Les Simpson
7.7
Les Simpson

Dessin animé (cartoons) FOX (1989)

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Ce qu'il reste de ma série génitrice et matricielle (Saison 33)

Cela faisait une dizaine de saisons que je ne m'en étais pas tapé une entière. Il faut dire que sur les dernières HD, je souffrais plus que ne prenais du plaisir au visionnage. Vous allez me dire que j'exagère, que les épisodes ne sont pas désagréables, voire jolis et adaptés à notre époque. Il faut retourner peut-être à mon enfance pour comprendre d’abord d'où est venu mon Amour pour la série.

J'avais 7-8 ans quand elle passait sur Club RTL. Les épisodes étaient alors présentés par la déjà toute pimpante Virginie Efira, ce qui ajoutait un charme au visionnage. J'avais réussi à en enregistrer quelques uns au magnétoscope – autre époque – dont l'étrange « Au Frontières du Réel », marquant pour l'enfant que j'étais. C'était un des rares dessins animés qui faisait rire autant mon père que moi, certes, pas pour les mêmes raisons comme je comprendrai plus tard. Voyant le plaisir que l'on partageait ensemble, il m'acheta plusieurs VHS, les compilations « Sexe, Mensonges et les Simpson », « A Hollywood », « La Compil » et « Bart Wars, Les Simpson Contre-Attaquent » (deux cassettes pour 100 francs au Auchan, la pellicule se gondolait malheureusement trop vite). Les premières pièces de ma future collection !

Car j'en ai eu une belle, de collec' ! Sans me vanter, peut-être la plus fournie de Moselle à l'époque. Je récupérai la plupart de mes pièces aux marchés aux puces, avec mon père encore une fois, entre vieux Pez, figurines Quick, verres Amora, shampoings, coffrets K7, DVDs et autres curiosités. A la cour de récré, on s'échangeait les images manquantes de nos albums Panini que l'on collait le soir avec mon frère, sous le regard de ma mère qui ne voyait pas forcément ça d'un bon œil, n'ayant jamais compris l’œuvre. Puis début de mon adolescence, les comics Bongo/Panini qui sortaient une fois par mois, remplaçant mes « Journal de Mickey » et qui me faisaient perdre un bon bout de mon argent de poche, alors même qu'ils marchaient en soi bien moins que l’animation. J'ai vraiment vécu le phénomène à fond.

Au point que je montrais la série à tous, à mes potes, mais aussi à ma famille. Je me souviendrai toujours de mon oncle et de sa compagne, d'habitude réticents aux dessins animés, qui se sont pris d'un fou-rire lors d'un passage de « Chéri, Fais-Moi Peur » en me demandant « Qu'est-ce que tu nous fais voir, là ? » Bonheur partagé. J'ai senti commencer la chute quand certaines vannes de la saison 13 (nouvelle saison passant alors sur Canal) provoquaient une sensation de gène quand je les regardais accompagné de ma grand-mère ; je voulais lui faire découvrir un truc drôle, pas ce qui commençait à devenir de l'auto-parodie ! Mais ça passait encore, du moins, les soirées sur W9 en fin d'adolescence étaient encore tout à fait satisfaisantes !

Le véritable désamour a commencé pour moi avec la saison 17, dès l'épisode « Ma Femme s'appelle Reviens »… cette fois-ci, la gêne avait pris le pas sur le rire et la série ne retrouva plus jamais son efficacité… Un regain d'intérêt à la première saison HD, où j'ai eu d'abord l'impression que le rire pouvait revenir dans les détails mais espoir vite perdu au fil d'épisodes médiocres et d'une VF entachée par les morts du casting… J'ai du arrêter quelques saisons après, mais sans avoir vraiment mis le doigt sur ce qui ne fonctionnait plus, sur ce qu'avait perdu la série que j'adulais avant. C'est donc avec envie d'en découdre et une légère appréhension que j'ai lancé cette saison 33. Et peut-être comprendre…

Le premier épisode te rappelle d'emblée que la série est passée chez Disney. Oui, on commence par un musical… Et ce que ça fait mal au cœur d'entendre ce casting vocal vieillissant. La nouvelle doubleuse de Bart est difficilement supportable. Véronique Augereau qui joue Marge est remplacée par une voix totalement « princesse Disney » sur les parties chantées. Tous semblent peiner à suivre les notes et le rythme ; ce sera le cas des - trop nombreuses - parties musicales éparpillées sur toute la saison (sauf épisode 20 où ils ont laissé la VO et l'épisode 16 où… disons que les parties musicales sont justifiées par le retour de « Gencives Sanglantes »). Je ne vais pas trop me baser là-dessus, il y a eu déjà des numéros musicaux loupés dans le passé (coucou « Simpsonnerie chantante ») mais ils avaient le mérite de proposer en leurs seings quelques punchlines drôles ou chutes bienvenues. Aujourd'hui, ils sont utilisés principalement pour résumer -ils pensaient sans doute ‘dynamiser’- une intrigue ou un background que les scénaristes ont la flemme de devoir gérer.

