Poètes et littéraires, passez votre chemin, ce bouquin n'est pas pour vous : Le Problème de Turing s'inscrit en effet aux limites de la Hard Science – terme désignant les récits de science-fiction reposant sur des bases scientifiques et techniques très solides – tout en se doublant d'une ambiance Tom Clancy saupoudrée d'un brin de Ian Fleming qui ne va pas sans rappeler certaines séries télé focalisant sur la vie de policiers en civil à la psychologie recyclée dans des schémas d'intrigues resaucés jusqu'à la nausée...

Informaticiens et autres geeks passionnés par les I.A., procurez-vous ce livre de toute urgence : malgré l'âge des théories présentées (l'ouvrage est sorti aux USA en 1992), je veux bien parier que vous serez fascinés par les pensées de Marvin Minsky – ici résumées avec précision et concision, surtout si on tient compte de la complexité du domaine – et même si celui-ci donne l'impression de rêver, au moins un peu. À lire ce bouquin, on croirait presque que le chercheur a déjà fabriqué une I.A. qui fonctionne à la perfection...

Le maître-mot de cette histoire est « réalisme » et, comme souvent dans ce type d'ouvrage, l'incroyable quantité de détails – tant à propos des I.A. que des routines de sécurité des laboratoires militaires, ainsi que des tas d'autres choses – tout ce baratin tend sérieusement à nuire au récit dont le synopsis n'a par ailleurs rien de très excitant non plus ; sauf dans les cent dernières pages qui ne manquent pas d'humour, mais sans lourdeurs regrettables pour autant. Les personnages quant à eux ont une psychologie aussi épaisse que du papier à cigarette – du papier Canson pour Brian Delaney toutefois, même si celui-ci demeure un beau cliché de génie informatique – ce qui ne satisfera pas plus ceux d'entre vous friands de relations humaines abouties et/ou d'évolutions psychologiques notables.

Les quelques trahisons qui saupoudrent le récit ne parviennent pas vraiment à introduire de réels coups de théâtre non plus de sorte que le suspense est plutôt inexistant. En fait, ce n'est pas qu'il n'y a pas de suspense, mais celui-ci reste essentiellement mal exploité, le rythme global de la narration étant beaucoup trop mou pour que le lecteur ressente une quelconque tension... Le dernier chapitre tente d'introduire un brin de tragique mais échoue lamentablement, toutefois plus à cause de la forme que du fond.

En gros, il y a de l'idée mais on sent bien que le but des auteurs était plus de vulgariser les recherches en cybernétique (ce qui a le mérite de se montrer informatif, et qui fait que je vous en parle ici) à travers une fiction destinée au marché de la littérature de gare (ce qui a le mérite de se lire vite) tout en arrondissant les fins de mois au passage, plutôt que d'explorer une réelle dimension humaine des rapports entre l'Homme et sa création en dépit de ce qu'évoque le résumé reproduit en italique au début de ce billet.
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le 7 mai 2011

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