"The movement" est plus ou moins un produit dérivé de "Nathan for you", la série la plus drôle, originale et hallucinante que j’aie vu. Le principe : Nathan Fielder, pseudo expert en marketing, donne des conseils complètement farfelus à de vrais commerçants pour booster leur business. Et dans le 3ème épisode de la saison 3, Nathan a l’idée de trouver gratuitement des employés pour une société de déménagement, un inventant un faux programme de fitness nommé The movement, qui consiste à se muscler en déplaçant du mobilier… Il est allé jusqu’à engager comme porte-paroles un bodybuilder supposément devenu musclé grâce à ce programme qu’il aurait inventé, qu’il présente dans une autobiographie en réalité écrite par un ghost-writer.
Le livre a vraiment été commercialisé, et en tant que fan de la série et grand amateur de conneries, j’ai poussé le vice jusqu’à l’acheter…

C’est assez dingue de penser que des gens aient pu croire que ce bouquin était réel tant il est trollesque ; déjà au verso on voit une image du faux auteur, Jack Garbarino, avant sa métamorphose : en fait la photo d’un type obèse qui ne lui ressemble en rien. Mais en même temps, des gens ont gobé des mensonges beaucoup plus gros dans la série…
J'ignore quelle a été l’influence de Nathan Fielder sur l’écriture du livre, s’il y en a eu une, car la série laisse croire que Fielder a reçu le livre tel quel et l’a laissé ainsi.
Mais je me demande s’il n’est pas responsable des schémas complètement moches gribouillés sur Paint, censés illustrer les exercices de fitness.
La biographie fait 150 pages, et aurait été rédigée sans que le véritable auteur, Austin Bowers (ce n’est même pas un pseudo), n’ait d’infos sur Jack Garbarino, le prétendu créateur de The movement. Donc il a dû broder à partir du peu qu’il savait et inventer toute une vie.

Il y a quelques détails qui donnent du relief aux personnages et un semblant de vécu, c’est vraisemblablement des éléments tirés de la vie du ghost-writer, qui disait avoir connu Steve Jobs notamment, qui se retrouve dans le bouquin.
Mais l’impression générale lors de la lecture, c’est que ça a été écrit à la va-vite, sans trop y réfléchir, et sans se relire.
Non seulement parce que The movement est bourré de fautes de frappe non corrigées et de formulations très maladroites dignes d’un brouillon, mais aussi parce que le récit traîne trop souvent sur des détails sans importance qui ne servent qu’à meubler.
Et pourtant, dans l’épisode de Nathan for you, Bowers donne un aperçu d’un certain talent en improvisant une description littéraire.
Mais dans The movement, il fait preuve d’une vision des choses déconcertante : il y a beaucoup de situations pas naturelles ni logiques, un peu absurdes, mais pas assez pour être comiques. Juste de quoi déstabiliser le lecteur. Par exemple, la mère de Steve Jobs fait part à Jack de ses inquiétudes sur son alimentation en l’emmenant au McDo ; un guide de musée lui délivre un speech déterminant au bout de 10mn de visite d’une expo ; Jack ne connaît pas la différence entre un cercle et un losange, et a des expériences de hors-corps à chaque fois qu’il s’endort pendant un voyage…
Il n’y a que quelques passages qui sont involontairement drôles, et Nathan en avait déjà partagés sur Twitter. Même la romance avec la fana de fitness, alors que Jack est encore d’une obésité morbide, n’est pas si comique… juste déconcertante tant elle est forcée et sort de nulle part.

Et tout du long du livre, bien avant que Jack ne les rencontre, il fait de nombreuses allusions aux "jungle children", comme si c’était un terme tout à fait ordinaire qu’on emploie au quotidien.
Je ne sais pas pourquoi le vrai Jack Garbarino raconte dans ses interviews télévisées que Dende, un de ces enfants de la jungle qu’il a aidé avec une association bénévole, a été enlevé et mangé par des babouins… dans le livre, c’est un code pour parler d’une cellule terroriste qui tue ce gamin. C’est pas aussi con, mais quand même…

Par ailleurs le titre du livre et les propos de Garbarino dans les interviews sont mensongers : on raconte dans la biographie qu’il allait à la salle de gym pendant un an, ce qui n’aurait rien changé à son poids et l’a juste ruiné financièrement. Ce con n’a même pas pensé à trouver un boulot avant d’être fauché…
Et on tente de nous faire croire que la physionomie du bonhomme n’a pas changé, jusqu’à ce qu’il rejoigne une compagnie de déménagement, à la fin de sa quarantaine.
C’est totalement absurde, mais même si on lit The movement pour se gausser, c’est à peine drôle. J’ai d’ailleurs passé l’avant-dernier chapitre (le seul où l’on parle vraiment du concept de fitness de Garbarino en fait !) tant ça a fini par m’ennuyer.

Fry3000
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le 12 août 2022

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