Redo of Healer
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Redo of Healer

Anime (mangas) Tokyo MX (2021)

A quoi sert le scénario quand on a du S-E-X-E ?

L'illustration présentée étant plutôt très éloquente et évocatrice, je me suis souvenu à quel point j'avais adoré l'animé Bikini Warriors et me suis mis à visionner ce nouvel animé : Redo of Healer, adapté du light novel du même nom (ou Kaifuku Jutsushi no Yarinaoshi: Sokushi Mahō to Sukiru Kopī no Chōetsu Hīru, dans la langue de l'auteur Rui Tsukiyo) et classé, selon la page Wikipédia ou encore plusieurs sites et fans comme étant... de la Dark Fantasy ?
Alors, je conçois que la classification (classer, Fantasy, résultat, merde, dixit Anne Besson) peut parfois laisser perplexe étant donné qu'une œuvre peut accueillir une multitude de sous-genre à l'instar - complètement au hasard - du film Dark Crystal : High Fantasy, Fantasy Épique et Dark Fantasy. Le problème concernant cette série... Bah c'est que le côté Dark Fantasy, je ne le retrouve nulle part (d'après les caractéristiques que je lui porte, il va sans dire ; les problèmes de définition jouent également dans cette complexité de classification). Il est plus juste de placer cette œuvre dans de la Fantasy Épique, sous-genre Fantasy Érotique (même Pornographique, à ce stade). Voire même l'inverse : Fantasy Érotique, sous-genre Fantasy Épique ; c'est la première fois que je vois une "catastrophe" de cette envergure ! Même Bikini Warriors n'était pas allé aussi loin, c'est dire ! Et pour vous illustrer ce naufrage exceptionnel, permettez-moi d'en expliquer les points désagréables.


Keyaru est un Héros guérisseur, normalement figure d'autorité grâce à son aura héroïque mais qui est rabaissé, torturé, brisé physiquement et psychologiquement par d'autres héros qui l'utilisent comme vulgaire outil. Au bout de quelques années de souffrance, Keyaru décide de remonter le temps pour faire payer au centuple ces tortionnaires les horreurs qu'il a subi.
Pas plus de spoil, même si je vais être obligé parfois ; désolé...