Ce qui fonctionne encore pour moi aujourd'hui dans les saisons dites « classiques » de la série, c'est avant tout la satire, non pas de l'américain moyen incarné par Homer, dont l'idiotie fait surtout rire quand elle atteint des sommets d'absurde, non pas de la famille, qui donne tout de même aux épisodes ses passages les plus émouvants, mais de toute la ville (voire le monde entier), quand elle entre dans une sorte de folie collective qui n'est pas sans rappeler le film d’Adam McKay « Don’t Look Up » (lui-même sans doute inspiré de « La Comète de Bart »). C'est là l'aboutissement de l’esprit satirique initial qui donne lieu à quelques uns de ses meilleurs épisodes, du « Monorail » au « Puits de Mensonge » en passant par « Grève à la Centrale » ou « Erreur sur la Ville ». Quand on voit la satire des médias et du féminisme faite dans « Pervers Homer » et sa pertinence, surtout aujourd'hui, on est moins étonné de lire sur les réseaux que “les Simpson prédirait l'avenir”. L’ équipe de scénariste avait le Zeitgeist. La série avait compris son époque, point. La saison 33 tente quant à elle de la comprendre mais se ramasse constamment.

En effet, chaque épisode est là pour t'assener « Regardez comme on est modernes », te balancent un tas de refs poussifs (beaucoup plus que dans les saisons classiques) qui seront oubliés dans dix ans, te foutent Marge et Homer avec un portable qui regardent Netflix, OnlyFans, Facebook… ça veut toucher un nouveau public mais ça le fait comme ton grand-père qui t'envoie un mail avec des cliparts des années 90 et des virus. Il y aurait pourtant une carte à jouer avec des épisodes comme « Vous ne devinerez pas de quoi parle cet épisode - L’acte trois vous choquera » ; la carte de la série satire de la modernité, « Les Simpson » contre les réseaux sociaux… de toute façon, ils sont ringards et cette saison a prouvé qu'on n'arrive pas à croire à leur modernité. Pourquoi ne pas aller franco à contre-courant ? La famille des années 90 contre les années 2020… histoire d'être punk à nouveau à la place de s'adapter. Pourquoi ?! Le fric ? Mmh…

De plus, le tout dernier épisode est un éloge étonnant de la classe moyenne… mais ils te le refourguent en musical, avec Lisa et Bart qui réussissent à rapper moins bien que dans l'épisode « Le Rap de Bart », une partie chantée qui ne fait qu’énoncer les problèmes rencontrées par la populace, sans aucune once d'humour ou de subtilité. Et… attendez… je viens bien de voir Bart chanter un cantique comme un enfant modèle à l'église ?

Ce serait l'autre grosse critique que l'on peut faire à la série ; les scénaristes ont oublié qui sont leurs personnages. Au point que les personnages sont eux-mêmes obligés de le rappeler par des répliques. Juste Lisa, pour exemple, sort des trucs genre « Parce que je suis Lisa et que je suis très intelligente. J'ai besoin d'attention. Je me sens rejeté » etc… Oui, on le sait depuis le temps qu'existe la série ! Pas la peine de nous le rappeler durant tes interactions ! Dans un épisode, ils font au personnage de Martin ce qu'ils ont fait au personnage de Skinner dans « Le Principal Principal » (épisode détesté par certains fans, je vous laisse vous renseigner), c'est-à-dire, ils donnent une toute autre personnalité au personnage. Censé être la grosse tête, il est en fait juste timbré et sous médoc’. Qui veut voir ça sérieux ?

Dans l'épisode 19, on apprend que Marge est en fait aussi farceuse que Bart… Et dans l'épisode 11 que beaucoup semblent apprécier – et à raison pour ce que ça en dit sur la belle relation entre Homer et Marge – Bart reproche à ses parents de trop regarder la télé… Bart, oui… La même télé qu'il embrasse deux décennies plus tôt… Bart, si il n'a plus le comportement d'un voyou depuis longtemps, n'a jamais été aussi formaté, même quand il fait des “farces”. Dans cet épisode d'ailleurs, Marge est aussi stupide qu'Homer. Les scénaristes s'en foutent de la cohérence, tant qu'ils arrivent à placer leurs propos sur l'Amour. Dans le même genre, excusez-moi de préférer « Chérie, fais-moi peur » ; il arrive à en dire tout autant mais sans en perdre leur humour.

