J’ai un problème et il s’appelle Jean-Bernard Pouy. Je vous jure pourtant que je me soigne. Mais rien n’y fait. Les infusions de Belle Prose, les cures de Littérature qui pose, les bains de pied, tout ça, c’est peau de balle. Jibé, je l’appelle ainsi tant notre relation s'avère fusionnelle, est à mes yeux, soit un génie, soit Dieu sur Terre. Quoi qu’il fasse, dise ou écrive, je ne peux m’empêcher de le lire et de l’admirer. Et pourtant, vu sa cadence, il en a produit des trucs médiocres.

Dernièrement, j’ai succombé à sa brève Histoire du Roman Noir. L’ouvrage n’a rien d’un essai, contrairement à ce que laisse présager le titre. Il s’apparente davantage à une bibliothèque idéale dotée de quelques réflexions personnelles bien senties issues du fruit de ses cogitations bilipotiennes. Cerise sur le gâteau : l’ouvrage s’achève par une nouvelle intitulée Sauvons un arbre, tuons un romancier ! Ceci donne une idée de la tonalité du truc.

Eh bien, figurez-vous que ce bouquin est délectable. Quelle surprise ! Je vous prie de simuler l’étonnement. Tout d’abord, Jibé nous livre une sélection tout à fait recommandable de romans tous plus réjouissants les uns que les autres. On glane, au passage, une série de noms d’écrivains indispensables ; des anciens et des jeunes, des morts et des vivants, des Anglo-saxons et les autres. De quoi alimenter une copieuse liste.

Personnellement, j’ai ajouté à ma PAA (pile à acheter) : Robert Stone, Newton Thornburg, Stephen Dobyns, John Trinian (dont Jibé nous dit qu’il a sans doute inspiré Le Lézard lubrique de Melancoly Cove de Christopher Moore), Curt Siodmak (un truc zarbi de cerveau criminel baladeur), James Sallis, Thomas MacGuane et Carlo Emilio Gadda (avec un roman dont le titre est tout un programme : L’Affreux Pastis de la Rue des Merles).

Rien de conventionnel dans la présentation de l’objet. Certes, on trouve une introduction (intitulée Empoignons la bête), une conclusion (Noir devant !) et une bibliographie des romans et auteurs classés dans leur ordre d’entrée en scène. Toutefois pour le reste, c’est un chapitrage à la Jibé. On commence ainsi avec les aiguilleurs (les auteurs, morts et vivants, qui ont fait école), puis le sommaire défile en alignant les forcenés, les pessimistes (voire nihilistes), les allumés (et autres freaks), les étoiles filantes et les intellos (les auteurs de « la blanche » venus au noir par goût). C’est complètement subjectif, évidemment pas exhaustif, mais la démarche est assumée du début jusqu’à la fin.

Enfin, Jibé nous emballe le tout avec son art habituel de la formule, genre : « Harry Crews est le Jérôme Bosch du roman noir », et une gouaille qui ne cherche pas à faire chic et atteint son but.

Pour toutes ces raisons, Une brève Histoire du Roman Noir se doit de figurer dans toutes les bibliothèques de néophytes. Après, ils pourront s’attaquer au Dictionnaire des littératures policières.
leleul
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le 30 oct. 2012

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