Merci à PierreAmo pour la suggestion

Dans son bouquin, Michael Porter énonce un ensemble de principes destinés à rendre une entreprise compétitive. Il préconise, bien sûr, de réduire les coûts de production mais aussi d'attaquer la concurrence par son flanc le plus vulnérable, d'innover, d'optimiser sa fiscalité et j'en passe.

En revanche, Michael Porte n'a pas d'avis sur l'intérêt réel du produit fabriqué ou du service proposé. Il suffit que l'article se vende.

Vendre n'est donc plus un moyen d'écouler une production mais une fin en soit, en fait, le seul objectif intéressant aux yeux de l'expert en stratégie.

Rien de très nouveau, mais un résumé édifiant de ce qu'il faut faire pour asservir l'être humain, que ce soit par le travail ou par la consommation et contribuer efficacement à l'anéantissement de la planète.

Le bon commerce selon Robin des toits :

Pierre possède un atelier de fabrication de chaussures, hérité de son père. Il y a travaillé en qualité d'apprenti, puis d'ouvrier, avant d'en prendre la direction. Trois critères entrent en compte dans la fabrication de ses chaussures, par ordre d'importance :

- La solidité ;

- Le confort ;

- L'esthétique.

Par ailleurs les principes suivants le guident dans son entreprise :

- travailler dans les règles de l'art ;

- s'approvisionner auprès de fournisseurs connus et fiables ;

- vendre à des clients solvables et honnêtes ;

- ne jamais gâcher la marchandise ;

- récompenser les bons ouvriers en partageant une partie de ses bénéfices ;

- toujours payer ce qu'il doit, que ce soit à des fournisseurs ou à l’État.

Pierre souhaite que ses chaussures durent longtemps et protègent efficacement les pieds de leur acquéreur. Il ne redoute rien de plus que de voir revenir un client mécontent, client qui est par ailleurs certainement un ami ou au moins une connaissance, puisque sa zone de chalandise se limite à son village et ses alentours. Pierre achète l'essentiel de sa matière première aux éleveurs de la région. Le cordonnier n'est pas rétif à la nouveauté ni à l'innovation technique, à condition qu'elles ne remettent pas en cause les principes énoncés plus haut.

Pierre vendra des chaussures pendant trente-cinq ans, après quoi, il devra fermer boutique, condamné par une concurrence impitoyable.

Le bon commerce selon Michael Porter :

John souhaite plus que tout gagner de l'argent. Il ne sait pas comment s'y prendre, d'autant qu'il n'a aucune formation.

Après avoir lu le livre de Michael Porter, il comprend.

Il rachète à bas prix, avec l'argent de l'héritage de ses parents, une vieille fabrique de chaussures.

Il lance une étude de marché qui le renseigne sur les tendances actuelles. Parallèlement, il demande à une boîte de communication de lui créer un logo attractif, un slogan accrocheur, puis finance une campagne de publicités. Il s'attache les services d'un infographiste chargé de lui dessiner les chaussures les plus sexy du marché et de quinze attachés commerciaux ayant pour mission de vendre la future production dans tout le pays et au delà si possible.

Côté production, il licencie immédiatement la moitié des ouvriers, trop vieux et surqualifiés et acquiert une machine-outil beaucoup moins coûteuse que la main d’œuvre. Il diminue de 30% l'épaisseur de cuir des doublures de quartier, supprime les contreforts et les premières de propreté, baisse la qualité du métal des œillets et rogne sur le diamètre des lacets. Pour réduire encore ses coûts de production, il dénonce les contrats qui liaient la vieille entreprise aux fournisseurs locaux et historiques et choisit de se faire livrer sa matière première par avion en provenance d'autres continents.

En revanche, il pense à investir dans un service contentieux pléthorique et rémunère fort bien un analyste financier qui doit le prémunir contre cette plaie qu'on appelle impôt.

Au bout de cinq ans, furieux de ne toujours pas figurer dans le magazine "Forbes", il ferme carrément son usine de Portland et délocalise la production au Bengladesh, où la main d’œuvre est dix fois moins chère et beaucoup plus docile.

A partir de là, John s'enrichit rapidement. Ses clients ne reviennent jamais, sauf pour se plaindre, mais il n'en a que faire. Le stock de chalands est inépuisable.

Tout juste doit-il changer le nom de sa marque de temps à autre.

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le 27 août 2022

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