Certains sur ce site savent tout l'amour et l'admiration que je porte à l'oeuvre et au personnage de Francis Scott Fitzgerald ! Et, bien sûr, il est toujours plus difficile de parler de ces romans, de ces films, de ces musiques que l'on aime tant...
Ces mêmes personnes qui connaissent ma passion pour l'homme de l'âge du jazz, peuvent aussi imaginer quelle ne fut pas ma tristesse en lisant la dernière phrase écrite, à tout jamais, de la main de Fitzgerald...
En faisant une crise cardiaque ce jour de décembre 1940, le romancier oublié et alcoolique, laisse en suspend une oeuvre prometteuse à souhait, à jamais mystérieuse car inachevée...

N'étant plus que l'ombre de lui même, l'auteur de l'acclamé Gatsby le Magnifique, n'a plus rien publié depuis longtemps ( Tender is the night, 1934). Exilé à Hollywood, pendant que sa femme Zelda est internée dans les plus luxueux hôpitaux psychiatriques qui le ruinent à n'en plus finir, Fitzgerald exerce le métier de scénariste qu'il déteste.

C'est de cette vie dans le milieu du cinéma qu'il s'inspire pour écrire The last Tycoon. Et c'est quelque chose de nouveau dans l'oeuvre de Fitzgerald que cette insistance réaliste sur un tel univers. Hollywood a droit à une analyse profonde. On lit à travers cette description les sentiments mêmes de l'auteur au sujet du traitement que reçoive les scénaristes dans cet empire :" On parlait d'eux dans les mêmes termes en leur absence, exception faite pour une espèce nommée auteurs dramatiques, qui venaient de New York. Ceux-là, on les traitait avec respect s'ils ne restaient pas longtemps ; sinon, ils sombraient avec les autres dans la catégorie des employés de bureau." Comment ne pas y voir la situation même de Fitzgerald qui n'aimait pas son métier ?

Pour nous guider à travers ce monde, nous suivons le personnage de Monroe Stahr, légende du cinéma, producteur prodigue à la santé vacillante, qui se plonge à corps perdu dans son travail depuis la mort de sa femme, la célèbre actrice Minna. Il a connu le passage difficile du muet au parlant et a du mal à accepter la direction que prend l'industrie cinématographique dans les années 30. Personnage fitzgeraldien à souhait que ce Stahr, il a quelque chose de l'homme qui s'est fait seul et qui est seul, à la manière de Jay Gatsby. Mais le héros du Last Tycoon est bien plus développé et complexe, équilibré aussi.

Et que serait un roman du génial Francis Scott sans une histoire d'amour ? Les pages centrales de la rencontre entre notre héros et la très mystérieuse Kathleen sont d'une incroyable beauté ! Comme toujours, nous retrouvons cette ambiance très particulière, chère à Fitzgerald, faite de romantisme tout en pudeur, de lyrisme discret et toujours nostalgique !

Et que dire de la structure ? jamais une oeuvre de Fitzgerald n'aura été si équilibrée ! C'est limpide... Il n'y a qu'à voir la différence avec le sublime Tender is the night.

Alors quelle frustration, n'est-ce pas, que de trouver Le dernier nabab inachevé... Ce manque de conclusion rajoute peut-être au mystère de ce roman, à son aura ! je l'ignore ... Et quand, à la fin du livre, on lit les notes de l'auteur lui-même sur ce qu'il projetait de remanier ou d'ajouter, on ne peut qu'être triste de ne pas avoir entre les mains ce qui aurait sans aucun doute été le chef d'oeuvre de Fitzgerald, le roman de la maturité !
Il en était seulement à la moitié de son livre ...

Pour me consoler, je regarderai l'adaptation de Kazan ! Je suis curieuse de voir s'il a respecté le plan que devait suivre Fitzgerald pour terminer son oeuvre; ou si, au contraire, il a recréé sa propre histoire...
gaatsby
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le 10 mars 2015

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gaatsby

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