond ou que son plaisir à réfléchir et à inventer des hypothèses analytiques, des histoires à raconter devient trop envahissant, se renforce rudement un peu avant la fin. Ce serait injuste de dire qu’on finit par s’ennuyer. Non, le texte est court, on n’a pas vraiment le temps de ressentir de l’ennui. L’incongruité de cette histoire et la façon non conventionnelle de son écriture étouffe l’ennui dans l’oeuf, selon moi.


Mais il est vrai qu’elle perd un peu le rythme sur la fin. Il y a un moment de stagnation, pendant lequel elle fait perdre à son récit toute l’intensité première, à force de masturbation intellectuelle ou pour dire cela de manière moins vulgaire à force de s’oublier dans l’abstraction.


Pas besoin de bien connaître l’histoire de Strauss-Kahn, on s’en fout. De la réflexion à laquelle elle livre sa propre aventure sentimentale et du regard qu’elle porte sur cet homme-cochon reste une proposition intellectuelle qui a pu paraître intéressante par instants. Philosophiquement parlant peut-être davantage. Difficile pour moi de noter cela pour tout l’ouvrage. Mais de ce peu, je suis tout étonné. Je m’attendais à un récit plus prosaïque, plus putassier. Au fond, je ne crois pas qu’il soit aussi vulgaire que je l’ai cru parfois. De cette aventure humaine difficile à comprendre, elle livre un récit vivant, drôle et fascinant quelquefois. Ce n’est déjà pas mal.

Alligator
6
Écrit par

Créée

le 25 août 2016

Critique lue 152 fois

Alligator

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