Elementary
6.1
Elementary

Série CBS (2012)

Les Aventures de New-York Holmes et du bon Docteur Yun Jingyi

(à Ratdebibli, qui n'abondera pas toujours dans mon sens et jugera à raison cette critique bien longue, et à MG et MF, deux amis qui, comme Ratdebibli, ont su m'encourager à aller voir Elementary)


                                                                 ***

Elementary, qu'est-ce ?
Sherlock Holmes à New-York sans Roger Moore mais avec le petit-fils du patron de James Bond.
A vrai dire, Elementary, c'est surtout une réécriture moderne du mythe de Conan Doyle, délocalisée aux USA, attirée par la mode de la fiction cinématographique ou télévisuelle dite inclusive, mue par un écart esthétique souvent sauvage qui apporte un bon vent de fraîcheur aux aventures du limier de Baker Street, au risque de le perdre de vue. Car, en termes d'adaptation, trop d'originalité peut tuer l'originalité voire tuer le matériau de base.
Elementary, contrairement à son titre, n'est pas très élémentaire. Au contraire, il s'éloignerait beaucoup des fondamentaux du texte holmésien. Mais il en reprend le verbe dans les dialogues entre Holmes et Watson et sait même, dans quelques épisodes, être d'une fidélité d'autant plus redoutable et efficace qu'inattendue. De cette sorte, on peut poser sans grand risque l'hypothèse qu'Elementary aurait pu être une série dans la veine des Rivaux de Sherlock Holmes version moderne et américaine, emportant bien plus de suffrage.
Elémentaire, non ?


Pour les sceptiques et, avant tout, pour ceux et celles que l'avis intéressent, voyons point par point ce que nous nommerons l'Affaire du Doherty géant des USA et de ses illustres clients.



Le Générique



Elément extrêmement plaisant, qui, à lui seul, donne envie de visionner l'épisode, le générique est non seulement visuellement beau et intriguant mais il remplit admirablement son office. Il fait la narration métaphorique des rouages d'une enquêtes, des étapes menant de la découverte d'un problème à sa résolution.
Décrivons-le le plus simplement et le plus agréablement possible: une bille roule sur ce qui semble être une table en bois et rejoint les rails d'un circuit à bille métallique. Une fois dans ce circuit, la bille suit un parcours qui la projette dans le barillet d'un révolver. Le révolver s'avère faire partie d'un mécanisme plus grand et plus vaste composé de plusieurs révolvers partiellement amputés de leurs crosses. Le mécanisme tournant, passe l'un des révolvers pour faire place à celui qui contient la bille. Le révolver tire et la bille explose en plein vol. Une souris, sortie de nulle part, s'agite alors dans une boule grillagée qui fonctionne comme une roue et, par ses efforts, fait remonter une cloche. Sans transition toujours, une nouvelle bille est lancée dans un nouveau parcours et pousse un interrupteur. Enclenché, l'interrupteur déclenche un mécanisme doté entre autres choses d'un ciseau. Ce ciseau tranche un fil, une corde très mince. Cela a pour conséquence de libérer un marteau qui s'en vient frapper en plein visage un buste de porcelaine qu'il brise en mille morceaux épars. Dans le même temps une cage à taille réduite tombe et emprisonne une figure d'ébène. Alors, fièrement, la bille retourne rouler sur la table en bois et révèle en transparence la ville de New-York ayant une mer pour ciel.
Déchiffrons-le: Sherlock Holmes et ses acolytes se lancent dans une enquête. Ils choisissent alors une première piste pleine de promesse et accusent un suspect. Mais ce n'est pas le bon ou bien leurs preuves ne sont pas les bonnes. Voilà leur enquête, détruite en plein vol, de nouveau au point mort. Il faut s'échiner à réfléchir afin de trouver une nouvelle piste car le temps presse. Mais les efforts sont payants et sonne le glas du coupable ! Les voilà lancés sur une nouvelle piste qui va trancher le noeud gordien de l'intrigue, détruire le masque ou l'apparence de sainteté du coupable et l'envoyer derrière les barreaux. Holmes & Cie, fiers du travail accompli, reprennent leur petit bonhomme de chemin et veille sur New-York et ses eaux troubles.
Poétique, métaphorique mais efficace, c'est un excellent énoncé proleptique figuré des événements qui s'apprêtent à être narrés au spectateur.
La musique qui sert de toile de fond n'a certes pas la force du générique à la Amicalement vôtre de Sherlock ou le caractère inquiétant de la musique d'ambiance de la saga de Guy Ritchie mais c'est bien parce que Elémentary ne poursuit pas le même but que ces deux autres adaptations. La musique d'Elementary est plus entêtante, plus obstinée, reproduisant à la perfection l'acte de réflexion, de pensée de l'investigateur. Elle prête de ce fait cette obstination, ce caractère chercheur aux petites billes que nous suivons.
Et c'est là que le bât blesse. Bien que le générique soit excellent, il assimile Sherlock Holmes à cette petite bille nerveuse, obstinée, galvanisée par sa volonté de suivre les rails jusqu'à la bonne sortie. On reconnaît parfaitement le Sherlock Holmes de la série mais on lui prête les traits d'un tout autre héros que la série aurait pu mettre en scène en fait et place de Sherlock Holmes: le non moins célèbre Joseph Rouletabille de Gaston Leroux !
Conservons cet indice pour la fin de la critique; elle y aura son mot à dire.



