Martin Eden figure souvent en tête des 100 meilleurs livres préférés des lecteurs. Aussi j'étais impatient de le découvrir.
Pendant la 1ère moitié du livre, j'étais prêt à mettre la note maximale, tant l'histoire contée est belle, poétique et bien écrite. L'histoire d'un jeune homme qui est attiré par l'écriture et qui décide de s'élever, et de faire tous les efforts nécessaires pour s'en sortir. Par dessus le marché, une belle histoire d'amour qui fait donne de beaux frémissements au lecteur.
C'est l'histoire millénaire des transfuges de classe. Et comme nous le racontait Annie Ernaux (qui voulait "venger sa classer") ou plus récemment Nicolas Matthieu (dans son excellent Goncourt "Leurs enfants après eux" : "ces gens là avaient inventé les règles du jeu") : est-il jamais possible de s'élever au dessus de son rang?
Pendant longtemps dans le livre, on se demande s'il y aura un fin triomphante ou une impasse sordide. Je ne divulgue rien mais la fin ne tombe pas dans le piège de cette binarité.
Néanmoins, j'ai trouvé des longueurs dans ce livre, notamment sur les manuscrits rejetés. Par cent fois Martin Eden s'y reprend, et on comprend bien que Jack London raconte ici sa vie, sa frustration et colère. Colère d'ailleurs qui se répercute dans le livre et qui, certes est utile pour dénoncer ce décorum répugnant de la lutte des classes, mais souvent mal à l'aise. Certaines scènes aussi sont vraiment exagérées, voire ratées : la scène du combat à mort est vraiment pénible, la fessée au journaliste est ridicule et désagréable, les envolées lyriques et politiques sont assez inintéressantes et peu probables. C'est surtout ça qui m'a un peu gêné au final : ce jeune qui travaille 19h par jour pour devenir un grand écrivain, tout ceci manque de crédibilité. On comprend que c'est une fable pour dénoncer bien des travers de la société de l'époque (hélas toujours d'actualité pour la plupart) mais des fois les ficelles sont trop grosses.
Ceci mis à part, il s'agit définitivement d'un très grand livre, très bien écrit, que l'on dévore d'une traite. Une belle histoire, et un roman qui fait réfléchir aussi, engagé et utile.