Un scénario de film sous forme de livre...

La curiosité nous pousse parfois à nous tourner vers des séries qui n’auraient jamais dû exister. Surfant sur la vague, Guillermo Del Toro – réalisateur dont j’aime au moins l’univers esthétique – a annoncé sa propre réinterprétation du mythe avec la volonté de prendre Twilight à contre-pied. Il y en avait assez de ces beaux gosses aux dents longues qui ne s’éveillent plus que pour traquer la pucelle, Del Toro s’est improvisé auteur pour mener sa mini révolution littéraire. Et, sur le papier, on peut dire que le programme était alléchant : vampires dégoûtants, retour aux sources du mythe, histoire sombre et apocalyptique… Pour un lecteur qui s’intéresse aux vampires dans leur version horrifique, il y avait de quoi se laisser tenter.
Mais on ne s’improvise pas auteur, surtout pour faire de l’ombre à une série sans qualité. Conscient de ne pas être très très doué, notre cher Guillermo a fait appel à un vrai écrivain de thriller : Chuk Hogan, aka l’écrivain-super-bon-que-personne-ne-connait. Nous pouvons nous demander pourquoi s’adresser à un inconnu sans talent manifeste lorsqu’on a la notoriété de Del Toro… Le gros mexicain aux lunettes rondes aurait-il fait fuir les plus grands en faisant le résumé de son idée ? « Alors tu vois je vais écrire une série qui sera un mixe de Bram Stoker et Romero pour montrer aux gens que Twilight c’est trop nul ! ». Oui. Il est aisé d’imaginer le désarroi de Stephen King face à un scénario aussi osé.
Ainsi, pauvres lecteurs que nous sommes, nous nous retrouvons avec, entre les mains, un thriller fantastique aussi creux que peut l’être la lecture d’un scénario de film américain un peu bateau. Tous les ingrédients sont là pour faire baver un spectateur peu exigent au cinéma. Et… et ce sera tout. Pourquoi ne pas en avoir fait un film directement ? Del Toro a peut-être rêvé d’un succès aussi grand que celui de Stéphanie Meyer. Mais notre ami s’est un peu raté en oubliant que le public qui n’apprécie pas les romances de vampires à deux sous sera tout autant contrarié par un livre qui sera le concentré des clichés du genre opposé.

La Lignée avait tout de même quelques arguments séduisants. Un avion se pose sur la piste d’un aéroport et il s’avère que les gens à l’intérieur sont tous morts, foudroyés par un virus étrange et non identifié (Romero, un commentaire ?). En fouillant un peu, les chercheurs découvrent aussi un cercueil rempli de terre, car oui, en 2009 Dracula est un vampire moderne. Le bateau, c’est dépassé. Et quel intérêt d’aller envahir la Grande-Bretagne lorsqu’on peut débarquer à New-York pour créer un film à sensation, je vous le demande ! Evidemment, nous découvrons très vite que les morts étaient en fait vivants (horreur !) et les vilains se sauvent de la morgue pour aller faire un petit coucou aux humains.
Si le style est très plat, le scénario se défend un peu en donnant au lecteur une vision plutôt originale des vampires. Les créatures de la nuit attaquent avec leur langue, ont l’intelligence d’un zombie vaguement évolué et envahissent le corps de leurs victimes pour les transformer avec les vers blancs tous frétillants qui se trouvent dans leur sang. Pas de doute, nous sommes bien quelque part dans la tête de Del Toro. Mais ensuite ? Ensuite ça ne ressemble qu’à un mauvais livre de zombie en fait. La tension ne monte pas un seul instant, et on poursuit moins la lecture pour la terreur qu’elle nous inspire que pour chercher quelques révélations intéressantes sur les vampires. Autant le dire tout de suite, il n’y en aura pas.
Barbelo
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le 24 août 2012

Modifiée

le 25 août 2012

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