Jacques Bainville, collaborateur de Maurras à l’Action Française, très connu pour son histoire de France, les biographies de Napoléon ou Bismarck s’est souvent intéressées à l’Allemagne et bien entendu à la France.


Dans ce livre il nous permet de compléter et de rectifier la vue de Keynes qui avait sorti un livre un an plus tôt sur les conséquences économiques de la paix. Bainville met en doute la comptabilité établie par Keynes et considère que l’économie passe derrière la politique, cela rejoint la célèbre maxime de Maurras « Politique d’abord ! ».


Ce qu’il voit c’est que les vainqueurs ont fait la même erreur que Napoléon, ils ont pensé que désarmer l’Allemagne permettrait de la garder dans ses frontières, terrible erreur qui se matérialisera quelques années plus tard sous la personne d’Hitler.


Le traité de Versailles a resserré 60 millions d’âmes autour d’une Allemagne fédérale unifiée. A l’instar des Prussiens d’après leur défaite contre Napoléon, les Allemands feront tout pour contourner les contraintes. Le traité est un catalyseur qui leur permettra de reprendre des forces tout en maudissant les noms des pays signataires du traité.


On comprend pourquoi il a été ressenti comme une humiliation. A la lecture de Bainville, nous pourrions considérer le traité de Versailles comme la dernière étape à l’unification allemande. Il permit en plus de l’abdication de Guillaume II, chose positive pour les Français, l’abdication des autres Rois et Princes allemands qui permettait un centralisme très inquiétant, que les alliés avaient précipité. Et ce traité a en plus de cela mis aux frontières allemandes des populations germanophones d’Autriche et de Tchécoslovaquie, préparant le terrain pour des annexions à venir.


Le traité laisse d’ailleurs une grande Allemagne entourée de myriade de petits Etats tels que la Pologne, l’Autriche, la Tchécoslovaquie, la Hongrie. Il méprise le traité et les personnes qui l’ont conçu, « ce n’est pas un traité politique » dit-il, ils organisent la guerre éternelle, à venir. Et ce traité pose encore une fois la France et l’Allemagne comme antagonistes, bien que nous fussions à l’époque des Allemagnes, alliée. En effet, à l’époque des principautés, la France s’était alliée à des Etats du SERG, nous avons même eu un Maréchal de Saxe qui combattait pour la France avec des troupes germaniques.


Ce qui gêne aussi Bainville c’est qu’on laisse à des Etats nouvellement formés, sans bureaucratie, sans histoire avec des peuples multiples, l’idée qu’ils pourront s’organiser autour d’une démocratie. Or la démocratie est un régime qui s’est imposé à des Etats occidentaux déjà vieux, avec une histoire millénaire, avec une colonne dorsale, une structure. Il paraît improbable qu’un régime se fondant sur la lutte de partie politique puisse être stable et durer dans le temps.


Et il eut raison, en Autriche nous eûmes Dolfuss, la Tchécoslovaquie fut dépecée, la Yougoslavie devint une monarchie absolue en 1929. Ce qu’il tente de montrer c’est que la démocratie ne peut pas s’appliquer à des pays nouvelles constitués, il faut un cadre solide pour redresser le pays et créer une unité.


C’est tout de même curieux que les instigateurs du traité de Versailles aient « balkanisé » toute l’Europe et L’Asie Mineure alors qu’ils n’ont pas voulu démanteler l’ogre allemand. Il laisse, ce traité, une myriade de petits Etats inoffensifs entre la jeune République centralisatrice de Weimar et celle des Soviets. Ils flouèrent aussi leurs alliés italiens qui se retrouva avec un ennemi à ses portes qui ne pensait qu’à le combattre, ou plutôt 3 nations en une, la Yougoslavie.


Il voyait déjà un mouvement allemand qui aurait tenté de réintégrer l’Autriche parmi la population germanophone. Certains Allemands avaient créé des troupes paramilitaires et s’étaient fait voir dans le Tyrol, montrant que certaines régions d’Autriche étaient prêtes pour l’Anschluss. C’est ce qu’il appelle « l’alerte de 1920 », car les Allemands seront toujours enclins au militarisme et le fait de leur laisser une armée pour l’Allemagne, et non pas par principautés, l’a conforté dans l’idée que c’est toujours la Prusse qui dominait en 1920. Prusse qui s’est illustrée par ses habitudes guerrières, héritées des chevaliers teutoniques. Et il voyait déjà l’esquisse du futur pacte que nous appelons « Molotov-Ribbentrop » qui découpa la Pologne, car, enseignements de l’histoire, les Prussiens avaient déjà dépecé cette dernière avec l’Empire des Tsars lors d’un banquet sanglant.


Ce livre est surtout le constat que tout les changements occasionnés depuis 1850 environ, et avec notre bénédiction, n’ont été que mauvais pour la France. Nous sommes sortis de la guerre, seuls, sans alliés sérieux Belgique mis à part pour pouvoir contenir l’Allemagne, avec une Italie vexée. C’est une sorte de retour en 1815. Nous avons été seuls à défendre la Pologne face aux soviets avec l’aide du général Weygand en 1920.


Je conclurais par cette phrase :

Sa doctrine (celle de la France) fondée sur l’expérience est qu’il n’y a pas de repos ni de sécurité en Europe si l’Allemagne reste forte, et rien n’empêchera qu’elle redevienne forte tant qu’elle sera unie et centralisée.
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le 24 juil. 2023

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