Crimes exemplaires
7.3
Crimes exemplaires

livre de Max Aub (1957)

Max Aub (1903 – 1972), intellectuel espagnol engagé né Paris, auteur d’une œuvre importante, et plutôt méconnu en France en dehors de ce livre culte, incisif et drôle, publia celui-ci en 1957, traduit de l’espagnol en 1997 grâce aux éditions Phébus (traduction de Danièle Guibbert).


Avec le plus grand sérieux, Max Aub affirme en introduction que ces cent-trente courts récits, des crimes avoués et justifiés de manière lapidaire par leur auteur, sont des témoignages authentiques. D’une drôlerie ultime et toujours équivoques, ils sont surtout exemplaires par leur dimension surréaliste et du fait de l’incongruité de ces actes perpétrés pour des motifs dérisoires – petites vexations, emportements d’envieux ou frustrations -, et justifiés ici par les assassins sans la moindre parcelle de culpabilité.


«- Je ne l’ai pas fait exprès.
(Moi non plus !) C’est tout ce que parvenait à répéter cette imbécile devant le pichet en miettes. C’était celui de ma sainte mère qui est au paradis !
Alors je l’ai mise en pièces. Je vous donne ma parole, jamais je n’avais pensé jusque là à la loi du talion. Ce fut plus fort que moi.»


«Il tua sa petite sœur la nuit des Rois parce que tous les jouets étaient pour elle.»


Avec des situations et jeux de mots savoureux, les meurtriers de Max Aub font du crime une réaction normale, et même légitime, contre l’affront, la bêtise, l’incompréhension ou tout simplement la différence, brossant par touches gorgées d’absurdité et d’humour noir le tableau d’une humanité féroce.


«Il m’avait mis un morceau de glace dans le dos. Le moins que je puisse faire était de le refroidir.»


«Je l’ai fendue de haut en bas, comme une bête, parce qu’elle comptait les mouches au plafond pendant que je lui faisais l’amour.»


«Je lui ai demandé L’Excelsior et il m’a apporté Le Populaire. Je lui ai demandé des Delicados et il m’a apporté des Chesterfield. Je lui ai demandé une bière blonde, il m’a apporté une bière brune.
La bière et le sang, brassés par le mépris, ne font pas bon mélange.»


«Je l’ai empoisonné parce que je voulais occuper son siège à l’Académie. Je ne pensais pas qu’on le découvrirait. Mais il y a eu ce romancier de merde et qui de surcroît est commissaire de police !»


Retrouvez cette note de lecture, et toutes celles de Charybde 2 et 7 sur leur blog ici :
https://charybde2.wordpress.com/2015/07/10/note-de-lecture-crimes-exemplaires-max-aub/

MarianneL
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 10 juil. 2015

Critique lue 191 fois

1 j'aime

MarianneL

Écrit par

Critique lue 191 fois

1

D'autres avis sur Crimes exemplaires

Crimes exemplaires
IssyMediatheques
7

Coups de coeur d'Issy

Ce recueil nous offre 130 très courts récits dans lesquels, des crimes sont avoués et justifiés de manière lapidaire par leur auteur, Max Aub, fer de lance du surréalisme espagnol. Pépites de...

le 12 avr. 2020

Du même critique

La Culture du narcissisme
MarianneL
8

Critique de La Culture du narcissisme par MarianneL

Publié initialement en 1979, cet essai passionnant de Christopher Lasch n’est pas du tout une analyse de plus de l’égocentrisme ou de l’égoïsme, mais une étude de la façon dont l’évolution de la...

le 29 déc. 2013

36 j'aime

4

La Fin de l'homme rouge
MarianneL
9

Illusions et désenchantement : L'exil intérieur des Russes après la chute de l'Union Soviétique.

«Quand Gorbatchev est arrivé au pouvoir, nous étions tous fous de joie. On vivait dans des rêves, des illusions. On vidait nos cœurs dans nos cuisines. On voulait une nouvelle Russie… Au bout de...

le 7 déc. 2013

35 j'aime

Culture de masse ou culture populaire ?
MarianneL
8

Un essai court et nécessaire d’un observateur particulièrement lucide des évolutions du capitalisme

«Aujourd’hui il ne suffit plus de transformer le monde ; avant tout il faut le préserver. Ensuite, nous pourrons le transformer, beaucoup, et même d’une façon révolutionnaire. Mais avant tout, nous...

le 24 mai 2013

32 j'aime

4