Ce n’est pas qu’une affaire de cheveux...

« D’abord vous devez imaginer le ciel (bleu et sans nuage, si cela peut aider), ou bien le noir irradiant de la nuit. Puis - et c’est le plus important - vous imaginer, vous, au milieu de ce ciel, flottant à mes côtés. En dessous de nous, le disque vert et bleu de la Terre ».
Augustown, quartier pauvre de Kingston. En cet après-midi d'avril 1982, Kaia rentre de l'école. Ma Taffy l'attend, assise sur sa véranda. La grand-mère n'y voit plus mais elle reconnaît entre toutes l'odeur entêtante, envahissante, de la calamité qui se prépare. Car aujourd'hui, à l'école, M. Saint-Josephs a commis l'irréparable : il a coupé les dreadlocks de Kaia - sacrilège absolu chez les rastafari. Et voilà Ma Taffy qui tremble, elle que pourtant rien n'ébranle, pas même le chef du gang Angola ni les descentes des Babylones, toutes sirènes hurlantes.
On dirait bien qu'à Augustown, Jamaïque, le jour de l'autoclapse - catastrophe aux promesses d'apocalypse - est une nouvelle fois en train d'advenir. Alors, pour gagner du temps sur la menace qui gronde, Ma Taffy raconte à Kaia comment elle a assisté, petite fille au milieu d'une foule immense, à la véritable ascension d'Alexander Bedward, le Prêcheur volant, un prédicateur jamaïcain qui voulait relever un peuple humilié et que les Britanniques ont enfermé dans un asile. Aussi, pour Ma Taffy, ce n’est pas « l’histoire d’un fou qui se met à croire qu’il peut voler comme ça (…) c’est juste une histoire comme tant d’autres… ».
Ken Miller nous plonge dans l’atmosphère de son île natale, la Jamaïque, parfois folklorique, merveilleuse, envoutante comme l’écriture de ce roman puissant. Les dialogues sont autant colorés que la couverture du livre, peu nombreux mais magnifiques.
J’ai adoré les noirs, les plus clairs, les pauvres et même certains blancs. Malgré la pauvreté et les souffrances il y a de la joie dans ces ghettos. Les rythmes et les chants de Bob Marley étaient présents dans mon esprit comme lorsqu’il rend hommage à la culture rastafari, comme le fait si bien Ken Miller dans « By the rivers of Babylon ».
Pendant toute la lecture la tension est présente, on attend le drame, imminent. La fin est douloureuse. J’ai refermé ce livre la gorge nouée.

DavidLebas
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 15 nov. 2017

Critique lue 427 fois

6 j'aime

2 commentaires

David Lebas

Écrit par

Critique lue 427 fois

6
2

D'autres avis sur By the rivers of Babylon

By the rivers of Babylon
YvesMabon
10

Critique de By the rivers of Babylon par Yv Pol

Foisonnant, puissant. Une bouffée d'air jamaïcain, pas toujours très sain, pas toujours empli de bonnes odeurs mais tellement revigorant. C'est d'abord une plongée dans le rastafarisme, avec ses...

le 29 sept. 2017

2 j'aime

By the rivers of Babylon
aaiiaao
7

Critique de By the rivers of Babylon par aaiiaao

Une plongée intrigante dans l’histoire contemporaine de la Jamaïque : par un savant mélange de fiction et d'anecdotes historiques, j'ai découvert des pans fascinants de cette culture qu'on caricature...

le 7 oct. 2020

1 j'aime

By the rivers of Babylon
bibliothequephemere
9

No woman no cry

Ou si lire c'est aussi voyager : plongée au coeur de le Jamaïque,ses histoires de croyances de cheveux, de construction d'un île et d'une société bicéphale où la violence est au cœur du ghetto. La...

le 4 nov. 2018

Du même critique

By the rivers of Babylon
DavidLebas
9

Ce n’est pas qu’une affaire de cheveux...

« D’abord vous devez imaginer le ciel (bleu et sans nuage, si cela peut aider), ou bien le noir irradiant de la nuit. Puis - et c’est le plus important - vous imaginer, vous, au milieu de ce...

le 15 nov. 2017

6 j'aime

2

Cinq matins de trop
DavidLebas
8

Une grande claque, violente.

Une grande claque, violente. Jeune instituteur planté au fin fond de l’Outback, un endroit paumé au coeur de l’Australie, John Grant doit passer la nuit à Bundanyabba avant de prendre l’avion pour...

le 20 oct. 2017

6 j'aime

12