Omertà
5.5
Omertà

livre de Clara Lamarca ()

Sous-"Twilight" et sous-"Marc Levy"

J'ai appris l'existence de ce livre un peu par hasard je suppose. J'aime bien découvrir les œuvres des membres du site, qui sait peut-être que parmi eux se cache une future célébrité ? Alors autant sauter sur l'occasion de lire/voir/écouter une de ses œuvres avant le reste du monde, avant que cette personne ne soit trop connue pour revenir sur SC. Mais bon, je suis radin et étant habitué aux déceptions, je n'avais pas particulièrement envie d'investir 3€ pour une version numérique. Enfin il me semble que c'était le prix ; j'avais mis l'onglet de côté et puis un jour, en retombant dessus, j'ai vu le prix 0€. Je me suis dit qu'il devait y avoir une entourloupe quelque part, sûr de ne pas avoir rêvé le prix précédent. J'ai vu qu'il y avait un abonnement kindle pour lire les bouquins, un essai gratuit... je me suis dit pourquoi pas essayer et puis j'annule à la dernière minute ? Sauf que non, si on accepte la période d'essai, on accepte aussi de payer le premier mois, ce qui est un peu con comme promo. Mais en bon radin, je les comprends, ils veulent pas perdre trop de sous. Du coup je renonce et puis je clique quand même sur acheter. Et là on me dit que c'est impossible que je dois aller sur amazon.com. Je trouve ça bizarre, donc je renonce dans un premier temps. Puis j'y reviens, la curiosité tournant à l'obsession (en même temps avec toutes les bonnes notes qui défilent, forcément j'avais envie de savoir, savoir si c'est bel et bien le roman de l'année, parce qu'un tel enthousiasme ne pourrait signifier que cela, non ?). Je remplace le'.fr' par un '.com' et là je tombe sur une page similaire. Je clique pour acheter, le prix étant toujours de 0€ et là je suis transporté vers une page kindle pour lire. Paniqué je me dis que j'ai peut-être accepté les termes de kindle sans le faire exprès? Mais non... je râle un peu parce qu'il est écrit 300 pages dans le descriptifs, et lire autant de pages sur mon écran d'ordi ne m'enchante pas vraiment.. mais je me rends compte que cette information est mensongère et que c'est la même typo que dans l'extrait, des pages très courtes, avec beaucoup de blanc et rapides à lire.


Je ne sais pas trop si on peut parler de harcèlement dans mon cas, mais j'ai moi aussi été emmerdé dans ma jeunesse. Un groupe de racailles aimaient me balancer des boulettes de papier, me provoquer, attacher mon sac à une grille, y flanquer des jus de fruit durant les cours d'anglais et de sport. Je ne l'ai jamais mal vécu. Enfin si, sur le moment ça m'emmerdait, mais une fois le cours fini je pensais à autre chose. J'avais pas beaucoup d'amis ; je n'étais intégré dans certains groupes que parce que j'étais ami avec un type accepté et apprécié. Bon c'était pas non plus une école avec plein de racailles. D'ailleurs, anecdote amusante, l'année passée j'ai enseigné dans cette même école. C'est bizarre d'être de l'autre côté de la barrière surtout quand c'est dans l'école où l'on a grandi. J'ai pu voir des groupes de jeunes occuper les lieux où je traînais. Ça m'a fait bizarre.


Tout ça pour dire que je ne me suis pas retrouvé dans ce bouquin. Mais je ne pense pas que ce soit parce que je n'ai pas été harcelé (ou pas de la même manière si je puis oser appeler mon expérience du harcèlement). Ce sont vraiment les personnages. Pour moi, on est un peu comme dans "Beverly Hills 90210" où je ne sais quelle autre série avec des jeunes qui n'ont rien à voir avec la réalité. Pourtant ici, ils ne sont pas particulièrement riches, au contraire. Mais l'univers paraît tellement faux.


