Jonathan Coe nous avait déjà entraîné dans les coulisses de l'Expo 58 de Bruxelles avec son délectable roman éponyme. Au tour de Blaise Ndala d'évoquer cet événement majeur de l'après-guerre, avec un prisme très personnel, celui d'un écrivain né dans la République démocratique du Congo, qui après une formation supérieure en Belgique est devenu citoyen canadien. L'exposition universelle est un prétexte pour nous plonger dans l'histoire agitée du Congo, notamment pendant la période coloniale, sous le joug colonial de la Belgique. Dans le ventre du Congo est un livre exigeant, avec ses différents narrateurs et sa chronologie bouleversée mais point n'est besoin de boussole, l'auteur déploie parfaitement sa toile narrative et nous entraîne, d'une plume assurée, et parfois truculente, du Congo d'avant l'Indépendance à la Belgique du XXIe siècle, avec cette Expo 58 comme point nodal. Là même où un village africain reconstitué est censé montrer aux visiteurs la grandeur de l'entreprise coloniale belge et, concomitamment, la suprématie blanche. De la "chair à badauds" comme le décrit Blaise Ndala, avec les quolibets injurieux de quelques idiots de passage, histoire de montrer qui sont les maîtres. Ce même racisme que l'on retrouve près de 50 ans plus tard lorsque l'avant-centre congolais de l'équipe d'Anderlecht est traité de "singe" par des spectateurs d'un match de football. Au fil du temps, et même si l'époque des colonies est révolue, l'écrivain montre que les mentalités n'ont pas vraiment changé, hélas. Dans le ventre du Congo, roman sinueux et luxuriant, est riche en portraits d'hommes et de femmes qui font du respect et de la tolérance des valeurs infrangibles, clouant les fanatiques et les racistes au pilori. Le livre incite aussi à faire table rase du passé pour repartir sur des bases nouvelles même s'il ne cache rien des atrocités du passé. C'est tout son paradoxe et son intérêt dans un récit qui emporte par son esprit romanesque et historique où le légendaire Patrice Lumumba et Wendo Kolosoy, le roi de la rumba congolaise, font des apparitions remarquées.

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le 9 janv. 2021

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