Racines
7.4
Racines

Série History (2016)

Ton nom est ton esprit, ton nom est ton armure.

Franchement, s’il y a bien une chose dont j’étais pratiquement sûr, c’était de ne jamais passer une soirée devant la chaîne Numéro 23 ! Mais il aura fallu d’une bande-annonce, alors que j’étais lancé dans un zapping comme je les aime, pour découvrir la série Racines. Seulement quelques images, quelques dialogues, quelques scènes, comme pour n’importe quelle bande-annonce me direz-vous, pour me dire qu’il fallait que je découvre cette série, que je découvre Racines.
Racines est une mini-série en quatre épisodes, signée Mario Van Peebles (oui, moi aussi j’ai été surpris, mais bon, on peut être un acteur ridicule mais un excellent réalisateur, enfin, je pense.) Elle est le remake d’une mini-série, en huit épisodes, du même nom, de 1977. Cette série, qui est elle-même une adaptation du roman d’Alex Haley, Roots : The Saga of an American Family.
Alex Haley est un afro-américain qui en apprenant que sa famille descend d’esclave africain, et d’un homme, Kunta Kinté, entreprend de longue recherche afin de lever le voile sur son passé, et par la même occasion sur le passé des Etats-Unis.
Au cœur du XVIIIe siècle, à Juffure, en Gambie, nous découvrons le jeune Kunta Kinté (Malachi Kirby), un guerrier mandingue. Il souffre des traditions familiales et ancestrales de sa tribu. Alors qu’il n’inspire qu’à étudier afin de prouver à l’homme blanc qu’il peut être aussi intelligent qu’eux, son père tient à ce qu’il soit un guerrier redoutable pour s’opposer aux Européens.
Après une dispute avec son père, son destin bascule, capturé par une famille rivale, les Koro, il est vendu à des marchands d’esclaves et le voilà en direction de la Virginie où il va devenir l’esclave de John Waller (James Purefoy), un homme cruel et méchant, propriétaire d’une plantation de tabac. Renommé Toby, il est confié à Fiddler (Forest Whitaker) ou le Violoneux.
Après une tentative d’évasion, Kunta Kinté et fouetté plus d’une trentaine de fois, lors d’une scène d’une rare violence, autant visuelle qu’émotionnelle, morale, jusqu’à ce qu’il admettre se nommer Toby et non Kunta Kinté. A partir de ce moment, Kunta Kinté comprend qu’il ne reverra jamais la Gambie, ne retournera jamais à Juffure, ne pourra voir ses parents qu’à travers son esprit ! Fiddler lui fait alors comprendre que s’il doit paraître Toby pour rester envie, au fond de lui il sera toujours portant le nom choisi par son père, Kunta Kinté !
Le temps passe, plus de dix ans, et malgré l’esclavage, Kunta Kinté reste libre dans son cœur, et surtout il tient à perpétrer les traditions apprises de son père, véritable liant entre les différends, héros, protagonistes de cette série, et à travers le temps. Vendu comme on vend du pain ou du linge, il continu de tenter de s’échapper, jusqu’à rencontrer Belle (Emayatzy Corinealdi). Kunta Kinté devient alors un mari, puis un père avec la petite Kizzy (Saniyya Sidney, Emyri Crutchfield, Anika Noni Rose). Ne pouvant plus risquer sa vie de façon aussi cavalière, il tient absolument à ce que sa fille ai la même soif de liberté avec des principes et des valeurs qu’il a lui-même appris étant enfant, en Afrique, à Juffure !
C’est cette soif de liberté, cette insoumission du cœur et de l’âme dont vont hériter tous les descendants de Kunta Kinté. La série se concentrant par la suite sur son petit-fils Chicken George (Regé-Jean Page) et son arrière-petit-fils Tom (Sedal Threat) pour se terminer avec Axel Haley (Laurence Fishburne), leur descendant qui nous narre cette tragique histoire.
Parce que si tous ces personnages, cette famille, se bat de toutes ses forces pour ne pas mourir, ils n’en demeurent pas moins des esclaves de l’Amérique sudiste. Des non-hommes que l’on maltraite, que l’on bat, que l’on vend, que l’on viole, que l’on tue par plaisir, colère ou par simple envie. Ils ne sont que des « Nègres » des bons à rien, des « choses » ayant moins de valeur qu’une baguette de pain, qu’un mouchoir. Racines nous dépeint à merveille cette violence monstrueuse qui s’est abattu sur ces Africains que l’on arrachait à leur terre pour en faire du bétail simplement parce qu’ils avaient une autre couleur de peau.