C'est parce que les personnages sont peu investis. Les deux héros ont leur caractérisation, mais je la trouve pauvrement exploitée, le traitement étant un peu redondant et les situations pas toujours palpitantes (il faut attendre la moitié du bouquin pour qu'enfin ça devienne intéressant). L'auteure ne les investit pas assez, du coup leur comportement paraît par moment contradictoire. Pas dans le sens d'un personnage complexe mais plutôt dans le sens où le revirement de personnalité arrange bien les choses pour l'écrivain. Il manque donc une certaine rigueur dans l'exploitation des personnages. En plus on tombe un peu trop dans les clichés. En fait, le problème n'est pas le fait d'utiliser un cliché mais plutôt de ne rien en faire. Quand l'auteure me raconte que Sam est super beau, super parfait et qu'en plus d'avoir un corps de rêve il lit de la philo... j'me dis qu'on nage en plein fantasme d'adolescente. On s'en fout de tout ça, ça n'est jamais exploité, jamais détaillé, quelle importance ? Quand on nous explique que Sam est un lâche, c'est également agaçant car les scènes sont abordées très (trop) frontalement et le personnage passe son temps à s'auto-analyser sans agir. Mais l'auteure ne parvient jamais à basculer dans la décision, elle reste seulement dans l'explication un peu vague, un peu foireuse. Si bien qu'on ne comprend pas pourquoi le personnage met autant de temps à abandonner son seul défaut (la lâcheté).


Il y a un passage qui m'a bien fait rire : quand elle pense que le mec est un pervers et va la poursuivre, il l'appelle par son prénom et... ça suffit à la faire s'arrêter? Héhé, un bon conseil pour les violeurs, si votre victime vous échappe, pensez à l'appeler par son prénom, ça la stoppera immédiatement. Dire que vous avez tué son père aussi fonctionne bien (ça, c'est déjà un peu plus compréhensible).


Les deux personnages principaux sont insupportables. Le mec parfait et la fille parfaite (elle est 'grosse' selon certains mais ça n'est pas tellement mis en valeur). Ils ont de bons goûts, ils sortent du lot. En même temps, c'est là ce que pensent beaucoup d'ado, je veux dire c'est ainsi qu'ils se voient, différents des autres. Deux possibilités de traitement s'ouvraient à l'auteure : soit montrer qu'ils se croient différents mais ne le sont pas, soit montrer qu'ils sont vraiment différents, que leur ressenti, leur mépris envers les autres soit justifié. Il y a d'autre solutions, mais de mon point de vue, les deux proposées sont les plus intéressantes. L'auteure choisit l'option 2, j'ai l'impression, mais ne les rend pas assez spéciaux (à part le fait que le mec ne lise que de la philo, pas de fiction - ce qui ne l'empêche pas de citer des romanciers d'heroic fantasy au début, soit dit en passant - et qu'ils écoutent autre chose que le top 50 du village - les références aux groupes 'cool' des années 70 et 80 sont un peu trop encombrantes d'ailleurs). En fait, cette tendance à vouloir rendre les deux protagonistes si différents n'est pas sans rappeler la saga "Twilight" : oui, voilà, ce bouquin, c'est du sous-Twilight, du Twilight pas inspiré. Parce que dans "Twilight", au moins, il y a des vampires (qui brillent au soleil en plus ! si ça c'est pas de l'originalité...).


Les personnages secondaires sont pires. On est dans un monde totalement binaire : les autres, ce sont des méchants à deux ou trois exceptions près. Ces citadins arriérés et persécuteurs, ils m'ont fait penser aux villageois d'un vieux RPG (je dis vieux car je suppose que ce genre de défaut a été corrigé dans les jeux vidéos récents) : ils n'ont qu'une chose à dire, à faire, une fonction qui les détermine. Dans un jeu ça ne gêne pas trop, mais dans un bouquin, ça dérange un peu. Il n'y a aucune nuance dans cet univers. Je n'ai rien contre le manichéisme mais au vu de la gravité du sujet, j'attendais un peu plus de délicatesse ou de distanciation ou de nuance. Là on est dans le bon gros téléfilm à thématique qu'on diffuse au cours de morale(philo) pour ensuite discuter d'un sujet de société avec les élèves.


