On connaît quoi des maisons d’édition quand on est simple lecteur ? Leur catalogue tout au plus. Leurs collections et leurs auteurs phares. Peu de choses, du moins pour ma part. C’est bien dommage lorsqu’on sait qu’une infime minorité de maisons détient une grande majorité de la distribution. Pourquoi ? Comment un tel déséquilibre a-t-il été possible ? Ce livre nous donne les réponses.


Tout est compilé là-dedans, les magouilles, les déboires, les polémiques, les coups de com’, les stratégies de publication et les réussites bien sûr. Toutes les péripéties qui composent les dernières cinquante années de la vie éditoriale française sont racontées par Olivier Bessard-Banquy. Le livre démarre à l’après guerre et pose comme date charnière, celle de 1975, année de la première diffusion de l’émission Apostrophe de Bernard Pivot, comme coup d’envoi d’une nouvelle forme de médiatisation du livre qui nous mènera jusqu’au paysage actuel. Une Histoire récente donc, mais non moins dense.


On y lira les évolutions des grandes structures parisiennes avec leurs étonnantes valses des éditeurs qui passent d’une maison à une autre : une poignée de professionnels est passée par toutes les maisons (Fayard, Seuil, Grasset, Flammarion, Gallimard, etc.) On y apprendra par exemple que la famille Gallimard a failli faire tomber l’entreprise pour de simples question d’héritages, que l’éditeur Denis Roche a sauvé Seuil grâce à une nouvelle collection (Fiction &Cie) dans les années 70, par laquelle il fit découvrir Thomas Pynchon aux français, ou encore qu’à l’orée des années 2000, une opération de communication sans précédent imposa Michel Houellebecq aux lecteurs français.


Pourtant, n’allez pas croire qu’il s’agit d’une critique. Bessard-Banquy ne jette la pierre à personne. Les éditeurs n’y sont pas forcément critiqués. On lira par exemple un incroyable portrait de Jérôme Lindon, éditeur mythique de Minuit, qui contribua pleinement à la loi Lang et à la défense des petites maisons et des libraires. C’est un livre sur toutes les mains de cette industrie et sur toutes les évolutions qui, à coup de rachats de puissants groupes menèrent l’industrie du livre vers un modèle plus financier qu’artistique (par exemple le groupe Hachette, pour ne citer que lui, a une place quasi-monopolistique en tant que distributeur qui lui permet de racheter la moindre structure en difficulté).


Bref, un livre somme grâce auquel j’aurais appris beaucoup de choses. Et c’est peut-être son seul défaut : compiler trop d’informations et les noyer trop souvent dans des justifications chiffrées, alors que le propos aurait pu trouver là une meilleure forme.


Je recommande.

-Alive-
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le 13 sept. 2017

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