Après avoir adoré ma relecture du premier épisode, il était pour moi temps de m'attaquer à sa suite, qui n'est ni plus ni moins le livre grâce auquel j'ai découvert l'auteur, et qui en conséquence se trouvait être un de mes préférés à l'époque. Autant dire qu'il avait la pression

L'histoire fait directement suite au premier épisode : la famille Fairway est amenée à déménager en plein milieu du désert, car c'est là que le père de Peggy a trouvé son nouveau job : gardien d'un aérodrome désaffecté. Seulement voilà, ce désert n'est pas vraiment normal, puisque les mirages que l'on y croise sont... réels. C'est à dire qu'ils apparaissent au voyageur imprudent, énormes fenêtres ouvertes sur un autre monde, prêts à se refermer dès que la victime en aura franchi le seuil, l'engloutissant pour toujours. Une folie typiquement Brussolienne, et ce n'est qu'un début.

En effet, une fois l'aérodrome atteint, la famille est isolée du reste du monde et tout commence à aller de travers : l'eau courante est coupée (ennuyeux dans le désert) et une étrange lassitude s'abat sur nos personnages. Bref, il n'en faut pas plus aux parents et à la sœur de Peggy pour se jeter dans le premier mirage venu. Et que va faire la jeune fille ? Prendre le mirage suivant pour tenter de les sauver, bien sûr !

Le monde des mirages n'étant pas soumis aux lois terrestre, l'imagination de Brussolo n'est alors plus entravée (déjà qu'elle l'était pas beaucoup...), et l'auteur peut donc se déchaîner : quand bien même l'objectif de Peggy sera d'aller réveiller un démon endormi (le maître des mirages, qui les crée dans son sommeil) placardé dans une forteresse en constante évolution, plein d'à-côtés viendront se greffer à l'aventure, comme les costumes permettant de devenir temporairement un animal mais se dégradant avec le temps (et si tu es un oiseau qui vole haut quand le costume de désagrège, c'est triste), les fleurs qui tuent les voyageurs pour les prendre comme engrais afin d'être plus belles que leurs voisines, le miel irrésistible mais qui te transforme en pain d'épice afin que tu sois dévoré par tes amis, les taupes qui [...]. Bref, l'imagination de Brussolo tourne à toute vitesse, et c'est assez génial.

Alors si dans l'idée ces nouvelles aventures de Peggy avaient tout pour être parfaites, ce n'est jamais vraiment le cas dans l'exécution. Déjà, je trouve la structure bancale : elle est très typée jeu vidéo, ce qui n'est de base pas pour me déplaire, en tant que grand fan de l'industrie vidéoludique que je suis. Malheureusement, le découpage implicite en "niveaux" nuit en réalité à la construction du récit : à la manière d'un JV dit classique, on sait très bien que le héros va s'en sortir, et qu'il accomplira sa mission, plus ou moins quelques déconvenues lors du parcours. Alors oui, Brussolo essaye de maintenir le suspense à chaque péripétie, et il y arrive plutôt bien car malgré tout on se demande à chaque fois comment nos héros vont s'en sortir, mais l'issue finale de chaque chapitre n'en est pas moins jamais vraiment surprenante

Et c'est là qu'intervient un second problème : dans des situations désespérées, il arrive que l'auteur fasse appel à des Deus Ex Machina moyennement convaincants. Rien de scandaleux, non, mais assez pour faire la mou et se dire peu convaincu. Autant d'écueils qu'il arrive usuellement à éviter.

Au final, là où le rythme du premier volume allait croissant, enfermant les héros et le lecteur dans une spirale infernale que seule le dénouement soulageait, celui du second s'apparente davantage à une montagne russe, comprenant donc beaucoup de bons moments, intenses et intelligents, mais aussi de courantes retombées.

Alors si Le Sommeil du Démon reste assurément un bon livre, notamment pour le jeune public auquel il s'adresse peut-être plus que le premier, ses faiblesses de rythme et de structure font un peu pâle figure face à l'incroyable maîtrise de son prédécesseur. Reste que Brussolo est un grand malade, et que ce livre vaut la lecture rien que pour contempler les dérives que son esprit torturé occasionne sur des univers théoriquement merveilleux et parfaits.

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le 26 févr. 2014

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