Je vais même plus loin : on dirait que l'auteure n'aime pas ses personnages secondaires, que seuls ses deux principaux comptent : on sent une sorte de mépris ou de désintérêt. Et quand elle s'y intéresse ça passe plus pour de la condescendance. Ce n'est peut-être pas le cas, mais le fait qu'elle s'en occupe si peu donne cette impression (surtout qu'elle leur colle une étiquette de harceleur sans essayer de comprendre ce comportement).


Et le comportement de certains n'est carrément pas crédible. Ainsi, à l'enterrement, le fait que tout le village se déplace alors que plus tôt, lors de l'incendie personne n'est venu, ça ne passe pas. La psychologie de masse n'est pas assez développée pour rendre ce revirement plausible (l'excuse de la mort ne peut pas fonctionner juste comme ça parce qu'on l'a décidé, ça doit se préparer, se travailler).


À nouveau, je dois bien avouer avoir rigolé : le comportement des méchants tortionnaires est à la limite de la parodie. Dans un premier temps ça m'a fait penser à ça : https://www.youtube.com/watch?v=jTYZek5RWnc
Puis à ça : https://www.youtube.com/watch?v=ipsPgNEmAXI (du moins pour l'arrivée en bicyclette des méchants). Il y a un côté parodique tant c'est traité avec lourdeur au premier degré, sans aucune nuance, Ryan étant la cerise sur le gâteau (quoique la scène de repas avec la maman de Sam qui joue la Gestapo envers Sara aussi est extra).


Citer les prénoms me fait penser également qu'on a ici un choix de prénoms qui fonctionne assez mal du début à la fin. Ils sonnent tous faux. Pierre, Paul, Sam, Sara, Maud, ... je ne sais pas, ça ne colle pas, c'est trop basique, ça prive les personnages d'une histoire supplémentaire. À nouveau je reproche donc un manque d'investissement au niveau des personnages, des prénoms plus en phase avec notre époque, pas des vieilleries du siècle dernier (ou alors le village est vraiment très arriéré, coupé du monde, mais l'auteure n'en joue pas non plus ...).


Mais est-ce réaliste? Pas vraiment. Le côté intime passe complètement à la trappe, on est en plein show hollywoodien. Cela m'a rappelé du Musso ou du Dan Brown. Je supporte assez mal ce genre d'effet dans un bouquin. Parce qu'un bouquin demande plus d'investissement qu'un film, laisse plus d'occasion de réfléchir, du coup si c'est con, faut que ça soit au moins assumé comme tel. Mais là, tout le long, j'ai eu la sensation que l'auteure prenait au sérieux ce récit, alors que ça vire clairement au nanar par moment. Pour en revenir au côté réaliste, intime plutôt, c'est dommage, car il manque une profondeur au récit. Au final, je n'ai même pas envie de m'interroger sur le harcèlement, tout ce que je vois ce sont des paillettes.


Je suis étonné que certaines choses ne soient pas abordées ; les portables et les ordinateurs semblent ne pas exister dans cet univers, par exemple. Ce n'est pas un mal en soi, après tout, l'auteure choisit de quoi elle veut parler. Mais c'est tout de même surprenant surtout de nos jours (et ça se passe de nos jours je pense au vu des références sur des séries télé ou bouquins) où le harcèlement fait beaucoup plus de victimes par le biais de facebook, des SMS, et Cie. En même temps on devine les personnages au-dessus de tout ça, mais bon. C'est un peu étrange. Cela crée un manque en fait.


