Quinzinzinzili
7.6
Quinzinzinzili

livre de Régis Messac (1935)

Publié en 1935 durant l’entre-deux guerres par Regis Messac, ce roman post-apocalyptique anticipe la Seconde Guerre Mondiale et plonge le lecteur dans un univers de chaos où seuls un homme et une bande d’enfants ont survécu à l’holocauste qui décima l’Humanité en trouvant refuge dans une grotte. De prime abord, ce qui est intéressant avec ce postulat c’est que l’auteur a réussi à extrapoler le contexte géopolitique tendu des années 30 pour esquisser les contours du conflit 39-45.


En effet, si on fait abstraction du rôle de la Chine, Regis Messac cerne parfaitement le jeu des alliances et va même plus loin en mettant la bombe A au centre des débats. Mais pas la bombe Atomique, la bombe Amusante qui supprimait l’oxygène de l’atmosphère et figeait un sourire sur le visage de ses victimes. Lorsque la première bombe tomba, tous les pays du monde répliquèrent et s’entretuèrent. L’Humanité fut anéantie en l’espace de quelques jours.


Le récit nous est conté à travers le journal intime de Gérard Dumaurier qui, usé, cynique et désabusé, nous transmet ses observations sur la dizaine de gamins pré-pubères qui représentent le renouveau de l’Humanité. Le narrateur sait que son monde n’est plus et constate avec dépit et amertume que la nouvelle société humaine est revenue à ses fondamentaux primaires. Les gosses ont tout oublié et perdu ; de la logique au langage, en passant par la culture ou tout simplement encore les valeurs comme l’amour et l’amitié.


C’est là tout le sel de Qinzinzinzili ; constater comment cette nouvelle société primitive et sauvage va s’organiser. Ainsi, on assiste au renouveau du langage, à l’apparition d’une nouvelle géométrie, aux balbutiements d’un culte religieux tout-puissant, ou encore à une hiérarchie barbare fondée sur la violence et la cruauté. En cela le propos est très proche de celui de Sa Majesté des Mouches puisque comme dans le roman de W. Golding, ce sont des enfants qui ont la charge de bâtir un nouveau monde doté de règles et de codes qui leur sont propres.


Mais si Sa Majesté des Mouches nous gratifiait de moments poignants ou de tension, ainsi que d’un environnement dépaysant et propice à l’évasion, Quinzinzinzili privilégie les cartes de la sobriété et de la simplicité n’aidant pas à rendre hommage à un univers post apo’ digne de ce nom. Pire, la régression psychologique des enfants fait, pour moi, office de point négatif car je la trouve complètement disproportionnée.


Certes le livre est court et le fait que les jeunes survivants sombrent rapidement tend à fluidifier un récit déjà bien rythmé mais une telle déchéance de l’intellect est surréaliste. La société en perdition de ses valeurs décrite par Régis Messac est cohérente – voire même prémonitoire diront les plus blasés du fond – mais le tout est mal amené, et a fortiori trop rapidement. Reste qu’on prend malgré tout plaisir à boire les paroles du narrateur qui font office de miroir aux pensées et (dés)espérances de l’auteur.


Quinzinzinzili est donc un roman d’anticipation original et, par certains aspects, précurseur. C’est une lecture agréable et fluide qui ravira probablement plus les lecteurs friands de fiction que ceux cherchant de la science fiction.


(Merci à M_le_Maudit pour la recommandation)

MarlBourreau
7
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le 27 mars 2016

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MarlBourreau

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