Suite à un concours lancé par Gallimard, Christelle Dabos vient de recevoir le tout premier prix du premier roman jeunesse Gallimard-RTL-Télérama (dans le genre trop long à dire, ils ont fait fort) ; prix qui récompense donc Les fiancés de l'hiver, premier tome de la série « la Passe-miroir ». Étant donné les responsables du prix, je me suis dit tout de suite que ça allait être une bombe, faire un buzz monstrueux, et qu'il fallait absolument que je sache ce qu'il valait. Et en fait... Bon, c'est à relativiser, c'est pas non plus une sombre bouse, c'est plutôt réussi, mais ils l'annonçaient comme le prochain Harry Potter, et sincèrement ça en est loin.

L'histoire se déroule dans un futur très indéterminé, dans lequel la Terre s'est fracturée en une centaine de morceaux qui flottent vaguement autour du cœur de l'ancien globe : ce sont les Arches. Sur chacune d'elles, un survivant du cataclysme a fondé une famille, et chaque famille possède ses capacités ; par exemple, sur Anima, les Animistes ont le pouvoir de contrôler les objets (les réparer, les faire bouger, les rendre vivants pratiquement). Les familles se mélangent assez peu, tout le monde restent traditionnellement sur son Arche de naissance (autant dire que c'est consanguinité et compagnie, ils s'appellent tous « cousins »), mais ils possèdent une technologie relativement avancée qui leur permet de se déplacer d'une Arche à l'autre.
C'est là qu'intervient Ophélie, le personnage central du livre. C'est une jeune fille très effacée, cachée sous ses grosses lunettes et ses cheveux indomptables. Elle a deux pouvoirs très précieux : celui de lire l'histoire des objets en les touchant, et celui de se transporter d'un endroit à l'autre en traversant un miroir. Elle voudrait seulement qu'on la laisse tranquille : deux fois déjà elle a réussi à éviter des mariages entre cousins, mais on lui force la main pour le troisième ; elle est envoyée sur l'Arche du Pôle pour épouser un géant taciturne et antipathique nommé Thorn, et doit quitter sa famille pour toujours.
Cette première partie (introduction, annonce du mariage, voyage en dirigeable et installation au Pôle) est vraiment très lente. Les personnages pas très attachants, l'univers assez peu décrit, très peu d'actions... Tout ce qu'il faut pour vraiment plomber la qualité de l'ensemble. La deuxième partie se révèle bien plus valable. Ophélie, qui a découvert la Citacielle, gigantesque ville volante (voir couverture), peuplée par une flopée de courtisans calculateurs et sans scrupules, et des hordes de domestiques, sans pouvoir, mais qui ne valent pas beaucoup mieux, va devoir survivre aux complots, aux mensonges et aux bassesses en tout genre, habituée qu'elle était à une gentille ambiance familiale. Elle cherche surtout à comprendre pourquoi on a voulu marier une fille sans trop d'attrait comme elle au plus grand fonctionnaire de la ville. Ophélie est tout à fait perdue au milieu de ce chaos, elle essaye de trouver du soutien mais elle ne sait jamais à qui se fier. D'autant plus que les apparences sont très trompeuses, au sens propre : les Mirages, famille dominante au Pôle, ont le pouvoir de créer des illusions...

Ce n'est pas un mauvais roman, il finit par être captivant, et il comporte quelques belles inventions, comme cette Citacielle, où le soleil peut apparaître partout même s'il neige dehors, et où un simple couloir permet de se transporter n'importe où juste en passant une porte. Ce n'est pas un roman d'aventures ; l'action repose sur les intrigues de la cour, sur les complots de chacun contre tout le monde. Les personnages intéressants mettent assez longtemps à le devenir, et ce n'est que dans les derniers chapitres que j'ai été emporté, que l'histoire s'est emballée et m'a vraiment surpris. Le principal reproche serait que tout traine beaucoup trop ; l'auteure a fait tourner tout le propos sur les mystères de ce mariage arrangé alors que nous faire découvrir ce monde fantastique de manière plus approfondie, et plus rythmée, l'aurait rendu cent fois plus magique. Pour Harry Potter, on repassera, mais le deuxième tome devrait être plus convaincant ; à voir.
Florentin
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le 19 juin 2013

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Florentin

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