L'auteure a peut-être été victime de harcèlement, et peut-être que cela a servi de base à son récit. Mais comme ça n'est pas complètement autobiographique (ça me paraît trop 'boom boom' pour l'être), il est regrettable qu'elle n'ait par conséquent pas fait davantage de recherches sur le sujet. Parce qu'au final, aussi sincère puisse être l'auteure, je n'ai pas l'impression que tout cela soit plausible, tiré d'une histoire vraie, d'un fait réel. Juste parce que ça paraît trop abracadabran et qu'elle ne s'intéresse jamais vraiment au harcèlement ni à ses personnages au-delà des fantasmes véhiculés.


Parce qu'il est vrai que les scènes de harcèlement sont assez pauvres, les moqueries sont basiques (elle est grosse... et c'est tout ce qui alimente cette crise ? parce qu'il n'y a pas tant d'allusions que ça à son histoire familiale qui semble plus propice à des commentaires dégradants). De temps en temps un petit coup bas sort du lot, mais la plupart du temps ils sont vite expédiés et peu inspirés. On ne pénètre pas assez le côté harcèlement pour le coup, ni du point de vue des persécuteurs (qui n'est pratiquement jamais abordé) ni de celui ds persécutés (ce qui est triste).


En fait, rien n'est approfondi. Il y a des passages assez incroyables où on enchaîne plein d'événements-éclairs, c'en devient absurde. Parce que l'auteure ne prend pas la peine de développer l'action ni les causes, ni les conséquences. Tout va trop vite : elle s'arrête à l'idée qu'elle a, ne développe aucun 'argument', comme si son avis était tranché sur la question. Je pense à la scène du cutter aussi, un autre moment explosif, éclair, qui est vite expédié et qui arrive de nulle part ce qui provoque forcément le rire ! (Décidément, il faudrait faire un spin off sur ce personnage, il est fabuleux, surtout lorsqu'il fait sa révélation dans le meilleur moment qui soit, en plein milieu d'une tentative de viol ! ) Parce que ce genre d'information, c'est bien de les préparer si l'auteure veut vraiment les utiliser (une question se pose alors : était-il vraiment nécessaire de le lier à cette intrigue passée?) ; en l'état on est dans un débordement gratuit, ça provoque le rire à un moment dramatique. Et comme ce n'est absolument pas exploité par la suite, on tombe dans le cliché mal exploité, celui qu'on pointe du doigt, celui qui fait dire aux gens : j'aime pas les clichés (alors que les clichés sont très utiles pour comprendre une histoire).


En fait, vous l'aurez compris, j'ai beaucoup ri durant la lecture. C'est ce qui m'a sauvé de l'ennui quelque part (ce qui est une bonne chose). Parce que le récit n'est pas terrible en soi, peu inspiré comme dit plus haut. Mais c'est traité avec des sabots si gros que ça en devient grotesque. En fait, on dirait une parodie ! Je m'en excuse mais je n'arrive absolument pas à prendre ce roman au sérieux. L'auteure accumule la misère en peu de lignes, c'est assez impressionnant, puis passe à des moments de joie comme si de rien n'était. Et revient à nouveau avec ces perturbations-éclairs qui font qu'on n'est pas sûr d'avoir bien lu (cette fois, je repense à la tentative de suicide éclair avec le train, c'est tellement inattendu, un autre moment comique mémorable). Les dialogues aussi sont très brefs, pas assez approfondis, bourrés de lieux communs. C'est tellement superficiel comme traitement pour un sujet aussi grave. Mais si c'était assumé comme tel ça passerait, mais on sent bien que c'est censé être profond.


Et puis l'auteure use parfois de grosses facilités : lorsque Sara explique la tentative de viol de Ryan qui a eu lieu au début du récit, c'est comique car on n'en avait plus parlé beaucoup depuis ce moment-là, à croire que l'auteure aussi avait un peu oublié... et s'en servir pour motiver un personnage et faire avancer le récit, c'est un peu facile (un peu comme quand un personnage range un revolver de façon bien évidente en début de récit et qu'on devine quand il le ressortira à la fin). Les réconciliations après la grosse dispute sont un peu trop rapides aussi (faciles, convenues), mais à nouveau c'est parce que l'auteure ne développe rien.


