Les procédures pénales sont pour vous synonymes d'ennui mortel ? Vous êtes allergiques aux poneys ? Et vous n'avez rien de positif à dire sur les fanfictions, encore moins mélangeant les franchises ? Parfait.


Turnabout Storm est une fanfiction, ou plus exactement un fanwork de l'artiste NeoArtimus qui a, après moult changements de direction, pris la forme d'une série vidéo évoquant le walkthrough d'une affaire de la série de jeux vidéo Ace Attorney... dans l'univers de la série My Little Pony : Friendship Is Magic. Hop hop hop ! Restez ici ! Je sais ce que vous pensez, encore un amateur de poneys colorés désireux de vous vendre sa came pour gamines comme le renouveau de la pensée du XXIe s. en série...


Vous n'y êtes pas. Ce que je vous vends, c'est, pour peu que vous puissiez tirer du sens de la lecture ou de l'écoute de la langue de Shakespeare, la démonstration que l'amour d'une simple amatrice pour un univers (ou deux), pour peu que s'y joignent créativité, dévouement et détermination, peut aboutir à des œuvres qui n'ont guère à envier à leur source d'inspiration. Qu'est-ce que ça donne en pratique ?


Neuf (!) heures d'enquête et de procès farfelus mais pas dénués de logique dans la plus pure tradition des Ace Attorney, au sein de l'univers saccharin mais malin (rassurez-vous, le diabète n'est pas un effet secondaire du visionnage) de la série de Lauren Faust, dans lequel Phoenix, protagoniste des jeux, a été invoqué afin de défendre l'une des Mane 6 (celles de la série) de l'accusation de meurtre.


Faisant fi des lieux communs sur les fanfictions, NeoArtimus démontre une qualité d'écriture épatante, saisissant parfaitement les personnages des deux franchises, tout en intégrant les siens propres avec naturel, et parvenant à mêler les tons, l'humour absurde, les gimmicks d'écriture, et les valeurs faisant le succès des deux œuvres avec brio... Ce mélange étonnamment réussi se poursuit jusqu'à l'identité visuelle de Turnabout Storm, reprenant l'interface du Visual Novel pour explorer Ponyville & ses environs ; mélange dont la fluidité ne saurait être entravée que par la dimension technique de l’œuvre.


Car, bien que NeoArtimus ait été entourée de collaborateurs talentueux pour accomplir ce petit exploit, il n'en faut pas moins admettre que son magnum opus conserve les limitations techniques inhérentes à sa nature même de travail "amateur." Les sprites utilisés ne sont pas toujours de la même qualité, l'intégration aux fonds pas toujours parfaite et les animations, hors procès en particulier, sont limitées. De même, si la qualité du travail des doubleurs est indéniable, elle souffre malheureusement de celle de la prise de son, beaucoup plus discutable - en particulier le doublage de Trixie lors de la partie n°2.


Il est toutefois à noter que ces défauts disparaissent au fur et à mesure des différentes parties : les qq coquilles ayant échappé à la relecture sont spécifiques aux premières parties, et les qualités visuelles et sonores ne cesseront de s'améliorer à chacune. Que ces défauts ne soient donc pas rédhibitoires !


Vous voilà presque convaincus, mais une interrogation subsiste dans vos esprits circonspects : "Vais-je révéler au monde que je connais par cœur MLP : FIM si je donne ouvertement sa chance à ce cross-over ??" Soyez sereins, la connaissance des œuvres ici mixées n'est pas un pré-requis, juste un bonus à la compréhension des références et plaisanteries internes (lesquelles ne se limitent à ces seules pierres de la pop culture). Sachez simplement que l'affaire a été écrite suite à la sortie de la S1 de la série animée, alors que n'étaient sorties côté Ace Attorney que la trilogie originale, Apollo Justice et le premier spin-off, Ace Attorney Investigations : Miles Edgeworth. En conséquence, l’œuvre n'est que plus appréciable pour ceux qui ont joué à ceux-ci (et vu celle-là), dont il reconnaîtront avec plaisir des pièces des OST en sus de quelques thèmes inédits dans la même veine au sein du "film." Je le répète donc, ce ne sont pas des pré-requis, même si c'est un mieux. (L'honneur est sauf.)


Un dernier point pour conclure, sur la longueur de ce qui vous attend : presque neuf heures de vidéo - comme mentionné plus haut... Elles sont réparties en non pas 4 (comme annoncé par le trailer) mais 6 parties, dont deux parties n°3 se déroulant en parallèle et donc complémentaires², ainsi qu'une partie n°5/4... parce que la fin s'étend. Le récit n'en est que plus complet, mais le rythme s'en ressent inévitablement. Mieux vaut regarder chaque partie indépendamment comme autant de long-métrages, sauf les parties n°1 / 2 qu'il vaut mieux enchaîner pour se faire un avis, la 1 n'étant qu'une introduction.


² A noter que l’ordre de visionnage recommandé est [Part 3/4] - Twilight avant [Part 3/4] - Phoenix.


Note : 8/10. Que les limites techniques initiales et la longueur effarante ne vous effraient pas, pas plus que l'éventuel dédain superficiel pour l'un ou l'autre univers explorés : vous avez ici affaire à une... affaire d'une grande qualité d'écriture en sus d'être régulièrement hilarante et, en dépit de (ou grâce à) son statut de travail de fan, l’œuvre idéale pour découvrir / replonger dans ces délicieuses franchises, en espérant pouvoir un jour non plus être simplement spectateur mais joueur, de ceci ou d'une suite...


Convaincu ? C'est ici : https://www.youtube.com/watch?v=yUDfoZGhLjE&list=PL347AD9B9E509804A

Gronowan
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 18 févr. 2018

Critique lue 172 fois

1 j'aime

Gronowan

Écrit par

Critique lue 172 fois

1

Du même critique

Dragons
Gronowan
8

"The rest of us would have done it... So why didn't you?"

2010 fut une année riche en films d'animation de qualité, depuis le retour gagnant de Toy Story 3 à la renaissance de Disney avec Tangled en passant par l'essai de Wes Anderson dans le média...

le 4 janv. 2018

3 j'aime

L'Attaque des Titans 2
Gronowan
8

SnK 2 : Vivement la suite ?

Après une première saison qui m'avait semblé lutter avec son budget pour maintenir ses ambitions visuelles, cette saison 2 de Shingeki no Kyojin régale constamment (ou presque) les pupilles,...

le 2 janv. 2018

3 j'aime

Orphan Black
Gronowan
8

Pourquoi devriez-vous regarder... Orphan Black ?

Suite à mon arrivée laborieuse sur SC (mes "mousquetaires" savent de quoi je parle) commençons par recycler les quelques critiques qui les ont poussés à vouloir m'y voir inscrit. Orphan Black me...

le 30 déc. 2017

3 j'aime