Je peux comprendre que les histoires finissent par se répéter au bout de 30 ans de longévité, mais il s'agirait de ne pas perdre en cohérence, ni d'oublier ! Dans l'épisode 15, on découvre un club de génies secret au sein de l'école… comme dans « La Dernière Tentation d'Homer » saison 5, où Bart est recueilli par ces génies à cause de son nouveau physique de geek. Kent Brockman espère en plein journal gagner à la loterie car il en a marre de cette ville… sauf que Kent Brockman a déjà gagné à la loterie dans l'épisode « Chienne de Vie » saison 3. Pareil pour cette blague des yeux ouverts la nuit qui éclaire la chambre, déjà vu dans je ne sais plus quel épisode. Pitié, prenez des scénaristes qui connaissent un minimum la série !

Ils ont aussi littéralement pissé sur un des meilleurs épisodes, celui où Homer retrouve sa mère, en les faisant à nouveau se retrouver dans le passé, changeant la chronologie et rendant ainsi incohérent l'épisode culte… disons que la série réécrit constamment son histoire, son âge d’or, sans subtilité, en essayant de raviver les mêmes émotions, vainement.

C'est là que le bât blesse. Dans les années 2000, les personnages étaient déjà des parodies d'eux-mêmes, aujourd'hui ils ne sont plus que les fantômes de ces parodies, qui errent dans un décor vieillot où on rajoute des trucs modernes sans que la greffe prenne. Ils sont utilisés comme des pantins par les showrunners qui se disent : « Tiens, ça serait marrant les Simpson dans « Games Of Thrones », dans « Strangers Things », Marvel ou je ne sais quel anime et univers… » mais jamais ils n'exploitent leurs concepts ; c'est juste les Simpson là-dedans, et ça devrait être drôle en soi. Y a Barney qui danse en fond avec d'autres seconds couteaux de la série pendant les musicaux donc c'est drôle. Y a une ref’ dégurgitée au « Fyre Festival » donc c'est drôle… Les personnalités et comportements sont interchangeables pour correspondre à l'univers de la parodie ou par simple besoin du scénario.

Ces personnages ont d'ailleurs tendance à forcer leurs répliques, à faire des bons mots qu'on ne comprend pas, qui appuient une vanne, sans être drôles, dans une fausse finesse dans le jeu…. Je ne sais pas depuis quand c’est le cas… Parfois aussi, des lignes de dialogue qui arrivent aléatoirement, de nulle part, comme dans l'épisode 19, le vendeur de BD dit qu'il a fait des études de médecines… Oui, et donc ? Où vous voulez en venir ? Je dois rire là ? Peut-être que j'aurais du mater en VO, peut-être ce sont juste les traducteurs français qui n'ont plus envie de se faire chier avec une vieillerie qui ne passe même plus sur nos chaînes.

Car pourquoi regarder encore les Simpson au final ? J'ai ri franchement deux fois sur vingt-un épisodes ! A la bonne réplique d'Homer qui essaye de se trouver un point commun avec Lisa : « Oh ? Les végétariens aiment la bouffe ? » . Et au meilleur (double) épisode de la saison : « Un sérieux Flanders », parodie de Fargo pas exempt des défauts déjà cités jusqu'ici mais avec des croisements d'univers bien trouvés et même, quelques bons gags. Est-ce suffisant pour justifier le visionnage d'une nouvelle saison HD ? J'aurais du me renseigner sur SimpsonPark pour n'avoir pas à me farcir tous les autres.

Pourquoi regarder encore les Simpson, alors ? Quand il y a aujourd'hui tant à voir, que ce soient des séries plus modernes, pertinentes, drôles et réussies ou que ce soient de nouveaux contenus créés chaque minutes sur les différentes plate-formes (dont d’intéressantes vidéos d’analyse de la chute de la série ou de sa réappropriation par la culture Internet, je vous laisse chercher !)

Pourquoi encore regarder les Simpson, si ce n'est par simple nostalgie d'un ex-fan qui aimerait y croire encore. La nostalgie ne devrait pas empiéter sur le rêve de revoir un jour la série à un niveau, au moins honorable ; elle devrait se contenter des premiers épisodes, qui ont changé ma vie.

Et j’écris ça sans exagération. Car en rematant ces vieux épisodes, je remarque à quel point elle a façonné ma culture, mon humour, mes tics, ma sensibilité, mon rapport au monde, ma façon d'être. Je ne suis pas le seul (là tout de suite, je pense au « Joueur du Grenier »), nous sommes des milliers… Nous avons été, enfants des années 90, autant éduqués par la télé que par nos parents ou par l'école. Nous sommes des produits du divertissement – que l'on se repassait en boucle - et je pleure alors l'état végétatif dans lequel se trouve aujourd'hui une de mes séries génitrices et matricielles.

Strangeman57
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le 18 mai 2023

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