Sherlock Drogues mais Paget's Holmes



Restons sur la figure de Sherlock Holmes pour évoquer son interprète dans Elementary et la façon dont il traite le personnage.
Il s'agit d'une vedette récurrente de Danny Boyle (Trainsporting 1 et 2, Frankenstein), qui, comme dit en préambule, est aussi l'un des descendants de Bernard Lee: Jonny Lee Miller. Fait amusant, ce Sherlock Holmes portent le patronyme d'Agatha Christie !


Là où Guy Ritchie a choisi de rappeler le passé de boxeur du détective, là où les créateurs de Sherlock ont décidé de mettre l'accent sur le grenier/palais mental évoqué dans Une Etude en rouge, ceux d'Elementary ont privilégié la face sordide plus connue du héros de Conan Doyle, à savoir son addiction à l'opium, ici remplacé par l'héroïne. Qui de mieux dans ce cas que le Sick Boy de Trainsporting pour camper le détective en rémission, pour qui Watson sera une marraine d'abstinence ?
Cela dit, Holmes use de la drogue dans les romans comme il use de la grande musique, des opéras, du théâtre et de son violon. Ce ne sont que des aides ponctuelles à la réflexion, comme la série Sherlock a su le rappeler en mettant en scène un détective estimant le nombre de patch nécessaires par affaire à résoudre. Et ce n'est d'ailleurs pas cela qui permet à Jonny Lee Miller de briller dans le rôle.
Lee Miller a une grande qualité, outre la belle humanité dont il fait montre sous le masque de monstre raisonnable. Il ressemble énormément non à la description que fait Conan Doyle de son héros mais à l'illustration validée par lui qu'en fait Sydney Paget, le dessinateur du Strand Magazine qui publie les Aventures de Sherlock Holmes. Observez son visage et ses expressions, observez sa coiffure ! Jonny Lee Miller est physiquement le parfait Sherlock Holmes de Sydney Paget. Excepté bien-sûr dans la saison 5, lorsqu'il se rase la tête et ressemble alors davantage à .... un certain James Moriarty !



Les premiers seront les derniers



La porte est étroite qui permet au cinéma et à la télévision de donner la part belle à des personnages moins connus de l'univers holmésien. C'est pourtant là l'autre point très positif de la série Elementary, la mise en avant de personnages souvent boudés au profit des plus emblématiques.
Ces personnages, ce sont par exemple Kitty Winter, le Baron Gruner, et Shinwell Johnson, protagonistes éphémères de L'Illustre client, une nouvelle qui semble avoir été le livre de chevet des créateurs de la série. Et Sébastien Moran, alias M dans Elementary, qui annonce Moriarty au lieu de lui servir de piètre successeur.
Mais c'est aussi le cas de Tobias Gregson, l'inspecteur en concurrence avec Lestrade dans Une Etude en rouge, le premier inspecteur rencontré par le lecteur, lâchement abandonné par Conan Doyle au profit de Lestrade. Réhabilitation est désormais faite dans Elementary qui le rebaptiste Thomas Gregson et lui donne la primeur sur Lestrade relégué au rôle de guest star. Le brave Gregson a d'ailleurs également la chance d'être interprété par Aidan Quinn, que l'âge ne cesse de bonifier et qui prête une belle humanité et une bienveillance toute paternelle à ce personnage qui devient l'un des points forts (sinon le point fort) d'Elementary.



