A la défense de ce manga hors-pair

A l'époque (j'étais alors éloigné de la télé ou d'une utilisation d'internet pour de la télé ou du streaming), il semble que le dessin animé ait eu un énorme succès. Mais il s'est passé un truc.
En fait, c'est la série la plus longue que Rumiko Takahashi ait publiée en manga et il faut aussi rappeler des éléments de contexte d'époque sur la relation entre mangas et animés. Un manga commence à être publié chapitre par chapitre dans un magazine, tantôt mensuellement, tantôt selon un rythme hebdomadaire, et l'animé est rapidement mis en chantier avec un épisode par semaine, sachant qu'un épisode permet d'adapter deux ou trois chapitres d'un coup. Les animés rattrapent le rythme de publication des mangas. La solution pour Dragon Ball Z d'étirer l'épisode sans raconter grand-chose ne fut pas des plus heureuses, mais le principal recours est de mobiliser les scénaristes de la maison d'animation pour qu'ils pondent des extras, des histoires de remplissage (d'où le mot anglais "fillers"), etc. Ces histoires sont en général des à-côtés, ils font parfois une partie d'un épisode ou très souvent ils forment un épisode avec une histoire du jour et des gags. Il y a aussi son lot d'incohérences, et puis donc ces épisodes fillers ralentissent encore plus un récit à suspense qui a déjà une certaine ampleur. Les shônen nekketsuesques sont de grandes victimes de ces fillers et étirements : Dragon Ball le Z du moins, Naruto, Bleach, etc. Et en plus, les animés brassent un public plus large que celui des mangas et les discours de frustration sur les longueurs et interruptions d'un animé vont dès lors massivement et facilement se répandre.
Les premières oeuvres de Rumiko Takahashi n'ont pas souffert de ce problème de longueurs des adaptations en séries animées : Urusei Yatsura, Maison Ikkoku, les OAV The Supergal, Fire Tripper et Laughing Target et on pourrait ajouter Mermaid Forest / Saga et Rumik Theater. Soit les histoires n'ont pas été réellement étirées, Maison Ikkoku étant un animé d'exception sauf pour la VF, soit les séries fonctionnaient sur de courts épisodes indépendants du profil gag manga / gag animé.
L'adaptation en animé de Ranma 1/2 a un peu souffert du problème de l'étirement de la série et des fillers, mais pas tellement, car on avait soit un épisode animé avec une histoire du jour prétexte à gags, soit un récit sur quelques épisodes avec des gags, mais si des choses évoluaient au cours de la série les histoires demeuraient indépendantes et on passait un bon moment comique. Il n'en reste pas moins que la série a atteint un très grand nombre d'épisodes et que seuls les 22 premiers volumes du manga furent adaptés en épisodes de série animée. Il y a eu ensuite pour les tomes 22 à 36, tantôt des OAV, tantôt des films, et puis les tomes 37 et 38 n'ont jamais été adaptés. On voit qu'il y a bien eu un petit souci.
Pour Inu-Yasha, la série a atteint les 56 tomes et c'est un récit, cette fois continu. Même s'il y a des récits courts, c'est la vision d'ensemble de la narration qui prime. Or, le manga et l'animé ont eu un succès de départ fabuleux, mais les fillers se sont abondamment introduits, et la série faisait plus de 160 épisodes je crois qu'on était pas encore à la fin de l'histoire. L'autrice en était elle à son 36ème tome. Et là, il y a une interruption, avec la reprise avec une série complémentaire qui a repris l'action à partir du 36e tome et l'a conduite jusqu'au 56e tome. Il faut comprendre que cela a fait du dégât dans la réputation de l'animé et par voie de conséquence.
N'écoutez pas tous les raisonnements qu'on vous fait sur le moindre intérêt de la seconde moitié du manga, sur sa longueur, etc. Il peut y avoir du vrai, ce n'est pas automatiquement, mais gardez dans votre esprit que c'est biaisé par l'incident qu'a été l'interruption de la série.
La fin du manga et de l'animé, c'est quelque chose d'exceptionnel. Si vous êtes impressionnés par le scénario de Full metal Alchemist : Brotherhood, dites-vous que celui d'Inu-Yasha est aussi puissant et n'a rien à lui envier.
Après, les épisodes fillers ont une tonalité qui sort vraiment du manga de Rumiko Takahashi, mais en s'aidant de la page Wikipédia vous arriverez au moins à passer outre aux fillers qui font un épisode entier précisément, car parfois il y a des épisodes partiellement fillers. Vous pouvez aussi jouer à deviner quels sont les épisodes fillers et vérifier après coup : on peut notamment remarquer que les fillers vont exploiter Shippô, le petit compagnon qui a tout de même un rôle assez effacé dans le récit original.
C'est une des plus belles séries animées qu'on puisse suivre. Je vais faire une critique du manga qui vaudra forcément pour le scénario de l'animé, mais on peut préciser également que, à cause de l'interruption, un des plus beaux moments émouvants du manga concernant Kagura est donc adapté dans la série d'épisodes complémentaires, celle que les gros malins vont trouver moins bien. Il y a enfin un ajout de l'animé qui a son charme, c'est le mot, c'est la louve-démone qui a des vues sur Kôga, elle n'est pas présente dans le manga, juste évoquée mais après-coup par gratitude pour son développement dans l'animé.