Au fur et à mesure des défections, les témoignages de transfuges en provenance du Nord contribuent à affiner la vision que l'on peut avoir de cet état si médiatique et tellement secret à la fois. Les doutes se dissipent. Les soupçons se confirment : l'empire de Kim Jong-Il semble s'être coincé dans une faille temporelle où certaines pratiques de torture que l'on qualifierait par chez nous de moyenâgeuses sont affreusement contemporaines. Tandis que son allié voisin – la Chine – s'est depuis plusieurs années résolument engagé sur le chemin de la mondialisation sans état d'âme, la Corée du Nord parait se retrancher chaque année un peu plus derrière ses barbelés, trop fière pour avouer ses crimes (mais pas assez pour refuser l'aide humanitaire du Sud.)

Ceux qui souhaitent se faire une idée plus précise de la vie quotidienne des coréens au-delà du 38° parallèle à 60 Km au nord de Séoul, trouveront le livre de Kang Chol-Hwan très instructif. Né en Corée du Nord d'une famille aisée d'ex-résidents au Japon venue s'installer dans ce paradis communiste, il raconte sa jeunesse heureuse à Pyongyang, jusqu'au jour de la « disparition » de son grand-père. Les choses rapidement se gâtent. Chol-Hwan n'a pas 10 ans lorsqu'il est envoyé avec sa petite sœur, sa grand-mère et son père dans le camp de Yodok y faire l'expérience de la faim, de la violence, de la délation et de la mort. Pendant que je traversait tant bien que mal ma crise d'adolescence, Chol-Hwan était de corvée funéraire, obligé de transporter et d'enterrer les morts du jour, non sans les avoir dépouillés de leur vêtements et chaussures, denrées précieuses à Yodok où il manque de tout. Lorsque enfin, il en sort, Chol-Hwan a 19 ans. Débute alors un nouveau voyage, celui qui mène quelques rares chanceux à la liberté pour laquelle nombreux vont jusqu'à payer de leur vie. Avec le recul et un regard critique qui s'est depuis aiguisé, l'auteur souligne les anomalies de ce système répressif corrompu jusqu'à la moelle :

« Ce régime qui ne cesse de dénoncer le capitalisme a développé un type de société où l'argent est roi, plus encore que dans une société capitaliste. »

Autrement dit, grâce aux devises étrangères qui leur parviennent, du Japon essentiellement (où résident leurs proches), les nord-coréens « riches » peuvent espérer mener une vie correcte. Les autres doivent se contenter d'un quotidien chaque jour plus pénible et misérable. On est bien loin de toute idéologie communautaire...
franchoi
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le 21 févr. 2011

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