Quand on lit le titre de La littérature oubliée du socialisme on s'attend à trouver de larges extraits de textes socialistes peu connus qui révéleraient la doctrine socialiste sous un jour nouveau. Il y a un peu tromperie sur la marchandise et il y a un décalage entre les prétentions affichées par l'auteur et le contenu réel du livre. D'abord il ne comporte pas autant de citations de textes socialistes qu'on s'attendrait à en trouver. Ensuite George Watson fait plutôt référence d'une part à des textes critiques sur le socialisme qui ont été oubliés (Par exemple Histoire du communisme d'Alfred Sudre, Democracy versus Socialism de Max Hirsch, De la propriété d'Adolphe Thiers...je trouve d'ailleurs que Bastiat manque cruellement.) et d'autre part à des citations ou des fragments d'auteurs socialistes qui révèlent d'après lui sa thèse, à savoir que le socialisme, loin d'être une doctrine de gauche, subversive, progressiste, humaniste, est fondamentalement une idéologie conservatrice voir réactionnaire, religieuse et autoritaire, plutôt de droite en définitive. (Une idée que ne renierait pas aujourd'hui un Michéa.) Le tout est mis dans la perspective des événements historiques.
Je suis plutôt d'accord avec la thèse de Watson — pas vraiment grâce à lui — et par ailleurs je trouve qu'il y a pas mal de matière intéressante dans le livre, mais celui-ci me semble tout de même assez mal construit. Il manque une articulation logique et des développements conséquents. On voit un certain nombre de thèses esquissées, mais pas assez développés et pas toujours suffisamment sourcées, argumentées ou illustrées. Heureusement il y a une bibliographie conséquente. Si l'ouvrage fourmille d'éléments éparses fort intéressants, sa construction est néanmoins très bizarre. Par exemple on passe d'un sujet à un autre sans cohérence, comme lorsqu'on passe d'un chapitre sur Tocqueville — qui parle peu de Tocqueville en vérité — à un chapitre sur "les socialistes de 1848" où on parle plutôt des critiques du socialisme comme Sudre et Thiers à un chapitre sur Hitler, puis sur Marx, puis sur Orwell... Franchement, on comprend mal la logique, elle n'est jamais vraiment explicitée et les sujets choisis et leur articulation est, je me répète, loin d'être claire.
En tout cas le livre est très court, donc à la limite on a pas grand chose à perdre le lire, et il y a toujours quelques informations à prendre. Je conseillerais quand même plutôt La Grande Parade de Jean-François Revel, qui reprend nombre des meilleurs éléments de La littérature oubliée du socialisme et bien plus.