« Quelque chose me dit que Cecil n'est pas la crème de la crème des psychologues. Déjà, il est gratuit. (…) Son bureau est minuscule et encombré, avec des meubles bas de gamme, abîmés et tâchés. Et puis, on dirait qu'il n'a pas pu se payer de vêtements neufs depuis 1969. nous n'avons pas encore parlé de ÇA. Il essaie de m'y amener l'air de rien. Il me pose des questions orientées. Mais quand il le fait, je prends ma voix de robot pour lui répondre. « Je-ne-sais-pas. De-quoi-vous-parlez. Espèce-d'humanoïde. » » page 6

Avec cet extrait choisi pour a quatrième de couv', on découvre un peu tous les pendants de ce formidable roman pour ados : l'humour du narrateur (indispensable depuis la tripotée de journaux intimes du genre qui envahissent, pour mon plus grand plaisir je dois l'avouer, les rayons jeunesse depuis quelques années), le côté sombre de l'histoire porté par le mystérieux « ÇA ». Ce suspense court sur une bonne partie du livre car, vous vous en doutez, Henry n'est résolument pas prêt à parler de l'histoire de son frère Jesse, ni de celle de sa mère.

Quelques détails sont distillés au fur et à mesure de ce journal malgré lui d'un ado mal dans sa peau à cause de ÇA, à cause des bourrelets qui lui collent à la peau depuis, de l'inévitable déménagement sans sa mère, de ses nouveaux voisins (un Indien un peu trop gentil, un peu trop présent et qui pue un peu trop le curry et une blondasse qui tente un peu trop de mettre le grappin sur son père), à cause du nouveau collège bien entendu (comme tout ado mal dans sa peau qui se respecte) où un espèce d'énergumène que tout le monde rejette s'est mis en tête de devenir son meilleur ami et où une fille un peu bizarre et à l'ouest lui fait tourner la tête (mais ça, bien sûr, il ne veut pas l'avouer), et enfin à cause des fameuses séances avec un psy qui porte des chaussettes trouées.

Henry a de quoi noircir les pages du cahier offert par son psy, celui-là même qu'il avait bien entendu jeté à la poubelle aussitôt arrivé chez lui, et qu'il avait récupéré juste pour écrire qu'il «était hors de question qu'il écrive quoi que ce soit d'autre dedans ».

S'il ne parvient pas à honorer sa promesse, il parvient toutefois à nous tenir en haleine entre ce qu'il appelle ses « furies », son mal-être ambiant, ses souvenirs sur son frère, ses quelques brins d'espoirs, les matches de catch dont il est fan et un paquet de situations comiques. L'humour est au rendez-vous pour ne pas nous faire broyer du noir à notre tour et ce Journal malgré lui est complètement réussi : on s'attache à ce rouquin grassouillet fan de catch comme on s'attache au grand écervelé Maxime Mainard, fan de rock et associal, de Comment (bien) rater ses vacances. Un super roman ado qui prouve une fois de plus le talent des éditeurs d'Hélium.
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le 22 août 2013

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