Critique de Tu montreras ma tête au peuple par Gillou

En refermant le livre de François-Henri Désérable, il reste entre mes mains plusieurs réflexions dont j’aurais aimé faire part à l’auteur. Peut-être lira-t-il un jour ces quelques lignes, le hasard - pas plus que la guillotine - ne semblant épargner personne.
En ouvrant *Tu montreras ma tête au peuple*, il se passe un phénomène assez étrange. Alors que toute l’oeuvre s’articule autour de la décapitation, c’est pourtant bien un démembrement que j’ai ressenti. Le corps reste là, confortablement installé dans un canapé, un lit, un transat, ou quelqu’autre apparat à accorder au gré des saisons et des frivolités. L’esprit, lui, pourtant, s’évade. Il accomplit l’exploit ultime : remonter le cours du temps. Projeté deux-cents ans en arrière, voilà notre esprit qui se questionne sur ce que d’autres (éteints pourtant depuis longtemps) ont pu penser, eux aussi, quand la mort était si proche. L’oeil lui-même se disperse. Il s’évade des pages pour observer le paysage qui l’entoure, et alors, curieusement, s’amuse à le vieillir de plusieurs siècles. Plus terre à terre, la mémoire, elle, nous réprimande. Elle nous reproche ces lacunes sur l’Histoire de France qui jusqu’à présent, n’avaient jamais paru aussi vertigineuses.

A présent, tout notre corps s’éparpille, pourtant sans cordes, ni chevaux, alors que les pages se tournent une à une pour nous conter les pensées funestes des grandes âmes suppliciées de la Révolution Française.


L’auteur ne révolutionne pas le roman historique, et n’est pas non plus le premier à recourir à la fiction pour broder autour de faits véridiques. En revanche, il en change la définition. Ou plutôt, il vient l’alléger d’un adjectif qui lui collait à la peau : barbant. *Tu montreras ma tête au peuple* n’a rien de barbant. L’auteur ne nous perd pas dans une période trouble, il l’éclaire. Il ne nous ennuie pas, il nous dépayse. Il ne nous enseigne rien sur ses personnages, il nous les présente, tout simplement. Et, après les avoir salué tous les dix, on repose ce livre avec l’impression de les avoir connu, Danton, Sanson, Chénier, chacun d’eux nous a traversé, nous a interpellé, par leur grâce comme par leur cruauté. 

Si chaque roman historique nous donnait cette même envie, non pas de refermer - au désespoir - le livre après quelques pages lancinantes, mais d’en ouvrir un autre, de combler nos lacunes et s’immerger encore et encore dans ces périodes lointaines ; alors peut-être nos bibliothèques en seraient-elles d’avantage remplies.


PS : Quitte à - pourquoi pas - les faire déborder jusqu’à notre palier ?

CamilleGlt
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le 16 août 2020

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