ce n’est pas une simple intrigue, c’est un roman sociétal

Vous pourriez imaginer mille choses à travers le titre, pourtant aucune ne sera celle à laquelle vous penserez. Vous pourriez imaginer une intrigue sur la cause animale, pourtant, même s’il est question d’animalité, ce n’est pas celle à laquelle vous penserez. Vous pourriez imaginer que l’auteure souhaite parler de ces animaux en voie d’extinction, pourtant même s’il est question de bestialité, ce n’est pas celle à laquelle vous penserez…


Manger Bambi, quel drôle de titre que cette référence à l’enfance avec le dessin animé éponyme, pourtant ici point de contes à la clé, sauf un conte des temps modernes où l’horreur côtoie l’enfance, l’adolescence. Un parallèle avec la perte de l’innocence et de ces illusions enfantines.


Bambi à l’aube de ses quinze ans a déjà tout du monstre… Bambi mord avant de l’être, elle s’est construit dans un rôle lui permettant de prendre sa revanche. Ce qu’elle veut c’est du pognon pour s’en sortir. A la tête d’un trio d’ado toutes aussi perdues qu’elle, elle se sert d’un site de sugardating, sur lequel ces messieurs, bien plus âgés, cherchent de la chair fraîche… Elle monte des traquenards, dignes des plus grands bandits, elle emprunte les codes des mecs pour se faire sa place.


On pense à tort que la violence est réservée aux garçons, or, lorsqu’elle est utilisée par les filles, elle est aussi virulente, si ce n’est plus. Comme si elles devaient prouver qu’elles sont capables d’être violentes. Ce qui est horrible dans ce livre ce n’est pas tant la violence, mais c’est le détachement avec lequel Bambi en use. Même ses copines ont du mal à la comprendre, ne comprennent pas dans quoi elle les entraîne. Sauf que Bambi, ne lutte pas seulement contre la société qui l’enferme dans sa misère, alors que d’autres ont tout, mais lutte surtout contre elle-même est ses démons.


Ce qu’elle n’a pas, elle le prend de force et prendre par la force lui donne un sentiment de puissance qui l’exalte. Pourtant, elle va se brûler les ailes et toute cette violence qui l’exalte et la broie de l’intérieur, va la consumer.


Ce n’est pas une simple histoire, c’est une histoire qui prend aux tripes, ce n’est pas une simple intrigue, c’est un roman sociétal qui pointe les dysfonctionnements de notre société moderne. C’est un roman sur la lutte des classes, sur la pauvreté et ce qu’elle peut engendrer. C’est l’histoire de la violence sous toutes ses formes et dans ce qu’elle a de plus abject. C’est l’histoire de toutes les Bambi dont la violence est le reflet d’un mal-être d’une grande profondeur. C’est l’enfance bafouée, l’absence de parents, c’est la violence comme héritage familial.


https://julitlesmots.com/2021/05/20/manger-bambi-de-caroline-de-mulder/

Ju-lit-les-mots
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le 25 juin 2021

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