Un canevas ambitieux gâché par la médiocrité des intrigues psychologiques

Le roman est articulé en 13 nouvelles. La 5° et la 9°, "Continents océaniques" et "L'âge des grands progrès" (200 pages) sont excellentes. Les 11 autres (800 pages) sont médiocres. Elles ont été produites avec 4 procédés :


1 - un personnage est un expert dans un domaine. On lui pose une question technique. Il répond en parlant non-stop pendant 5 à 10 pages.


2 - un personnage raconte à un autre les événements que le lecteur a manqué. Le personnage parle non-stop pendant 5 à 10 pages.


3 - des interludes de 5 à 10 pages entre les nouvelles. Dans ces interludes, les personnages décédés commentent leurs actions comme des joueurs de football dans les vestiaires après le match. Ces discussions/disputes ont lieu dans le Bardo, un lieu de passage des âmes où, selon certaines croyances bouddhistes, les défunts transitent avant de se réincarner sur Terre. A leur insu, les trois personnages principaux de chaque nouvelle sont les réincarnations successives de trois mêmes âmes. Le procédé n'apporte rien au récit et devient vite lassant. C'est un cache misère de fix-up.


4 - Chaque nouvelle contient plein de pages de condensés factuels vides d'émotions. Politique, économie etc. (Exception faite des excellentes nouvelles 5 et 9). Zéro empathie avec un personnage.


Le produit de ces 4 procédés n'est pas seulement inintéressant, il implique que, pendant ce temps, les personnages n'évoluent pas. Résultat : dans la plupart des nouvelles, les personnages sont inchangés à la fin du récit. Même personnalité, même situation financière, mêmes connaissances, mêmes ambitions. Parfois, il y a eu des changements autour d'eux (voyages, guerre, catastrophe naturelle etc.) mais eux n'ont pas évolué. Difficile de s'attacher à leur destin.


Bilan 1000 pages dont 800 ennuyeuses. C'est dommage. Robinson avait la matière d'une uchronie ambitieuse, une Histoire remaniée sur six siècles à partir de 1405, des aperçus géopolitiques plausibles. L'évolution des sciences et des religions, la naissance de grands empires, une guerre mondiale. Une grande force de dépaysement avec d'anciennes coutumes musulmanes, indiennes, chinoises. Des voyages (découverte de l'Amérique par des chinois en 1652, conquête de l'Arabie Saoudite par l'Inde etc.). Hélas, tout cela n'est rien sans l'adhésion du lecteur à un personnage prenant et attachant. Robinson ne sait visiblement pas écrire un bon personnage. Mais ça, on le savait déjà.

theyoubot
1
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste TOP 25 des Plus Mauvais Livres de Ma Vie

Créée

le 1 déc. 2020

Critique lue 82 fois

theyoubot

Écrit par

Critique lue 82 fois

D'autres avis sur Chroniques des années noires

Chroniques des années noires
Nanash
6

Critique de Chroniques des années noires par Nanash

Uchronie, le mot "qui-fait-bien" pour décrire une fiction qui se base sur un fait historique altéré, "Chroniques des années noires" en est une. Le principe est simple, si l'Europe occidentale s'était...

le 23 juil. 2012

7 j'aime

Chroniques des années noires
-Twist-
3

Critique de Chroniques des années noires par -Twist-

Pitch : Et si vers 1400, quand la peste décima l'Europe, ce n'était pas 1/4 de la population européenne qui succombait à la maladie, mais 99% de celle-ci ? Que ce serait-il passé ? La Chine et le...

le 9 mars 2016

5 j'aime

1

Chroniques des années noires
nostromo
8

Le monde sans nous...

Extraordinaire uchronie que nous concocte ici Kim Stanley Robinson, qui va nous faire traverser des siècles d'une Histoire ... sans nous. La Grande Peste du XIV° siècle ne se contente pas ici de...

le 30 avr. 2015

4 j'aime

2

Du même critique