La Saga Maeght, c'est deux livres diamétralement opposés inscrits l'un dans l'autre.
L'un comptant avec passion l'histoire d'Aimé Maeght, le grand homme créateur de la Fondation Maeght ainsi que son influence dantesque dans le monde de l'Art du XXe.
L'autre comptant avec acidité les déboires familiaux qui ont suivi la mort de « Papy » Aimé.


Les deux parties de ce livre traitent, certes, du même thème, à savoir de la famille Maeght, mais créent un profond malaise sur le lectorat. Du moins dans mon cas.
On plonge avec avidité dans l'énorme flashback sur « Papy » , conté avec passion et admiration par une Yoyo Maeght plus qu'inscrite dans l'histoire de l'art moderne. Des pans de vie presque inconcevables sont ici décrits avec ferveur. On côtoie un nombre incalculable d'artistes qui ont fait le XXe siècle (Miro, Braque, Bonnard, Giacometti, Matisse, Chagall, Léger et j'en passe), on est à leur côté, du moins par l'intermédiaire du passionné Aimé et on rêve.
Car c'est là la force de la première partie : le surréalisme de la vie de cet homme. Une famille entourée de génies. La senteur du sud-est de la France, les grillons, la peinture, la folie. Il a donné, il a reçu, il a su prendre des risques, il a construit quelque chose de gigantesque et accueilli les plus grands. Véritablement passionnant, surtout pour son rapport avec autrui, son altruisme incroyable et son don pour « voir » l'artiste.
La Saga Maeght mérite d'être lu pour cela. Une autobiographie (biographie pour certaines parties) réussie et passionnée sur un grand homme (sans oublier sa femme) de l'Art.


Et puis on passe au règlement de compte. Trente années, celles de Yoyo, décrites rapidement et surtout, énumérant les failles et les erreurs de la gestion de la Fondation (et tout ce qui en découle) jusqu'à nos jours. Un père et une sœur horribles, arrivistes et aveugles.
On passe d'un univers rayonnant, ensoleillé et presque onirique à un monde juridique, vicieux et noir. Contraste étonnant et surtout mal amené. Le ton change, bien que l'on sente le désir de toujours prendre avec recul les faits, mais les actes sont là : Yoyo dénonce.
Je ne décrirai pas trop cette partie. Si elle a le mérite de mettre au clair l'état actuel de la famille, mon attrait pour ce livre n'était – à la base – que pour la magie que dégage les Maeght et leur univers. J'ai pu lire une belle partie sur cette famille hors-normes mais ce qui dépasse l'art m'est désagréable. Il y en a trop. On ressent un profond malaise à lire cette partie, comme si ce n'était qu'une simple justification pour se dédouaner et redorer son image. Plus de finesse, plus de recul sur le texte aurait été bienvenu.


Ce qui nous amène à la forme réelle du livre, relativement déplaisante.
Yoyo tombe trop souvent dans la surenchère, dans la répétition et l'énumération . Il n'est pas rare de lire une page de 45 lignes où une vingtaine sont employées à citer le nom de différents artistes. Plaisant car incroyable au départ, cela devient vite lassant et ternit considérablement l'œuvre.
Rajoutons à cela des fins de chapitre – à l'image de la fin du livre – abruptes et mal pensées. Des transitions inexistantes et plus simplement, un manque de finesse global assez flagrant. Dommage.


J'ai appris sur Aimé, j'ai appris sur les Maeght et sur la manière de « gérer » son entourage. J'envie Yoyo d'avoir connu une telle enfance et une telle richesse culturelle. Mais j'aurais voulu rêver un peu plus près de Saint-Paul-de-Vence aux côtés de Miro et Braque.

imiduno
5
Écrit par

Créée

le 27 oct. 2014

Critique lue 1.7K fois

imiduno

Écrit par

Critique lue 1.7K fois

Du même critique

Journey
imiduno
10

Ce soir j'ai trouvé un compagnon.

Ce soir je me suis assis dans le canapé. J'ai pris une manette dans les mains. Je me suis retrouvé dans le désert, perdu. Un compagnon est alors apparu. Un parfait inconnu. Nous avons marché...

le 14 mars 2012

97 j'aime

7

Detroit: Become Human
imiduno
8

Critique de Detroit: Become Human par imiduno

Sceptique, je l'étais. Et pas qu'un peu. On regarde toujours les petits ovnis de Quantic Dreams d'un coin de l'œil en se demandant ce que ça vaut et si, invariablement, on finira encore déçu. Et si...

le 19 sept. 2018

37 j'aime

4

Batman: Arkham Origins
imiduno
7

Excellent jeu. Mais non.

Postulat initial : Origins est une copie de City. Argument : City est un bon jeu. Corollaire : Origins est un bon jeu. Constat final : Oui mais non. Batman : Arkham...

le 21 juil. 2014

28 j'aime