Pardon , tonton Alain...Je le referai plus. Promis.

La Zone du dehors est un roman de science-fiction français paru 1999 et écrit par Alain Damasio. Damasio...Damasio...Ce nom vous dit quelque chose pas vrai ? Bah Damasio c'est un peu l'icone de la science-fiction clairement libertaire , la figure de proue de tout un mouvement d'auteurs qu'on pensait avoir disparu : ceux qui écrivent encore aujourd'hui une littérature maligne - quoi que l'on puisse lui trouver qualitativement parlant , faut reconnaître que c'est ingénieux - sur la société et ses dérives sécuritaires , liberticides , néo-libérales...
Personnellement , et parce que cette "critique" va être purement subjective dans son traitement , j'avais eu une première expérience assez...calamiteuse avec Damasio. Sa Horde du Contrevent m'avait soufflé en dehors des lignes de son texte. Un livre complexe au point de me pousser à entretenir durant ma lecture une feuille double sur laquelle j'inscrivais le nom et les caractéristiques de ses personnages tant tout était flou , et tant j'étais perdu. Un livre colossale aussi , démoralisant. Parce que la première caractéristique de Damasio c'est d'être foncièrement démoralisant.
Et La Zone du Dehors , à sa manière , l'est autant que la Horde du Contrevent. Mais bien plus subtilement...
Nous sommes en 2084 - oh ? - , sur un des satellites de Saturne. C'est ici qu'est venu s'installer , après la dévastation de la planète Terre , une partie de la société humaine afin d'y fonder une sorte de micro-nation : Cerclon. Totalement renfermée sur elle même , ultra-sécuritaire , fondamentalement guidé par le sens de la compétition et de la notation permanente , Cerclon c'est un peu ce palier catastrophique vers lequel toute société "socio-démocratique" risque de se diriger à force de croire en la providence du capitalisme et du flicage constant. Seulement , il existe peut être un espoir dans ce monde politiquement ultra hygiénique : La Volte. Mouvement anarchiste , celui ci tente sous l'influence de sa ligne directrice surnommé le Bosquet de prendre un second souffle après l’exécution de leurs précédent chef. Leur but étant d'ouvrir les yeux aux autres habitants de Cerclon sur cette cage qu'est en vérité leurs vies - alors que tous se prétendent si libres.
La personne qui m'a offerte ce livre ( une personne formidable , l'un des plus grands personnages de mon existence et que je salue d'ailleurs ! ) m'avait dit une chose intéressante un jour après avoir lu Fahrenheit 451 de Ray Bradbury : " C'est un livre sympa...Mais à qui s'adresse t-il en vérité ?" Etant libertaire , mon ami avait alors eut une réflexion que je ne comprenais jusqu'alors qu'à moitié.
Puis est venu la Zone du dehors. Et j'ai compris que ce raisonnement , à chaud , et à froid , n'etait pas totalement dénué d’intérêt.
Lire 1984 d'Orwell très tôt dans sa vie , c'est se forger un esprit critique , même chose pour Fahrenheit 451 ; et même chose pour La Zone du dehors donc. A quoi la lecture d'un tel livre peut elle apporter à un esprit déjà bien aiguisé ? Sans doute la sensation que le grand soir anarchiste est compliqué à gérer car il doit avant tout se confronter aux fausses contradictions que l'adversaire , invisible et conscient d'être en capacité de facultés quasi-démiurgiques de déboussolement , lui présentera et qu'il devra surmonter. Je pense à l'éthique , par exemple , qui occupe une grande place dans chaque action de la volte. Quand un attentat ne fait par exemple qu'une victime , et que cette victime est une petite fille , comment réagir lorsque vous avez organisés l'action ?
Et c'est là que se produit le ressort narratif de l'histoire qui vous désarçonne - ou désarçonne les lecteurs comme moi. La question de la vanité. Tout au long de cette lecture , je n'ai eut de cesse d'avoir envie de gifler les membres du Bosquet , non pas parce que leurs luttes seraient inutiles ou risibles ( on parle quand même de la libération des conscience de l'humanité comme elle est prophétisé depuis le XIXem siecle par les théoriciens anarchistes ) mais parce que chacun de ses membres a une façon de gérer leurs luttes qui sont incroyables. Entre celui qui est insupportable parce qu'il vous ressemble dans le sens où il ne veut jamais rien faire , et celui qui est extreme de manière totalement irraisonné , on est partagé entre exaspération et colère. Et j'aime pas être réellement touché par ces deux émotions de manière aussi frontale quand je lis un bouquin qui doit au contraire m'éveiller à des vérités sur ma propre société , parce qu'on a vraiment la sensation que Damasio a juste décidé de vous asseoir à un pupitre et de vous faire recopier dix milles fois les syntagmes " Je suis une pauvre merde. Je suis un mouton. Je dois me repentir." Et ça , très franchement , c'est juste insupportable ! Vraiment ! J'hallucine à quel point je me suis énervé après ce bouquin !
A quoi ça sert de lire un livre où on va vous rentrer dans le lard pour vous rappeler de la sorte que vous êtes une petite pute ? Moi ça me donne pas envie de m'améliorer , ça me donne envie d'être con. C'est finalement très judéo-chrétien cette idée de culpabiliser son lectorat au lieu de l'aider à avancer. Meme Captp , le perso principal , reconnait que c'est le principal soucis de son mouvement. La vanité de la rébellion , de celui qui sait mieux que vous , et pourtant rien n'évolue. Surtout lorsque l'effet d'inhibition se propage dans le bosquet , là où un peut de recul de la part des pesos aurait pu agir.
Donc , Damasio...Bah c'est vraiment pas mon délire. Voyez de votre coté.

Le-debardeur-ivre
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le 8 avr. 2018

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