D'illustres clients



Aidan Quinn, acteur bien connu en Amérique, qui n'est que l'une des nombreuses vedettes venues décorer la série en hantant ses corridors.
On citera sans exhaustivité et sans rappeler les noms déjà cités, Lucy Liu (Drôles de Dames, Slevin), Vinnie Jones (Snatch, Eurotrip), Nathalie Dormer (Games of Thrones), Sean Pertwee (Gotham, Dr Who), Rhys Ifans (Coup de foudre à Notting Hill, Harry Potter), Ron Rifkin (Alias), John Hannah (La Momie, Spartacus), John Noble (Le Seigneur des Anneaux, Fringe), Stuart Townsend (La Ligue des Gentlemen extraordinaires, XIII), Virginia Madsen (Le Nombre 23, Monk), Olivia d'Abo (Conan le destructeur), Tony Curran (Daredevil, Underworld 2, Dr Who), ou encore Nelsan Ellis (True blood).
Autant d'illustres clients venus apporter leur vernis ponctuellement ou de façon durable dans la série.



Sherlock Lodge



Mais le casting ne fait pas tout; bien souvent il tient le rôle de cache-misère. Vous savez, ce genre d'astuces de home staging à visée commerciale tant vanté par Stéphane Plaza et consors.
Dans Elementary, ce sont moins les êtres qui comptent que les décors, souvent remplis de livres ou de tableaux, mi-bibliothèques mi-cabinets de curiosités. Et parmi eux, le "sanctuaire" d'Holmes et Watson.
La résidence des deux protagonistes est un lieu à part, hors du monde connu au beau milieu d'un New-York bassement vulgaire et commun, le dernier bastion de la culture et du savoir, associé à quelques rares autres disséminés dans la grosse pomme véreuse. Lieu de tous les possibles où les murs servent tous d'espace à épingler photos, informations, où les écrans à la pointe de la technologie côtoient des livres centenaires, où la moindre brique recèle drogue, bijoux cachés, caméras, armes et secrets en tous genres, elle partage avec le TARDIS du Docteur Who son immense surface au mètre carré, ses nombreuses salles, ses indénombrables recoins, sa potentielle infinité.
Plus encore que cela, ce lieu, qui à lui seul génère l'envie et le plaisir du visionnage de la série, est le parfait reflet de la série tout entière. Ses bibliothèques, ses nombreux livres, représentent l'oeuvre de Conan Doyle et de ses continuateurs et le potentiel créatif dans lequel on les a placé. S'il ne s'agit pas du 221b Baker Street, entre-aperçu en début de saison 2 et dont le retour est annoncé à la sortie de la saison 6 sur les écrans américains pour une saison 7, il s'agit pourtant d'un lieu extraordinaire, d'un charme tout particulier. Message reçu: ce n'est pas l'original mais c'est tout aussi passionnant.
Un autre indice à conserver pour la déduction finale.



