Nord et Sud
7.9
Nord et Sud

livre de Elizabeth Gaskell (1854)

Je vous recopie le live-toot que j'ai fait sur mastodon lors de la lecture du livre.


La vie s'écroule pour Margaret Hale. Alors qu'elle a passé 10 ans à Londres, sa meilleure amie part à Corfou avec son nouveau mari ; elle-même refuse les avances d'un homme, et lorsqu'elle retourne à la campagne chez ses parents, son père pasteur lui annonce qu'il va abandonner sa charge et qu'ils vont déménager dans le NORD.

Le nord, où ils ne connaissent personne, où leurs revenus vont baisser, où ils seront dans une ville industrielle. Leur seul contact sera John Thornton, un patron rustre et trentenaire. La famille Hale va donc habiter dans une minuscule maison de ville, avec seulement 2 salons et 4 chambres, accompagnés de leur fidèle servante Dixon. Et ils n'arrivent même pas à embaucher une deuxième bonne, les pauvres de la ville préférant travailler à l'usine.

Les premières rencontres entre Margaret et John ne se passent évidemment pas bien (sinon on aurait pas 650 pages) : il la trouve hautaine, elle le trouve rustre. Quand il veut lui serrer la main, elle ne comprend pas le geste qui ne se pratique pas dans le sud et lui met un vent. Et surtout, cet homme est un commerçant, ce qui est à la limite de la profession honteuse pour Margaret. Sans compter que John vit avec sa vieille mère acariâtre.

Petit intermède où Mme Hale mère nous parle de Frederick, le frère de Margaret, marin en exil suite à une mutinerie qu'il a déclenché contre un capitaine tyrannique. La mère est fière que son fils se soit dressé contre l'injustice même si elle sait qu'elle ne le reverra plus. Une vraie famille de révolutionnaires.

La grève menace. Alors que John passe voir la famille Hale, Margaret prend la défense du prolétariat contre lui. Il se défend un peu trop ardemment et finit par s'excuser de toute cette énergie, mais, une fois de plus, Margaret ne lui sert pas la main (elle n'a toujours pas compris que ça se faisait par ici).

Un docteur passe voir Mme Hale qui semble souffrir d'une maladie grave. Margaret le force à parler et tout le monde finit en pleurs (sauf Mr Hale qui n'est pas là et pas au courant).

Il faut bien l'avouer, Margaret est un peu nunuche. Aussi va-t-elle voir la famille Higgins, des prolétaires du quartier auxquelles elle s'est charitablement (sic) liée, pour que le père lui explique la grève. Pas sûr qu'elle comprenne bien, surtout qu'il s'est moqué de John Thorntorn.

Mais plus important : Mme Thorntorn mère prépare un diner auxquels les Hale sont invités. Gageons que ce sera un grand moment !

Et ce diner est très décevant. Qu'as-tu fait Elizabeth de ce chapitre médiocre ? Bref, les hommes discutent tranquillement de comment en finir avec la grève tandis que les femmes restent silencieuses. Margaret est impressionnée par l'aisance que montre John en maître de maison. Commencerait-elle à lui trouver de l'intérêt ?

De retour du diner, Margaret découvre que sa mère a fait un gros malaise. Toute la famille est consternée. Le docteur préconise un matelas d'eau pour la malade, Margaret va en chercher un chez Mme thorton. Hélas ! C'est presque la révolution dans la rue ! Les grévistes se rendent au même endroit.

Alors que les femmes se barricadent dans la maison, John leur fait face. Le ton monte, Margaret a peur pour lui, le rejoint et le protège de son corps ! La foule ne s'arrête pas pour autant et lance des projectiles, Margaret est touchée alors qu'elle se jette au cou de John.

Certainement choqués par ce non-respect des convenances, les prolétaires rouges de colère décident néanmoins de rebrousser chemin. De retour dans la maison, Margaret s'évanouit pendant que les autres femmes discutent de son attitude choquante. Enfin revenue à elle, elle rentre en fiacre accompagnée du docteur. Ouf, cette émeute semble finir bien pour tout le monde !

John n'a plus le choix : Margaret l'a touché, il doit donc la demander en mariage. Sa mère pleure "je ne serais plus que la seconde dans ton cœur !". Pendant ce temps, Margaret se lamente "je suis tombé bien bas ! Ils ont dû me croire amoureuse de cet homme !" Le lendemain John vient donc lui livrer son cœur, mais elle lui met un vent phénoménal (Ca a beau être une crevure capitalisme, je n'aurai pas voulu être à sa place). Il repart au bord des larmes.

S'ensuit une discussion sur la qualité des matelas (WTF), puis la mère de Margaret dicte sa dernière volonté : elle veut voir son fils Frederick avant sa mort. Margaret lui envoie donc une lettre ce qu'elle regrette aussitôt (quelle nouille).

Tandis que John pleure toutes les larmes de son corps, Margaret apprend que la fille d’Higgins, son prolétaire qui lui donne bonne conscience, est morte. Elle va voir le corps et, ni une ni deux, ramène le père Higgins à la maison pour qu’il boive le thé avec son Mr Hale, qui tentera de le remettre dans le bon chemin de notre seigneur jésus christ (car le prolétaire est un mécréant, bien sûr).

Mais ça ne va pas mieux chez les Hale : Mme mère agonise dans son lit de souffrance. John Thornton profite de l’occasion pour amener régulièrement des fruits frais et conjure sa mère de venir voir la morte en sursis, qui lui fait jurer de s’occuper de Margaret lorsque qu’elle trépassera ; Mme Thornston se sent obligé d’accepter malgré la haine qu’elle voue à Margaret depuis que celle-ci a repoussé son fils.