Bien évidemment, avant de commencer quoi que ce soit, soulignons l'appartenance de ce type d'animé à la catégorie ecchi, et là, c'est terminé, on peut remballer nos affaires. Si les dix premières minutes peuvent nous laisser espérer un divertissement somme toute intéressant, la spécificité de l'ecchi arrive en pulvérisant toutes nos espérances. Et qu'elle est la principale caractéristique du genre ecchi ? Une connotation sexuelle à la limite de l'abjecte ; à quel moment, de manière censée, une intrigue agrémentée de cet ingrédient peut normalement fonctionner ? Surtout que, pour ne vraiment rien louper, nous ne sommes pas dans une vision "sexe pour servir l'intrigue", mais dans quelque chose qui se rapproche de son exact contraire : "intrigue pour servir le sexe". Plus rien ne semble avoir d'importance que de satisfaire les désirs pulsionnels des spectateurs et du personnage, au point de noyer littéralement l'intrigue sous des séquences explicites de sexe, généralement non consenti, ou des tortures de même nature. L’obscène et l'indécence sont alors les maîtres mots si l'on désire qualifier en quelques termes cette série, au point d'en faire naître du dégoût dans les cas les plus extrêmes ou de l'exaspération si l'on est resté stoïque face à ce défilé lubrique. Si l'utilisation du sexe à outrance trouve un semblant de justification dans les premiers épisodes (et encore !), il est devient rapidement un catalyseur gratuit, sans visée scénaristique mais malgré tout nécessaire pour remplir les critères d'appartenance à un genre précis. Alors, tout le long des 12 épisodes qui rythment la première saison (parce que une deuxième saison semble inévitable), on demeure spectateur d'une corrosion scénaristique laissant paraître une prolifération de scènes pornographiques, et ce n'est pas comme nous n'étions pas prévenus. Le personnage principal tient à peu près ces paroles à une protagoniste, alors qu'il est en plein ébat sexuel : "Si tu désires te joindre à nous (pour partir à l'aventure), il va falloir t'habituer à cela (les scènes de sexe)." Cette mise en abyme est presque magnifique, stylistiquement parlant ! Comme si le héros s'adressait et à la jeune femme qu'il vient de rencontrer et à nous, spectateur, établissant de ce fait un tri entre ceux qui auraient le "courage" de continuer et ceux qui voudraient abandonner l'histoire. Une proposition louable et bienvenue quand le sexe en devient purement indigeste mais qui énerve tout autant, car le pire dans cette histoire, c'est que l'intrigue... mais elle est vraiment intéressante !
Retirez toutes allusions, séquences explicites / implicites, pensées... tout ce qui a un rapport, de près ou de loin, avec la sexualité et il reste, certes une faible quantité de moelle (si l'on compare l'animé à un organisme vivant), une substance scénaristique vraiment intéressante, qui mérite d'être développée : le héros, maltraité par ces compagnons de quête, qui décide de remonter dans le passé pour ce venger des mauvais traitements... mais bon sang ! Si ce n'est guère original, il y a tellement moyen d'en faire de l'or ! Alors, sérieusement, pourquoi tout gâcher par le vomissement incessant de séquences salaces ? Car même les séquences charnelles qui se veulent faire avancer l'histoire (grosso-modo, Keyaru va violer (littéralement) ces anciens tortionnaires, parfois jusqu'à la mort, pour se venger) ne sont que prétexte à un étalage de visions répugnantes ; quand bien même, on peut noter quelques tortures bien réfléchies. Couplé à cela donc des scènes de rapports sexuels (plus "soft" ; les séquences de tortures sont d'un trash absolu) présentes juste pour être présente, on a vraiment la sensation d'un néant scénaristique qui se résume facilement à : "Je vais me venger en violant mes violeurs". Et encore une fois, c'est d'un débile profond dès l'instant où l'on nous présente timidement des éléments concernant le lore, l'histoire, la politique... Cette inversion des tendances et des priorités est juste spectaculaire (mais en même temps, on ne regarde pas un porno pour son scénario, donc...) !


Concernant les personnages, inutile de préciser que le héros est de sexe masculin et que, tout au long de sa quête, il va "engager" (car c'est plus subtile que ça) des adjuvants féminins. Et là aussi, quelque chose que je n'avais jamais, mais alors jamais vu, dans aucune série, aucun film, aucun roman... va se produire ! Concernant la construction et l'évolution des personnages, on s'accordera à dire que l'on peut nous présenter des personnages construits, pas construits du tout, en voie de développement, bien développés, néantiques... et bien, dans cette série, les réalisateurs ont eu l'idée exceptionnelle et, sur ce coup, extraordinairement originale de faire régresser les personnages ! Concrètement, excepté le héros qui garde une évolution intéressante, il faut le dire, dans sa personnalité, son comportement ou ses volontés, les protagonistes féminins qu'il "engage" possèdent, à leur rencontre avec Keyaru, une personnalité parfois sympathique, profonde (sans mauvais jeu de mot) et qu'une fois "engagés" par ce dernier, on balaye d'un revers de manche tout ce qui les rendait uniques. Car chaque adjuvant féminin que Keyaru garde près de lui, du moins la majorité, est en réalité une de ces anciennes tortionnaires qu'il viole ou incite subrepticement à avoir des rapports sexuels avec lui (en bref, il viole) afin de les briser psychologiquement. Et le fait de les briser fait de ces personnages des légumes. Des "outils", pour rendre les termes employés par le héros. C'est tout de même incroyable de procéder à ce genre d'évolution de personnage : construire une personnalité doué de volonté, de raison et possédant une philosophie propre pour en faire un animal domestique, sans raison de vivre si ce n'est quémander avec plaisir le membre viril de Keyaru... Alors certes, elles ne servent pas non plus à rien car Keyaru essaye d'utiliser leur apparence, leur visage et pouvoir à son avantage, mais question indépendance des protagonistes féminins, hormis pour Setsuna (et encore, il faut plisser au maximum les yeux), c'est un zéro pointé. Une mention spéciale quitte à faire pour Setsuna qui, si on ôte tout ce qui peut déranger (soit dit en passant : tout), demeure la seule femme à avoir encore une forme de personnalité intéressante.
Autrement, dès l'instant où l'on a mis en lumière l'aspect régression des personnages, il n'y a plus grand chose à dire à ce sujet. Le héros possède des volontés intéressantes (si seulement elles n'étaient pas entravées par une volonté inextinguible de pénétrer ses jouets sexuels) et une évolution logique couplé à une philosophie (luxure mise de côté) qui peut interroger efficacement le spectateur. Concernant les esclaves sexuels du héros, hormis pour Setsuna donc, c'est la naissance d'un trou noir. Les antagonistes sont à l'image du héros ; il serait même plus juste de dire que le héros est (devient) à l'image des antagonistes, bien que certains d'entre eux sont véritablement intéressants à l'image de Œil de Faucon (qui doit être le meilleur). Néanmoins, on pourra remarquer quelques personnages secondaires, étonnement mieux développés que les antagonistes ou adjuvants, ce qui fait plaisir.