L'étrange cas des 3 pépins d'adaptation



Qui dit Sherlock Holmes au cinéma ou à la télévision dit adaptation. Surtout dans le cadre d'une transposition moderne.
Pourtant quand on dit Elementary, beaucoup disent scénarii non adaptés du texte holmésien.
Il y a là un paradoxe qui, comme tous les paradoxes, ne fait que souligner un défaut de concept.
Dans les faits, Elementary adapte et n'adapte pas les récits de Conan Doyle, selon l'humeur des scénaristes et les besoins en épisodes des différentes saisons. Ce qui fait de la série un hybride un chouya hypocrite qui a le cul sur 3 chaises.
Pour une typologie du lien entre Elementary et adaptation holmésienne, ces quelques traits rapides:
- des adaptations très fidèles, comme Fiel, mensonge et vidéos, parfaite transcription moderne de la nouvelle intitulée Charles Augustus Milverton ou "à la Sherlock" avec un jeu ingénieux avec le texte comme dans le cas des Chiens de Guerre ou de Lady Frances.
- des adaptations vagues voire très vagues, comme Profilages qui reprend de nombreux traits d'Une Etude en rouge sans assumer l'adaptation ou L'Homme à la lèvre tordue, traduit Drone de moustique en version française tant les quelques rares liens entre cette adaptation assumée et le texte original ne font pas illusion.
- des scenarii totalement originaux soit sans aucun lien réel avec l'univers de Sherlock Holmes, soit en imitation vague de l'univers holmésien en général. Dans le premier cas, il s'agit ni plus ni moins d'histoires interchangeables pensées autant pour Elementary que pour les nombreuses autres séries mettant en scène un particulier venant en aide à la police, telles que Castle, Cameron Black, Forever, The Mentalist, et caetera. Dans le second cas, ces histoires ont été réadaptées à l'esprit holmésien dans un soucis de cohérence par rapport au projet initial. C'est le cas du final de la saison 5 où le chef de gang qui ne fait que donner des conseils à son sous-lieutenant, réel gangster, est qualifié de "gangster consultant" pour devenir un ersatz opportun de Moriarty.
Trois approches simultanées d'où l'approche paradoxale d'Elementary.



Le cas du spectateur à la lèvre tordue (de perplexité)



Trois approches mais des scénaristes qui se remettent en question et réécrivent, réadapte, repensent sans arrêt. D'où de bonnes reprises mais aussi beaucoup de doublons et des limites de l'écart esthétique trop visibles.


Des doublons à l'exemple de l'Etude en rouge adapté pas moins de trois fois, mettant en scène la rencontre Holmes-Watson dans un épisode (Sherlock et Watson), la science de la déduction, le portrait psychologique et intellectuel de Holmes, la vengeance du tueur, l'inscription en sang et le concept de choix dans un autre (Profilage) puis Rachel et les pilules dans un énième épisode (Les Anges bleus - A Study in Charlotte). A l'instar du Chien des Baskerville, admirablement adapté dans Les Chiens de guerre mais trop cité dans la première saison, puisque Moran envoie des lettres du type de celles que l'on envoie à Sir Henry de Baskerville et que Moriarty se cache sous le pseudonyme de Stapleton. Nous n'évoquerons pas les finals qui adaptent souvent Le Dernier problème avec toutes sortes de Moriarty, dont un censé être le vrai ...


Car il y a plusieurs Moriarty et parmi eux, deux sont à rapprocher: Moriarty d'une part et celui qu'on surnomme le Professeur d'autre part. Le premier étant une réécriture féminine de la célèbre nemesis de Sherlock Holmes, l'autre une nouvelle réécriture masculine. L'écart esthétique qui poussait à repenser Moriarty en tant que femme dans la saison 1 pour créer la surprise ne peut plus pour surprendre que remettre en scène un Moriarty masculin. Retour à l'imité. De même, le père si attendu des frères Holmes, quand il paraît sert surtout à réécrire Mycroft tel qu'on le voit dans les nouvelles et non tel que le redéfini la saison 2 d'Elementary. Ecarts esthétiques contraints de revenir au modèles et de verser dans la redite qui n'en semble pas une pour qui est étranger aux textes de Conan Doyle.
De ces expériences mi-réussies mi-échouées d'apprenti sorcier ressortent deux points. Le point négatif, Elementary ouvrant une voie à la plus chinoise, plus féministe, plus délirante et plus éloignée du mythe d'origine Miss Sherlock. J'entends un cadavre se retourner dans une tombe de Minstead, Hampshire. Le point positif, c'est qu'Elementary s'usant donne envie de retourner lire les Sherlock Holmes à l'ancienne, redevenus originaux. Las, le duo Moffat-Gatiss et le réalisateur Guy Ritchie sont parvenus au même résultat avec autant de jeu et moins d'irrévérence ...



