Les mains en l'air ! L'auteur de ce livre possède un profil sur ce site, c'est d'ailleurs ainsi que j'en ai entendu parler ; il m'a suffi de lire un statut appelant à la rescousse pour le noter dans mes envies, avant de le trouver d'occasion chez Gibert quelques mois plus tard. Qu'à cela ne tienne, je fais la promesse au lecteur de ne pas écrire cette critique avec un pistolet symbolique sur la tempe.


Disons-le tout net, il y a dans ce pamphlet du Muray à la sauce sémantique. Le propos est en revanche exagérement rhapsodique, et l'analyse du vocabulaire n'est qu'un prétexte pour faire entrer dans l'arène des néologismes en pagaille, tous plus vigoureux et dopés aux hormones les uns que les autres : Fun, Lady Merx, Neuneu, toute une collection d'archétype figurent l'avachissement moral, cognitif et relationnel de l'homme contemporain. La critique bondit dans tous les sens comme un lémurien d'intérieur, sautant de l'influence américaine à la déliquescence de l'école sans oublier quelques tartines à Macron, Sarkozy, la publicité et la radio publique.


L'auteur déploie une connaissance stupéfiante de ce que l'Hexagone transmet par les ondes, et tout à fait exhaustive, m'évoquant irrémédiablement un Muray qui ne verrait la France qu' à travers la télévision, la radio et Youtube. De tels canaux ne dressent qu'un portrait peu flatteur de notre génie national, et quelques éructations semblent être montées en épingles un peu trop facilement de l'un ou l'autre moment de télévision malheureux.


Quelques tics de langages sont effectivement joliment liquidés, mais ils servent surtout de prétexte à la logomachie inventive de l'auteur - quoique peu farouche quant aux lieux communs-, sertie de traits inégaux et agglomérés avec brutalité. Oui mais bon, Muray est déjà passé par là avec plus de génie, plus de verve et une assise culturelle sans doute plus vaste, qui permettait de plus aériennes cabrioles. Ici l'invective est rasante, la verbe et lourde et le format serré du livre avec les retours fréquents à la ligne desservent les longues phrases à tiroirs, tirets et parenthèses qu'un prosateur qui brocarde l'abêtissement ne peut qu'employer.


Enfin, il m'a amusé de constater que de David Lodge à Christopher Lasch en passant par Bouveresse, Mandosio et bien d'autres (mais pas René Pommier, j'ai décidé de passer mon chemin par fidélité à Girard), j'ai retrouvé mes envies et lectures parmi presque toutes les références bibliographiques de ce livre. Je crois que c'est un signe : à mon tour de jouer les épigones de Muray.

Fabrizio_Salina
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Citations

Créée

le 17 avr. 2020

Critique lue 307 fois

5 j'aime

5 commentaires

Fabrizio_Salina

Écrit par

Critique lue 307 fois

5
5

D'autres avis sur Les Français malades de leurs mots

Du même critique

007 Spectre
Fabrizio_Salina
4

Critique de 007 Spectre par Fabrizio_Salina

Si vous lisez cette critique c'est que probablement, je suis votre éclaireur au premier degré, ou indirectement par transitivité de l'éclairement. Un éclaireur, c'est ce petit gars à cheval dans age...

le 30 oct. 2015

41 j'aime

8

Bonjour Tristesse
Fabrizio_Salina
2

Gestion du débit salivaire

Ce qui aurait du rester un exercice de jeune comédien s'est malheureusement retrouvé publié à intervalle régulier sur le site de streaming numéro 1. La forme est simple : un torrent de phrases...

le 21 mars 2015

36 j'aime

12

L'Ingénu
Fabrizio_Salina
4

Nique sa mere l'ironie

Voltaire raaah putain Voltaire. Ce gueux qui a passé sa vie à frapper le fond pour soulever la vase des esprits nous a légué sa fucking ironie. Elle est partout, dans toutes les conversations, tous...

le 27 nov. 2014

33 j'aime

13