Pelecanos produisant (au moins) un nouveau roman chaque année, sans parler de sa participation - notable et très "lisible" - à la grande série US, "The Wire", difficile d'éviter une certaine usure dans notre intérêt pour ses fictions déterministes et ultra-réalistes. "Drama City" est donc une nième visite guidée d'une société en pleine perdition, celle de la classe moyenne (et moins) noire de Washington. Victimes quasi-consentantes d'un destin qui ne leur réserve que la prison, la déchéance et la mort - violente -, les jeunes (ou moins jeunes) blacks des récits de Pelecanos sont l'illustration terminale d'une société qui s'est perdue dans le matérialisme le plus extrême, et en a oublié non seulement les fondements de la morale - refrain évident, voire un peu réactionnaire -, mais surtout le goût de l'amour de l'autre. "Drama City" tranche néanmoins dans l'œuvre désormais conséquente de Pelecanos, car il s'y lit en filigrane une profonde fatigue - au delà même du désespoir -, et la conscience résignée qu'il n'y a plus de lumière dans ce monde, hormis peut-être dans les yeux d'un chien fidèle. Ceci admis, Pelecanos n'a même plus besoin de condamner ses personnages à être broyés par la machine infernale de son histoire, mais, les faisant in extrémis échapper à une mort qui paraissait écrite à l'avance, il ne livre aucun happy end : la vie continue, et rien n'a changé. [Critique écrite en 2009]

EricDebarnot
7
Écrit par

Créée

le 18 sept. 2014

Critique lue 142 fois

4 j'aime

Eric BBYoda

Écrit par

Critique lue 142 fois

4

Du même critique

Les Misérables
EricDebarnot
7

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

le 29 nov. 2019

204 j'aime

150

1917
EricDebarnot
5

Le travelling de Kapo (slight return), et autres considérations...

Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...

le 15 janv. 2020

190 j'aime

104

Je veux juste en finir
EricDebarnot
9

Scènes de la Vie Familiale

Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...

le 15 sept. 2020

185 j'aime

25