Et voilà le retour du fils prodigue : Frederick revient des îles, il est bronzé et sent bon le sable chaud. C’est un vrai homme : il sait allumer un feu contrairement à cette andouille de Margaret qui n’a plus qu’à lui beurrer des tartines (je n’invente rien) (il pratique bien le mansplaining, le Frederick).


Et paf, la vieille est dead. C’est donc naturellement à Margaret de faire une croix sur son chagrin pour soutenir les pauvres hommes en souffrance de la maison. (on a quand même un bel inventaire de pratiques sexistes en quelques pages.)

Mondieumondieumondieu : Frederick s’est converti au catholicisme par amour pour une espagnole. Malgré cette hérésie, Margaret le convainc d’aller voir un avocat londonien afin qu’il se défende contre les accusations de mutinerie. Ca tombe bien, l’homme qui lui a fait des avances au premier chapitre, Mr Lennox, est avocat.

Mais alors que Margaret accompagne frederick à la gare, un voyou et ancien marin le reconnait et veut l’arrêter pour touche la prime. Frederick le bouscule et réussit à prendre le train. Le voyou meurt quelques jours plus tard suite à sa chute ; margaret a été reconnu par un témoin et la police vient l’interroger. Elle nie sa présence à la gare. Elle s’évanouit par terre sitôt le policier reparti. Coïncidence heureuse, John Thornton connait le policier et lui fait comprendre que l’enquête ne doit pa aller plus loin. Mais il se demande bien qui était le jeune homme qui accompagnait Margaret (quel jaloux).

Ca ne va pas bien non plus dans le prolétariat. Boucher, un émeutier, ne trouve plus de travail et se suicide, laissant sa femme et ses huit enfants sans ressources. Higgins cherche du travail pour aider la famille Boucher, mais comme il est syndiqué aucun patron n’en veut. Margaret le convainc malgré tout de s'adresser directement à John.

Mme mère Thornton apprend que Margaret a accompagné un jeune homme à la gare. Elle vient donc donner une leçon de morale à Margaret. Ne pouvant évidemment pas dire que c’était son frère, ca ne se passe pas très bien. Et pendant ce temps Higgins se fait éconduire par John, qui ne veut pas non plus d’un meneur de grève dans son usine.



Les mois passent, John et Margaret continuent de s’ignorer. Margaret avoue à son père qu’elle a repoussé John. Visiblement sous le choc, Mr Hale meurt quelques jours plus tard alors qu’il visite Mr Bell, un ami d’Oxford. Damned ! Qui va garder la petite Margaret ? Sa tante et Mr Bell (certainement un vieux pervers) se disputent l’enfant. Et au milieu de cette bataille, John apprend que Margaret a un frère.

Visitant un de ses ouvriers, John découvre (!!!) que ces gens mangent mal. Comme c’est un bon patron, voire un philanthrope, il décide aussitôt d’inventer le restaurant d’entreprise, et se permet même de manger parfois parmi ses hommes (quand il y quelque chose de vraiment bon au menu, il ya quand même des limites à se mélanger à la plèbe).

C’est terminé pour Margaret à Milton : sa tante vient la chercher pour la ramener à Londres où elle pourra enfin retrouver une vie bourgeoise loin du prolétariat du nord. Elle fait un tournée d’adieu auprès des quelques connaissances locales ; au moment de croiser John ils ne s’échangent aucune parole. Cet amour est bien terminé (à moins que, il reste 100 pages, on va certainement avoir un twist).

Séquence nostalgie : Mr bell propose à Margaret de passer une journée à Helstone, le trou campagnard où elle a vécu sa meilleure vie quand son père était encore pasteur. Bien entendu le pasteur remplaçant (et surtout sa femme) sont des gens désagréables et sans aucun gout. Margaret se jure de ne plus jamais revenir chez ces ploucs.

Elizabeth Gaskell a un truc infaillible pour relancer le roman quand le lecteur commence à s’ennuyer : telle une GRR Martin victorienne, elle tue un personnage. Et c’est au tout de Mr Bell d’y passer. Margaret est évidemment triste, d’autant plus que Mr Bell voulait organiser un voyage en Espagne pour voir, non pas les châteaux, mais Frederick.

A tout chose malheur est bon : Margaret est l’héritière de Mr Bell qui possédait une belle fortune. Cela lui monte bien évidemment à la tête, puisqu’elle veut devenir indépendante et diriger sa vie. Pauvre femme ! Heureusement, elle traite toutes ses affaires avec Mr Lennox, l’avocat qu’elle a éconduit au tout début du roman (j’espère que vous suivez) et son entourage espère qu’ils se rapprocheront et que cela évitera le pire : une femme de tête (texto !).

Le vent tourne à Milton : le commerce devient difficile et John, ayant trop investi, n’est plus en mesure de garder son usine qui appartient à Margaret suite à l’héritage (l’autrice fait dans la grosse ficelle) . Il va à Londres raconter ses déboires à celle-ci qui lui propose de lui prêter de l’argent pour qu’il reste patron. L’argent faisant évidemment le bonheur, ils tombent dans les bras l’un de l’autre ! « Oh john, je ne suis pas digne de vous ! » « ne vous moquez pas ainsi de moi, qui suis convaincu de ne pas vous mériter ! » (Cette scène est fabuleusement drôle)

Et voilà, all’s end that end well.




J'ai live-poueté ce livre avec une certaine ironie, mais ce fut un grand plaisir. Il est étonnant de voir une romance écrite en 1855 mettre en scène à coté de la bourgeoisie des ouvriers, des scènes de grève, bref de la lutte des classes de manière assez honnête.

C'est un peu naïf par moment, un peu ridicule ou caricatural à d'autres, moins bien écrit que du Jane Austen, mais ça vaut la lecture.

rmd
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Créée

le 7 févr. 2023

Modifiée

le 7 févr. 2023

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