« Alexandre Yersin 1863-1943 »
Né en Suisse. Très tôt orphelin de père, il part pour l’Allemagne. Puis ce sera l’institut Pasteur où il découvrira la toxine diphtérique. Devenu médecin (et français), il œuvrera en Asie pour les Messageries Maritimes avant d’enfiler les habits de l’explorateur le temps de tracer un chemin de l’Annam au Cambodge. C’est finalement au Vietnam, à Nha Trang qu’il créera une cité utopique devenue aujourd’hui une station balnéaire fréquentée par les milliardaires russes et asiatiques. Chercheur, médecin, ethnologue, agriculteur et géographe, Yersin aura vécu mille vies. Surtout, il restera dans l’histoire comme celui qui a découvert et vaincu le bacille de la peste.

Un drôle de personnage que ce savant autodidacte d’une curiosité insatiable et d’une ingéniosité sans pareille. Solitaire, misanthrope, il aura passé près de 50 ans dans un chalet perdu en pleine jungle. Membre historique de « la bande à Pasteur » avec Roux et Calmette, il restera constamment à la marge, préférant les recherches individuelles aux travaux collectifs. Se méfiant comme de la peste des idéologies et de la politique, il traversera les horreurs du 20ème siècle avec une certaine distance, en ermite. Yersin meurt avant les attaques japonaises sur le Vietnam. Jusqu’au bout, il sera resté à l’écart de la folie des hommes.

Je ne suis d’ordinaire pas fan des biographies. Celle-ci m’a tout simplement enthousiasmé. Peut-être parce qu’elle ne ressemble en rien aux biographies habituelles. Patrick Deville est écrivain et non historien, c’est ce qui fait toute la différence. Faisant fi de la chronologie, il tricote son texte dans un désordre parfaitement maîtrisé, alliant l’érudition à une pointe d’humour bienvenue. Il n’hésite pas non plus à mettre en scène le « fantôme du futur », narrateur enquêtant dans les lieux fréquentés par Yersin, un carnet à couverture en peau de taupe à la main. Au-delà du portrait du génial découvreur du bacille de la peste, l’auteur dresse celui d’une époque où les aventuriers avaient encore de beaux jours devant eux, « où la nature n’est pas encore une vieillarde fragile qu’il faut protéger mais un redoutable ennemi qu’il faut vaincre. »

Patrick Deville écrit comme on explore. Sa langue est belle, sa plume affutée donne au roman le mouvement et le souffle qui emportent le lecteur. Il y a dans son propos beaucoup d’élégance, de précision et de virtuosité, la force d’un écrivain sûr de son art et qui ne tombe jamais dans l’esbroufe. Mon premier vrai coup de cœur de la rentrée littéraire !
jerome60
8
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le 9 sept. 2012

Modifiée

le 9 sept. 2012

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