Il y a aussi des choses que je n'ai pas trop compris : leur plan pour la soirée était très stupide, je n'ai pas compris pourquoi ils voulaient faire ça. C'est une idée tellement foireuse... qu'espéraient-ils faire exactement ? Je sais que les perso sont des ado un peu cons mais là c'est plus un choix de l'auteur qu'un choix des personnages, c'est vraiment étrange comme décision. D'ailleurs rien n'est développé... je ne sais vraiment pas ce que Sam a pu dire à Eléna pour faire diversion sans se faire jeter comme un malpropre... et on ne le saura jamais puisque l'auteure a l'intelligence d'adopter le point de vue de Sara à ce moment-là.


Malheureusement je n'ai tout de même pas assez ri pour mettre une meilleure note, mais assez pour ne pas non plus plomber la moyenne du bouquin. Parce que ce qui compte, à mes yeux, c'est le résultat et ce indépendamment des volontés (qu'on ne peut que deviner, interpréter, extrapoler) de l'auteure.


Et puis en plus, si ça vire au n'importe quoi, il y a au moins des conflits. Parce qu'une erreur récurrente des jeunes auteurs (peu importe le support) c'est de vouloir raconter un truc profond sans qu'il ne se passe rien de tout le récit. Ici, les personnages en bavent et les obstacles ne sont pas tous surmontables (même s'il reste une bonne dose de misérabilisme en toile de fond) ou bien axés de manière à ce qu'ils soient surmontables. Et si le côté spectaculaire nuit à la sincérité du projet, ça permet au moins de divertir le lecteur comme un cochon qu'on nourrit grassement. Et puis vraiment, j'insiste, on rigole bien. La scène finale, c'est l'apothéose. Après on se marre un peu durant l'épilogue où l'on découvre l'héroïne transformée par cette expérience mais c'est déjà trop lourd quand même et trop attendu (forcément, la mort du mec était ce qu'il pouvait arriver de mieux pour un happy ending tandis que la mort de la nana aurait plongé le bouquin dans un misérabilisme sans nom).


Passons maintenant à l'aspect technique. Ce n'est pas très bien écrit. Je suis difficile en littérature, je préfère un style qui n'est pas passe-partout. Prenons Marc Levy : en soi c'est un bon rédacteur, on comprend ses idées, mais ça me fait plus penser à un travail scolaire qu'à un vrai style. Ici c'est pareil. Mais en moins bien que Marc. Parce que c'est parfois ampoulé, que certaines tournures de phrases sont bizarres, cassent la simplicité du rythme instauré jusque là. Cela manque d'une relecture, d'un retravail ; il y en a sûrement eu mais on ne le sent pas. C'est surtout gênant pour les premiers paragraphes où le concept (1ère et 3ème personne) est mal exploité et j'ai eu l'impression que l'auteure s'embrouillait un peu dans le choix du temps. Par la suite ça se calme. Quoique, sur la fin, je n'ai pas trop compris pourquoi on en revenait à la première personne pour le point de vue de Sara. D'ailleurs je ne sais pas pourquoi le côté Sara est à la 3ème personne... pour créer une distance ? mais pourquoi? Ce genre de concept maniéré un peu gratuit, ça me fait aussi penser à du Marc Levy. D'autres ont dû le faire, mais ici, exploité de la sorte, ça me fait penser à cet auteur prolifique que je n'apprécie pas.


Les descriptions, c'est ce qui permet d'aimer un auteur, parce que c'est là que le style va s'affirmer. Ici, je les ai trouvées souvent vaines, gratuites (comme lorsqu'on apprend que le papa est roux, ça arrive au milieu de nulle part, comme si l'auteure n'avait pas trop su où mettre cette information, ou bien qu'elle avait agit spontanément, par association libre, sans prendre la peine d'y réfléchir même a posteriori).