Des Saisons en Enfer



Pour autant, Elementary est une série très appréciable pour elle-même, une fois dépourvue de sa prétention d'adaptation.
Son fonctionnement est plutôt bien huilé et suit le modèle une saison / un ou deux personnage pivot / quota de nouvelles ou romans adaptés.


La Saison 1 est la saison centrée sur Irène Adler et ses assassins M et Moriarty.
Donnant le ton de la série, elle s'assume pleinement et use d'un plaisir sadique très communicatif à jouer avec ces personnages tout en bâtissant un univers sensiblement différent.
On y trouve deux adaptations d'Une Etude en rouge, l'une fragmentaire, l'autre totale mais non assumée. En regard, le final s'attachera plus à un mélange savoureux d'Un Scandale en Bohème et du Dernier problème. Aux côtés de ces "grands" récits holmésiens, font acte de présence une excellente adaptation de Charles Augustus Milverton, deux adaptations plus vagues du Rituel des Musgrave et du Signe des Quatre ainsi que des allusions discrètes au Chien des Baskerville et au Pont de Thor.


La Saison 2 tient le cap, centrée sur le personnage de Mycroft Holmes, le frère de Sherlock. Elle plaira surtout aux spectateurs peu connaisseurs de l'univers du fin limer de Baker Street et semblera un véritable faux-scoop aux autres. La révélation finale au sujet de Mycroft peut en faire glousser plus d'un. Néanmoins, le retour de Moriarty, l'espace d'un unique épisode.
Pour ce qui est du quota d'adaptations, la Saison 2 donne dans le vague avec une adaptation très libre de L'Homme à la lèvre tordue, une adaptation fermière plus ou moins en deux parties du Vampire du Sussex et de son fameux Rat géant de Sumatra intégré, une allusion purement verbale à L'Entrepreneur de Norwood et la belle adaptation d'Une Affaire d'identité hélas reléguée au statut d'intrigue secondaire d'un épisode.


La Saison 3 fait basculer Elementary dans l'adaptation de L'Illustre client. Si Shinwell Johnson n'est pas encore là, c'est bien Kitty Winter et le terrible Baron Adelbert Gruner, devenu le PDG Del Gruner, qui servent de pivot narratif à la saison. Ils n'occupent cependant qu'une moitié de la saison et il y a de bonnes raisons de croire au vu des parallèles Kitty-Gruner, Watson-March, du cameo vocal de Moriarty et le final que la deuxième moitié de la saison devait réunir Holmes et Moriarty. Ce qui demeure, c'est la bonne capacité des scénaristes à faire sans Moriarty.
Car, justement, le dernier épisode est une excellente adaptation du Dernier problème .... mais sans Moriarty. Du moins, le remplace-t-on par un ersatz intéressant. Outre ce final, deux autres adaptations: une version très libre des Cinq pépins d'orange et une excellente réécriture moderne, plutôt fidèle, de L'Illustre client, qui a le droit à deux épisodes.


La Saison 4, c'est la saison du père de Sherlock, Morland Holmes. Elle doit beaucoup à la présence au casting de l'incomparable John Noble qui donne une réelle impression de parenté avec Jonny Lee Miller d'un point de vue purement physique.
Mais la Saison 4 ne se repose pas sur ce fragile laurier et, pour ce qui est de l'adaptation, s'attelle à rien de moins que Le Chien des Baskerville, très bien adapté, La Vallée de la peur, plutôt fidèle mais un rien ennuyeuse, et à La Maison vide, astucieusement construite en cliffhanger sur deux épisodes et annonçant une énième réécriture du Dernier problème quand elle le résout dans les livres.


La Saison 5 devait tourner autour du personnage de Shinwell Johnson, issu comme Kitty de L'Illustre client. "Devait" car l'ancien truand ne passe qu'en touriste, les mains dans les poches et ne sert finalement qu'à introduire l'ambiance "gangsta" de cette cinquième saison. Pour rattraper cela, Elementary parie d'abord sur le retour inopiné de Kitty Winter, qui s'étend sur deux épisodes.
Pour prolonger l'état de grâce, deux adaptations de Conan Doyle vont suivre directement le départ de la protégée de Sherlock. Il s'agit d'une adaptation rock'n roll (dans toutes les acceptations du terme) de La Disparition de Lady Frances Carfax et d'une adaptation bien plus fidèle de Peter le Noir qui parvient même à dépasser en plaisir ressenti son modèle littéraire.
Il y a également une éventuelle adaptation très libre du Ruban moucheté ainsi que des allusions non moins vagues au Mystère de la Vallée Boscombe et au Diadème des béryls.