Un tel réalisme dans l’horreur, dans le monstrueux, dans l’abject, nous montre à quel point les Etats-Unis ont des fondements absolument honteux ! (C’est le cas pour quasiment tous les pays). Mais le pire, c’est le temps sur lequel cela à durer. Racines se termine à la fin de la guerre de Sécession, en 1865 ! Une guerre où les gens se sont entre-tués comme des bouchers pour savoir si l’esclavage allait être abolit ou non ! Une guerre où les Sudistes partaient se faire tuer pour que leurs esclaves restent des esclaves et ne soient pas considéré comme des hommes ! Affligeant.
Lorsqu’on regarde un film, une série, on se dit que les choses sont exagérées, ne sont pas vraiment réelles. Là, on se retrouve devant une série qui nous dépeint ce qu’une famille, une parmi des milliers, des millions d’autres ont vécu. On réalise avec effroi ce que l’homme blanc, l’homme soi-disant civilisé, cultivé, raffiné même s’est permis de faire durant des décennies et des décennies. Tuer, violer par plaisir, on touche le fond du fond, il n’y a rien de pire de se dire qu’on fait parti de la même « espèce » que ces monstres, que cela n’est pas si vieux, et que de nos jours beaucoup, trop, pensent encore la même chose.
Racines est une série qui dépeint l’horreur qu’a vécu une famille d’esclaves. Racines est une série qui pointe du doigt l’horreur humaine à travers des scènes chocs et choquantes. Racines dépeint comment des hommes soi-disant inférieur ont surmontés ce que leurs tortionnaires n’auraient sans doute pas surmonté. Racines nous dépeint comment beaucoup de familles américaines d’aujourd’hui retrouvent leurs racines dans l’horreur de l’esclavage et tout ce qui en découle. Comme Axel Haley, un américain, descendant de Kunta Kinté, un fils de l’Afrique, un fils de la Gambie, un fils de Juffure.
Racines est une série violente, difficile mais qu’il faut regarder, qu’il faut vivre pour ne pas oublier, pour se rappeler comment l’homme est, parce que, soyons sérieux un instant, il n’a absolument pas changé.
Bref, Racines est un devoir de mémoire ! Racines est là pour que jamais nous n’oublions d’où nous venons. Racines est une formidable série, montrant la nature humaine telle qu’elle est dans ce qu’elle a de plus sale, affreux et monstrueux, mais aussi dans ce qu’elle a de plus noble, de plus courageux et qui force le respect. Racines est une série qui pousse à réfléchir, à s’interroger et surtout à se dire que cela ne doit jamais recommencer, tant est que cela se soit fini un jour. Une claque, un coup de poing, on ne ressort pas indemne dans cette mini-série. A voir obligatoirement une fois.
Ton nom est ton esprit, ton nom est ton armure. Je ne connais pas toute l’histoire, mais pour savoir qui nous sommes nous devons savoir qui sont nos ancêtres, lève les yeux petit homme, regarde les étoiles, la lune et le ciel entier, contemple la seule chose qui soit plus grande que toi !

Romain_Bouvet
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 4 févr. 2017

Critique lue 1.2K fois

1 j'aime

Romain Bouvet

Écrit par

Critique lue 1.2K fois

1

D'autres avis sur Racines

Racines
ElizzZed
5

Critique de Racines par Aglaé Brisetin

Le premier épisode est pas mal du tout, mais j'ai trouvé la suite largement en deçà. Dans l'ensemble, trop "légère", comparé à la puissance d'un 12 years a slave. On passe d'un personnage à l'autre...

le 16 oct. 2018

1 j'aime

Racines
-Murmure
2

vite fait, mal fait...

Quelle deception La serie Racines de 1977 m avait enormement marqué lorsque j etais enfant L ayant revu il y a quelques semaines (sur France O ) j ai ete etonné de sa force et du realisme des...

le 30 juil. 2017

1 j'aime

Racines
Bambi-Killer
5

Roots: Critique du premier épisode

Je n'irai pas par 4 chemins, je suis assez déçue de l'adaptation. Je n'ai regardé que le premier épisode pour l'instant, mais dès les 5 premieres minutes je pouvais relever une foule d'élements qui...

le 28 avr. 2017

1 j'aime

Du même critique

Le Deuil de la famille - Batman, tome 3
Romain_Bouvet
3

Un Joker qui n'en a que le nom, un Batman qui n'en est pas un...

À peine remis de son éprouvant combat contre la Cour des Hiboux, Batman voit revenir son pire cauchemar, le plus terrible de ses adversaires : le Joker ! Et cette fois-ci le Clown Prince du Crime est...

le 14 févr. 2014

17 j'aime

4

Batman : Silence
Romain_Bouvet
4

Trop d’étalages!

Batman Silence ! Le run de 12 numéros du duo Jeph Loeb et Jim Lee, ou comment essayer de faire intervenir le plus de personnages possibles en un court laps de temps. C’est la première chose que l’on...

le 13 déc. 2013

17 j'aime

5