Le seul moment où les descriptions sont un peu mieux gérées, c'est lors des scènes de sexe. On dirait que l'auteure prend un pied pas croyable dessus ! Et c'est tant mieux parce que ça se ressent, ça se communique, et là j'ai pu percevoir un bon boulot d'écrivain. Bon, c'est beaucoup trop romantique, pas assez réaliste, mais au moins les mots sonnent justes, les constructions paraissent logiques, adéquates. Il faudrait que l'auteure parvienne à trouver la même énergie pour n'importe quelle autre description. En plus, dans ses descriptions, l'auteure se perd dans certains automatismes et lâche des détails qui surprennent : quand Sam parle de sa mère qui a perdu sa joie de vivre... c'est un long paragraphe descriptif et cette phrase paraît de trop car ce n'est pas du tout le portrait qu'on s'est fait de sa mère jusque là.


Notons également quelques coquilles regrettables. En même temps ça me rendrait dingue de devoir me relire si j'écrivais un roman, c'est pour ça qu'il faut absolument faire relire à un maximum de gens. Même si c'est intimidant et gênant, c'est indispensable à faire. Je trouve la table des matières assez comique à regarder aussi au vu des noms de chapitres... en fait une table des matière doit pouvoir aider à s'y retrouver, mais là... difficile de savoir à quoi correspond tel 'Sam' ou telle 'Sara'. Et enfin, la couverture est moche : il y a un côté 'ado qui dessine' ; les proportions ne sont pas justes (mais on sent que ça se veut réaliste dans le style manga), le texte est mal intégré. En soi l'idée narrative n'est pas mauvaise mais l'exécution est un peu pauvre techniquement.


Un mot sur le message tout de même : en soi, je n'ai rien contre un récit qui parle du harcèlement, évidemment, mais traité ici, je dis que ça n'est pas correct, que ça ne rend absolument pas service au sujet. L'auteure aborde trop de thèmes et n'approfondit pas assez celui du harcèlement, du coup, il est difficile d'y voir un discours bien construit. Mais le plus étrange, c'est de lier l'histoire de harcèlement à celle de la mort du père, du deuil. En faisant de la sorte, l'auteure minimise grandement l'importance du harcèlement, donne l'impression que ça n'est qu'une conséquence d'un autre mal-être. Parce que le harcèlement n'est pas traité pour ce qu'il est. J'avais d'ailleurs exprimé mon ressenti par rapport à la scène finale, lorsque Ryan fait sa petite révélation, ça parasite totalement le moment présent, ce que l'auteure raconte (le persécuteur qui va au bout de sa démarche) ; à jongler avec les deux thèmes, elle se prend les pieds en plein dedans et échoue à parler convenablement de quoi que ce soit. Enfin, il y a l'aspect misérabiliste qu'il est bien difficile d'éviter avec de tels sujets : tous ses thèmes dramatiques sont développés avec lourdeur là où une certaine légèreté aurait permis de mieux faire sortir le drame (vive le contraste), le récit devient donc très vite indigeste ou... risible à force de toujours appuyer gratuitement sur le drame.


Bref, j'ai pris le bouquin au second degré, ce qui m'a permis de ne pas m'ennuyer. Au premier degré, c'est trop ampoulé, trop naïf, trop misérabiliste, trop superficiel. Heureusement, il reste des scènes de sexe qui amènent une vraie libération, un vrai souffle à la lecture. Sans pour autant espérer qu'elle ne fasse plus que de l'érotisme, il serait bien qu'elle trouve le moyen de déplacer cette énergie, cet enthousiasme pour d'autres scènes. Et au vu de ce qu'elle sait faire dans ces passages, je suis sûr qu'elle peut faire mieux. Dans tous les cas, ça se lit très vite et ça c'est quand même pratique pour un bouquin à lire sur un ordinateur (quand on n'a pas de liseuse).

Fatpooper
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le 25 juil. 2017

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