C'est une visite en enfer que nous propose Jac Barron. Une visite dans les tréfonds du psychisme. Pas moins. En ressortirons-nous indemne ?


Thriller psychique est-il d'ailleurs écrit sur la couverture. Couverture superbe soit dit en passant. Qui te plonge dans l'ambiance. Un œil rouge te fixe, émergeant d'un visage blanc, poudré, inquiétant.


Si vous aimez les romans hardcore et gore, vous êtes dans le bon univers. Et quand je dis gore, je dis porn-gore. Non porn-gore ne veut pas dire qu'il y a du cul crade. Ça veut dire que le gore y est intense, détaillé, graphique. A la base, le terme fut créé pour désigner les films d'horreur type "Saw" ou "Hostel" dont la violence et les scènes de tortures sont assez insoutenables. Vous voilà prévenus.


L'écriture est riche, fouillée, ambitieuse. Les phrases sont somptueuses. On sent la sueur et le travail déployés par l'auteur pour nous livrer une œuvre aboutie et complexe. Un peu tarabiscotée parfois mais doté d'un point de vue.


Paradoxalement, puisqu'on vient de saluer l'écriture, les dialogues sont le gros point faible du livre. Parfois ampoulés, parfois rugueux. Ils sonnent un peu faux et font perdre de la spontanéité à l'histoire.


Et qu'en est-il de l'histoire : Troubles de l'identité, perte des repères, dédoublement de personnalité et meurtres craspecs, tel est le programme. Oui ça déchiquette fort, ça explose vos méninges et vous vous retrouvez, telle Alice, dans un pays des merveilles ultra-gore et nébuleux.


L'auteur démultiplie les points de vue et chaque chapitre est raconté ou vécu par un personnage différent. Jac Barron tente le jeu de pistes pour dérouter le lecteur, ce qui crée mystère, émulation et rouages du cerveau en état de marche maximal. Barron ne vous mâche pas le travail et il vous faudra rester bien concentré pour démêler les fils de l'intrigue. On disait ambitieux plus haut, on y est, tant l'auteur ne cherche pas la facilité et vous en donne pour votre argent.


Mais...


Les personnalités se chevauchent, s'entremêlent et aucune n'émerge en fin de compte. C'est le risque quand les personnages ont des pensées et des parcours de vie somme toute assez similaires. Et c'est le deuxième point faible du livre, les personnages ayant une fâcheuses tendance à se ressembler, aucune personnalité saillante n'émergeant vraiment ; chacun d'entre eux étant perclus de fêlures, de failles et de blessures assez redondantes remontant à l'enfance. On est dans un thriller noir de chez noir.


Mais Jac Barron prend des risques dans la construction et l'écriture de son livre. C'est suffisamment rare pour être salué. Son roman est malin, effrayant, différent. On ne s'ennuie pas à sa lecture, même si on en sent parfois quelques grosses ficelles. Pour un premier roman, on sent qu'on assiste à la naissance d'un écrivain atypique. Espérons qu'il en a sous le coude pour régler les défauts cités ci-dessus dans les deux volets suivants, c’est une trilogie, et nous donner le grand bouquin que l'on peut espérer de lui. 2,5/5
http://cestcontagieux.com/2016/02/07/les-cicatrices-trilogie-des-pulsions-t1-de-jac-barron-la-chronique-scarifiee/

David_Smadja
5
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le 7 févr. 2016

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David Smadja

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