Babylon 5. Numéro 2 dans mon top 10, j’aurais du en écrire la critique quand je suis arrivé sur le site, mais infâme procrastinateur que je suis j’en ai longtemps repoussé l’échéance. Du coup ce sera sans doute plus froid et moins passionné que ça aurait pu l’être. Il faut dire que j’avais été déçu que la série soit peu connue sur SC ; on trouve bien plus souvent des Oz, The Shield et autres The Wire dans les top 10. Mais baste, tant pis c’est la vie.
Babylon 5 est une série de SF de 5 saisons créée par Joe Michael Straczynski (que j’abrègerai après en JMS), et diffusée en France de 95 à 99 sur Canal+. Le pitch, repris texto de wikipédia :
En 2258, 10 ans après la guerre entre l'Alliance terrienne et la Fédération minbarie, Jeffrey Sinclair prend le commandement d'une station spatiale appelée Babylon 5. Située dans une zone neutre de l'espace, elle accueille les représentants des différentes races composant la communauté galactique, et regroupe au sein d'un Conseil les cinq principales puissances et la Ligue des mondes non alignés qui sont décidées à maintenir la paix et la prospérité dans la galaxie.
Mais la mission de Sinclair, puis celle de John Sheridan, s'avère particulièrement difficile à cause des conflits entre les différentes races (les Centauri (en)s contre les Narn (en)s) et des dissensions internes (chez les Minbaris et aussi sur Terre). Petit à petit, des indices semblent prouver l'existence d'une race aux desseins destructeurs, les Ombres.
L’idée de départ de JMS était un peu folle pour l’époque : produire une sorte de « roman télévisuel » qui ait un début, un milieu et une fin. Un récit où les épisodes de début pourraient se revoir à la lueur de ceux de la fin.
Ce roman reprendrait certains des ingrédients traditionnels du space opera et de la science-fiction et verrait évoluer les personnages au milieu de conflits entre différents peuples de la galaxie.
On ne va pas se mentir, pour quelqu’un qui a ingurgité en masse les séries des années 2000, Babylon 5 n’est pas très engageante, pour plusieurs raisons simples : la première saison est constituée en majeure partie d’épisodes stand-alone, les décors et les personnages sont kitsch, le jeu d’acteur est d’un style théâtral dépassé et n’est pas encore optimal... Pour ne rien arranger à l’affaire les effets spéciaux sont balbutiants avec le défaut traditionnel que cela implique : la texture est trop lisse.
On aurait tort de se décourager car il y a également de très bonnes raisons de visionner cette série. Ses deux grandes forces sont sans aucun doute les personnages et le scénario. Le scénario qui avait été pensé pour un ensemble de quatre saisons à l’avance, et a du juste être légèrement ré-étalonné, la série ayant été prolongé à la dernière minute pour une cinquième et dernière saison. On évite ainsi l’écueil de situations de moins en moins crédibles au fur et à mesure que l’on avance, écueil que des productions plus modernes n’ont pas toujours su éviter malheureusement. En outre, ce scénario était si bon que la Paramount s’en est fortement inspiré pour produire sa propre série « Star Trek Deep Space Nine ». JMS leur avait en effet soumis ses scripts avant de le proposer à la Warner et a déclaré après coup que le plagiat était probable même s’il n’a pas lancé de poursuite, voulant se focaliser sur sa propre série. D’un point de vue de spectateur, on peut se dire que ça nous fait deux bonnes séries au lieu d’une seule, tout ça étant après tout une affaire entre JMS et la Paramount…
Dire que les personnages sont l’autre force de la série est plus surprenant. Mais JMS nous offre une galerie de personnages qui ont chacun un caractère bien trempé, avec des qualités mais aussi des défauts bien réels (difficile d’en dire plus sans spoiler, cela dit). Contrairement à StarTrek (que je connais mal mais dont on m’a un peu parlé ;)), le futur de Babylon 5 n’est pas utopique et l’individu (quelque soit le peuple auquel il appartient d’ailleurs) reste en proie à ses démons intérieurs. Et pour cela le fait que la série date des années 90 a aussi ses avantages : pas de personnage misanthrope cynique limite sociopathe pour faire « style », pas de personnage qui en vient à désespérer dans la dernière ligne droite pour donner de la soi-disante profondeur psychologique, pas de scène vulgaire, non rien de tout ça. La philosophie de la série reste humaniste, lucide mais humaniste. Terminons sur ce point en remarquant que JMS sait faire évoluer ses personnages et de façon ô combien crédible (je reste général pour pas spoiler). Vous aurez des surprises…
Enfin je terminerais en faisant remarquer que la série n’est pas qu’équilibres géopolitiques (il ne faut d’ailleurs pas trop appréhender cela, il n’y a pas besoin d’avoir fait une thèse sur le sujet ;)) et stratégies militaires abstraites qui ne se déroulent que dans la station.
A partir de la saison 3, les effets spéciaux sont de bonne tenue (presque au niveau des premières saisons de Stargate), le scénario devient très dense et l’histoire devient de plus en plus épique. Si vous rêvez de batailles décidant du sort de races entières et de planètes, à la manière de celles du Seigneur des Anneaux, je peux vous dire sans trop spoiler que vous allez en avoir. Ce n’est pas d’ailleurs pas par hasard que je parle du Seigneur des Anneaux. Beaucoup ont remarqué nombre de similitudes avec le roman de Tolkien, aussi bien dans les sonorités de noms, dans la répartition entre les différentes races, et jusque dans certains éléments du scénario. JMS a assumé la référence mais aussi expliqué qu’elle avait été en quelque sorte mal comprise : pour lui c'était une sorte de "guide" ou "template" mais pas non plus "isomorphe" pour reprendre son propre terme. En outre, et là je pense que cela « rassurera » certains, il faut savoir que JMS est athée et même si à travers certains personnages on sent qu'il est fasciné par la religion, il ne plaque pas pour autant des schémas judéo-chrétiens (Tolkien non plus à mon sens, mais ça lui a été reproché). Et puis bien sûr Babylon 5 comprend également des références à bien d’autres choses que le Seigneur des Anneaux…
Je vais m’arrêter là, c’est déjà beaucoup même si on pourrait encore dire bien des choses. Oui le jeu d’acteur est d’un autre temps, oui il y a du kitsch (ça ne devrait pas faire peur à des fans de Doctor Who ;)), mais pourtant cette série mérite qu’on s’y attarde, car elle a été menée de main de maître jusqu’à la fin.
Allez, emballé c’est pesé, 41è critique…
