Je me lance pour écrire une critique de ce roman...et c'est pas simple.

Le texte, très dense, se situe au moment de la bataille de Stalingrad en 1942. L'auteur, journaliste sur le terrain à cette époque, est témoin du drame humain qui se joue mais aussi de la réalité d'un système politique auquel il avait adhéré à l'origine et qu'il critiquera violemment.

Si l'ame du roman russe est présente dans ce livre, c'est parceque le vrai héros du livre reste toujours largement le peuple russe et, malgré les 1000 pages parfois soporifiques, on suit jusqu'au bout sa résistance à l'Histoire qui le fait souffrir.

Les longues descriptions de la vie militaire (déplacements, organigrammes, approvisionnement, armement, quotidien des soldats...) des Soviétiques, mais aussi des Allemands, forment la majeure partie du roman qui fait ressentir à la fois toute la souffrance de ces hommes envoyés à la mort mais aussi l'espoir (ou la naiveté) et l'héroisme qui les maintiennent en vie...

Le récit de guerre alterne avec la chronique du destin des personnages pris dans ce tourbillon historique qui secoue le pays, en particulier une famille vivant à Stalingrad. Au-delà du quotidien, des déplacements à travers l'URSS et de la mort qui est présente dans chaque famille, c'est la société communiste et son fonctionnement qui sont décortiqués et, implicitement, critiqués.

Les grands élans patriotiques de l'époque y sont en effet confrontés à la lacheté, ou à l'individualisme des hommes qui arrivent à garder un minimum de libre arbitre dans une société qui voudrait tout uniformiser, à l'attachement des plus agés à l'ancienne Russie et à ses traditions, mais ils sont aussi comparés au nazisme qui a conquis l'Allemagne et une partie de sa population.
Le chapitre sur l'arrivée d'Hitler au pouvoir, à sa folie et au système qu'il a mis en place est impressionant, on regretterait presque le parallèle sur les élites staliniennes mais on peut comprendre que Grossman, à cause de la censure, n'ait pas traité le sujet.

Cette première partie d'une saga familiale et historique digne des plus grands auteurs russes est suivie par le roman Vie et Destin.
louisa
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le 17 août 2012

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louisa

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