Le hasard fait parfois bien les choses. Mais pas toujours apparemment. Tanguy (ou l’auteur lui-même puisqu’il s’agit d’un récit d’inspiration autobiographique) n’a en effet pas été favorisé par le sort durant ses vingt premières années.
Né en 1933 dans la toute jeune république espagnole, il va connaître les affres d’une terrible guerre civile avant même l’âge des premiers souvenirs. L’activité politique de sa mère conduit celle-ci à fuir le franquisme avec Tanguy sous le bras. C’est en 1938 que mère et fils s’installent en France, ce pays de paix et de liberté (sic). Ce pays où bientôt le statut de réfugié politique se révèlera à peine plus enviable que celui de juif. Abandonné, l’enfant tombe dans une rafle allemande en 1942 et se retrouve déporté dans un camp de concentration en Allemagne. Il survit miraculeusement après avoir fait au lecteur un récit comparable à celui de Primo Lévi dans « Si c’est un homme ». A la fin de la guerre, l’enfant, âgé de 12 ans regagne l’Espagne où plus personne ne l’attend. Le sort poursuit son cruel acharnement : Tanguy est placé dans un orphelinat digne d’un bagne. Lui qui n’a jamais éprouvé de haine contre les nazis connaît alors une rage d’une infinie violence. Il se rebelle, tient tête et finit par s’évader.
Mais ce parcours kafkaïen est néanmoins parsemé de touches de couleur. Sa route croise celle de quelques hommes et femmes qui ont pallié aux manquements des ses propres parents : Günter, d’abord, qui prit soin de lui durant la guerre ; le père Pardo ensuite qui le recueillit dans son collège jésuite andalou après son évasion de l’orphelinat et qui lui permit d’acquérir une solide culture ; madame Sebastiana enfin qui le considéra comme son fils durant son séjour à Sitgès. Bonheur toujours fugace qui lui permit de « tenir » et de ne pas perdre sa foi du genre humain. Car Tanguy ne s’est finalement jamais départi d’une certaine philosophie utopique qui lui fit aimer cette vie qui l’avait tant éprouvé.
Un livre écrit simplement mais relatant une existence profondément meurtrie par une époque particulièrement bouleversée. On n’en finit plus de souffrir aux côtés de ce gamin tantôt courageux, tantôt résigné. Une lecture difficile qui malmène personnages et lecteurs mais qui s’achève toutefois sur une note positive grâce à ce Tanguy qui parvient à chaque fois à redresser la tête et à repartir de l’avant. Un phénix renaissant de ses cendres.
BibliOrnitho
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le 4 oct. 2012

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