La Saison 6 [à venir]


La Saison 7 [viendra peut-être]



Résolution de l'énigme ? C'est élémentaire, mon cher !



Récapitulons les données du problème, le dernier problème.
Un bon générique mais qui assimile Sherlock Holmes à Rouletabille.
Un interprète jouissant d'une grande ressemblance avec le personnage tel qu'il est illustré dans le Strand.
Une bonne mise en relief des personnages secondaires des nouvelles.
Un casting fleuri.
Une adaptation le cul entre trois chaises donnant lieu à des doublons et à des redites.
Un lieu de résidence, métaphore d'une série éloignée de l'original mais nourrie de l'original et tout aussi plaisante une fois prise pour elle-même.


C'est élémentaire, cher lecteur: Elementary - tout en conservant ce nom - aurait dû être une série mettant en scène des héritiers intellectuels de Sherlock Holmes plutôt que Sherlock Holmes. Ses louables efforts eussent été plus appréciés et appréciables.
Comme Les Rivaux de Sherlock Holmes, elle dispose d'un bon acteur pour un Sherlock like, d'un bon casting et de personnages susceptibles de constituer de nombreux binômes Holmes-Watson, chacun à leur manière. Mais Elementary étant ce qu'elle est, les Bell-Gregson, les Kitty-Shinwell ne peuvent pas jouer aux Sherlock, restant d'éternels spectateurs du couple central.
Yun Jingyi n'eût alors pas à être Watson ni Watson à être Yun Jingyi mais deux êtres semblables, reflets.


Figurez-vous à présent le potentiel incroyable d'Elementary: Les Héritiers de Sherlock Holmes !
Une série mettant en scène des êtres en crise de vocations se regroupant autour de Charlie Hopes (Jonny Lee Miller), riche fils à papa accroc à l'héroïne, aux facultés d'analyse hors du commun et tenant à sa disposition l'immense propriété de son père. Devant sa science de la déduction aux oeuvres de Conan Doyle dont il est fan, il propose de créer le réseau Eweryone, un réseau d'apprentis Sherlock Holmes désireux de résoudre les affaires criminelles de New-York pour rendre service au Capitaine Gregson et, à l'occasion, contre monnaie sonnante et trébuchante, à des particuliers. Au fil des épisodes, l'on suit différents binômes dans leurs enquêtes et l'on assiste à l'aide que peuvent leur apporter les autres, attelés à leurs propres affaires. Le couple originel Charlie Hopes - Yun Jingyi sert de cadre lorsqu'il n'est pas lui-même protagoniste des enquêtes.


Une autre proposition intéressante mais un brin problématique serait celle inspirée du jeu vidéo d'objets cachés Sherlock: Lost Detective.
Yun Jingyi est chargée par un certain Morland Hopes de veiller sur son fils, Charlie, drogué. Très vite, elle découvre que son patient se prend pour Sherlock Holmes et lui demande de l'assister sur ses enquêtes. Ses succès dans la résolution des énigmes et certains détails troublants amènent Yun et les policiers qui acceptent peu à peu de jouer le jeu à se demander s'ils n'auraient pas affaire au réel Sherlock Holmes ! Mais comment une telle chose pourrait-elle être possible ? Et dans ce cas, qui est Morland Hopes et quel terrible secret dissimule-t-il ?


En attendant une idée de génie dans le genre de l'une ou l'autre de ces deux propositions,goûtons cependant aux agréables aventures de New-York Holmes et ne la jugeons à l'aune de Sherlock Holmes pour mieux l'apprécier que lorsqu'elle adapte les oeuvres de Conan Doyle.

Frenhofer
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le 24 sept. 2018

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