Pour la patte graphique, ha ha ha...
Le but de cet animé tournant autour du sexe, il aurait été dommage de proposer une animation dégueulasse, n'est-ce pas ? Donc, on est sur une qualité graphique convenable, proposant de nombreux détails (si vous voyez ce que je veux dire...) et une animation fluide (que ce soit au niveau des personnages, des sortilèges ou, détaillé plus bas, les combats). Les décors sont plutôt fournis et les différents endroits dévoilés assez vivants pour être immersifs sans compter que certains plans (de nature ; je tiens tout de même à le préciser) sont agréables à observer.


Pour les combats, au même titre que la moelle scénaristique, on est véritablement devant un rendu passionnant ! Les quelques séquences d'affrontement, surtout des duels, sont dynamiques, nerveuses et franchement bien orchestrées. A se demander la raison de leur présence dans un animé à la politique de divertissement si basse. Très sincèrement, bien que trop court la plupart du temps, les duels sont tous agréables à regarder avec des trouvailles sympathiques. Côtoyant donc les scènes de sexe, les affrontements se démarquent par leur côté assez violent sans forcément (ce n'est pas toujours le cas) entrer dans l'exagération ou la violence gratuite (je parle toujours des séquences militaires, il va sans dire, au vu de ce que j'ai écrit, que une bonne moitié des scènes de sexe sont violentes sans qu'il n'y ait de raison apparente).


Pour les musiques, nous sommes également face à une sorte de division par zéro : pour une production de ce gabarit, les musiques sont vraiment pas mal du tout. Les séquences d'introduction et de conclusion se permettent la présentation de mélodies tout à fait plaisantes et la série possède, si l'on arrive à ne pas détourner les yeux ou à se boucher les oreilles, des compositions sympathiques sans être transcendantes, mais ça fait largement l'affaire.


Redo of Healer brille par sa saleté déplorable malgré des points louables. A avoir d'excellentes idées dans tous les niveaux que j'ai pu relever dans cette critique, les réalisateurs trouvent le moyen de noyer l'originalité sous des séquences malaisantes, malsaines et immondes. Le sexe aurait été plus doux, je doute que cela aurait arrangé la notation mais le visionnage aurait peut-être moins souffert. Quand bien même, en l'état, cet animé est une catastrophe qui ne parviendra à attirer que les passionnés d'ecchi (dont je ne fais toujours pas parti ; et avec ce genre de découverte, ce n'est vraiment pas prêt d'arriver) par sa surenchère ignoble de lubrique malgré la détention notable et observable (ça doit être le pire...) d'éléments pourtant admirables. Forcément, je ne recommande que pour les habitués et les vétérans du genre mais il va sans dire que si je devais formuler une recommandation subjective, elle serait : "Ne regardez pas cette chose !"
Je trouve juste décevant d'avoir eu tellement en main pour, au final, ne proposer que ça...
Et n'oubliez pas que la Fantasy nous appartient !

PhenixduXib
2
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le 19 mai 2021

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PhenixduXib

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