Ce qui est du ressort de l’auteur, c’est la manière dont il va retranscrire la vie qu’il veut nous faire connaître. Selon les tempéraments et les ambitions, il pourra colorer son exposé d’un style, d’un point de vue, ou des deux. Jacques Attali, lui, ne fait ni l’un ni l’un ni l’autre. Ce qu’il semble appliquer à la rédaction de Diderot ou le bonheur de penser, c’est une méthode. Une méthode apprise durant ses études et probablement mise tant de fois en pratique dans ses fonctions de conseiller auprès de François Mitterand pour rédiger ce qu’il lui a apporté de plus précieux : ses notes de synthèse. Car la biographie qu’il nous propose n’est rien de plus que cela : une compilation de notes de synthèse thématiques, réalisée à partir de plus de 700 sources bibliographiques. Les conseils de rédactions que vous trouverez un peu partout ) destination des étudiants qui préparent l’ENA, devraient vous donner une idée très fidèle du résultat qu’il vous sera donné de lire. Un style parfaitement neutre, un effacement quasi complet de l’auteur, une synthèse objective des éléments clés du sujet. Autant de gages de qualité ? Malheureusement non car il s’agit bien d’un assemblage de dizaines de notes que l’on parle, et non d’un seule grande note organisée. Avec pour conséquence une dispersion considérable des idées, une redondance fréquente du propos, une narration chronologique (qui n’était pas obligatoire mais est le parti pris par l’auteur) malmenée et surtout une dramatique dilution des éléments clés. Car avec un tel système, un échange de lettres enflammées avec Sophie (l’une de ses nombreuses « maîtresses ») ou une dispute particulièrement houleuse avec son frère suscitent l’écriture d’une note aussi bien que la rupture définitive de Diderot d’avec Rousseau ou la révocation du privilège de l’Encyclopédie. Hors il me semble que ces événements, s’ils ont peut-être eu un retentissement similaire sur la vie de Denis, n’ont en aucun cas la même valeur pour la postérité de Diderot…
Dommage car la vie de cet illustre penseur mérite, en elle-même, largement le détour...
Samanuel
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le 19 mars 2013

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